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Grand Angle  

Maroc : La baisse de la confiance des ménages plombe la croissance économique

Depuis le quatrième trimestre 2018, la confiance des ménages au Maroc dégringole. Selon les nouveaux chiffres annoncés par le HCP, la baisse pourra même se prolonger sur l’année 2020, plombant ainsi la croissance de l'économie nationale.

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Photo d'illustration. / Ph. DR
Temps de lecture: 3'

Au Maroc, la confiance des ménages continue sa tendance baissière entamée depuis plus d'un an. C’est ce qui ressort des résultats de l'enquête de conjoncture auprès des ménages au troisième trimestre de 2019, menée par le Haut-Commissariat au Plan (HCP) et dont les résultats ont été publiés ce jeudi.

Ainsi, l’indice de confiance des ménages (ICM), dont les composantes portent sur la perception de l’évolution du niveau de vie, du chômage, de l’opportunité à effectuer des achats de biens durables et la situation financière des ménages, s'est établi à 74,8 points au T3-2019 contre 74,9 points enregistrés le trimestre précédent et 82,5 points une année auparavant, précise le HCP.

Au troisième trimestre de 2019 aussi, 43,9% des ménages déclarent une dégradation du niveau de vie au cours des 12 derniers mois, 26,7% des ménages s'attendent à une dégradation du niveau de vie au cours des 12 prochains mois et 79,7% s'attendent à une hausse du chômage.

Quels effets sur l’économie ?

Ce ressenti, qui se traduit par une baisse de confiance, n’est pas sans effet sur l’économie marocaine. «Si les Marocains n’ont plus confiance dans les institutions, c’est tout le tissu socio-économique qui est menacé», nous déclare ce jeudi l’économiste marocain Azeddine Akesbi. Pour lui, cette confiance, à côté de ses deux indices ; en l’occurrence le chômage et la dégradation du pouvoir d’achat, «ne sont pas que conjoncturels». «Au-delà des variations, c’est un pack de bombes à retardement», avertit-il.

Car avant tout, «la confiance est primordiale pour l’économie», complète Taib Aisse. L’économiste nous explique que «lorsqu’on fait confiance à l’économie, aux institutions, on consomme, les entreprises investissent, créant ainsi une dynamique qui fera bouger l’économie nationale». C’est d’ailleurs grâce à cette dynamique qu’il y a la croissance, la création de la richesse et de l’emploi et la résorption du chômage, poursuit-il. De ce fait, «dès que la confiance est touchée, tout cela s’arrête. Les gens consomment de moins en moins et se concentrent sur les dépenses obligatoires».

Pour Taib Aisse, étant plus un facteur psychologique, la confiance «se crée au niveau politique». «Il faut donc donner des signaux politiques forts pour la rétablir», suggère-t-il.

Le PLF pour rétablir la confiance ?

La confiance dépendant ainsi de la politique, c’est dans le Projet de loi de finances (PLF) que les ménages doivent percevoir des actions devant dissiper leurs craintes. «On espère que grâce aux mesures du PLF, cette confiance sera rétablie, car le gouvernement fait un effort aux niveaux des secteurs sociaux et il y a aussi des efforts en matière d’investissement public qui est important et qui reste encore un pilote de l’économie nationale», déclare Taib Aisse. Pour l’économiste, «si les banques jouent le jeu et commencent à financer sérieusement l’économie nationale, et notamment les PME et les ménages, on peut espérer qu’il ait une reprise de confiance et de croissance».

Mais pour le professeur Mohamed Chiguer, «nous sommes dans une société de défiance». De plus, «même en supposant qu’on arrivera à 7% de croissance, si la croissance est mal répartie», elle ne risque pas d’avoir un effet sur les ménages.

L'économiste ajoute aussi que «la marge de manœuvres du gouvernement dans la Loi de finances est presque epsilon». «L’essentiel est fait de manière presque automatique, comme le bloc ‘masse salariale’, le bloc ‘service de la dette’… Il ne reste que des miettes pour sortir un discours avec une fibre sociale afin de couvrir tout cela. De plus, le gouvernement ne fait qu’exécuter alors que sur le plan conceptuel et stratégique, ce n’est pas son affaire», ajoute-t-il.

«L’économie marocaine a besoin d’être restructurée, car actuellement, il s’agit d’une économie à mettre au pluriel. De plus, il y a un manque sérieux de liquidité pour les banques. Les problèmes sont plus profonds et plus graves.»

Mohamed Chiguer

Il pointe aussi du doigt la période de flottement que nous vivons : «Depuis 2007, on nous dit que le modèle de développement ne crée plus de croissance et qu'il faut le changer. Depuis deux ou trois ans, nous flottons» dans cet entre deux, dénonce-t-il. Il regrette sur ce point que «la Loi de finances s’inscrit à nouveau dans la continuité», sans pour autant avoir de visibilité sur ce nouveau modèle de développement qui se fait attendre.

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