Menu

Grand Angle

Du Sahara marocain au mémorial de l’Holocauste, parcours de l'activiste franc-maçon Oliver Bienkowski

Critiqué sur les réseaux sociaux, alors qu’on lui reproche de «faire la propagande d’Israël» Oliver Bienkowski, responsable du projet avorté de mémorial de l'Holocauste, a clarifié ce mercredi sa position. L’occasion pour Yabiladi de retracer son parcours et celui de son ONG qui s'est illustrée dans plusieurs causes, comme la défense des musulmans Ouighours, de la liberté de presse ou même la marocanité du Sahara.

Publié
En avril 2019, PixelHelper avait qualifié le Polisario de groupe terroriste, fustigeant l'implication de l'Afrique du Sud et l'Iran dans le financement de Hezbolah. / Ph. PixelHelper
Temps de lecture: 4'

La destruction du mémorial de l'Holocauste à Aït Faska a été largement relayée par les médias nationaux et internationaux. Un projet qui a fait bondir nombre d'acteurs politiques islamistes ou des militants pro-palestiniens au Maroc. L’Association marocaine des droits de l’Homme a ainsi accusé mardi l’ONG allemande PixelHelper de «propagande» pour une normalisation avec Israël. L’association marocaine est même allée jusqu’à relayer certaines «observations» de la population locale d’Ait Faska où la fondation allemande a acquis un terrain pour construire un complexe comprenant le mémorial de l’Holocauste, détruit lundi par les autorités locales pour défaut d’autorisations nécessaires.

Ce mercredi, Oliver Bienkowski, fondateur de PixelHelper répond aux accusations qui fusent sur les réseaux sociaux. «Ce n'est pas une organisation d'Israël, je ne suis pas juif et je n'ai jamais visité Israël», nous déclare-t-il ce mercredi, affirmant qu’il est «l'une des seules personnes à avoir fait un gros graffiti sur le mur de Palestine».

«Pour ceux qui disent que nous sommes contre la Palestine, je réaffirme que ce n’est pas vrai. Nous avons dit également que ce mémorial est destiné aux personnes qui meurent en Palestine. Et ceux qui disent qu'il n'y a pas eu d'Holocauste au Maroc, ne comprennent pas que ce n'est pas à propos de l'Holocauste et le Maroc, tout cela est à propos de l'art.»

Oliver Bienkowski, fondateur de PixelHelper

En gros, le mémorial de l’Holocauste ne représentait, selon le fondateur de PixelHelper, qu’une «pièce d’art» d’un projet plus large à Ait Faska. «Ce sont des œuvres d'art. Nous avons commencé en septembre 2018 et l'idée principale de notre projet "PixelHelper live stream quarter" était de développer un logiciel qui donne la possibilité d’interagir», explique-t-il. «Cela vous permet de regarder et de décider par exemple de la quantité de pains en conserve que nous préparons. C’est aussi la première plateforme d’aide humanitaire interstellaire avec des vidéos en livestream et où les gens interagissent», tient-il à préciser.

Après la boulangerie, PixelHelper a construit la tour puis une réplique de la clôture de la frontière européenne avant de bâtir les blocs controversés identiques à ceux du mémorial de l'Holocauste à Berlin. «Au début nous avons conçu une oeuvre pour les musulmans en Chine, puis celle pour commémorer les juifs homosexuels morts dans les camps de concentration européens mais nos installations artistiques sont destinées à toutes les minorités, sans exception», nous déclare Oliver Bienkowski.

Car ce que peu de gens au Maroc savent sur PixelHelper, c’est que bien avant le mémorial de l'Holocauste, l'ONG a à son actif plusieurs campagnes menées notamment en Allemagne. 

Oliver Bienkowski, fondateur de PixelHelper. / Ph. DROliver Bienkowski, fondateur de PixelHelper. / Ph. DR

Du «Light Graffiti» pour défendre des causes internationales

D’ailleurs, les actions et les campagnes menées auparavant par l’organisation allemande PixelHelper dans le monde sont exposés sur son site où figurent celles en faveur des musulmans Ouïghours de Chine (février 2016), celle contre les oligarques et la mafia à l'échelle mondiale (février 2018) ou encore celle pour les prisonniers politiques #FREETHEMALL (mars 2018), et bien d'autres encore...

De plus, plusieurs médias se sont faits l’écho de ces campagnes. En mai 2016, PixelHelper et Oliver Bienkowski étaient à l’origine de «messages lumineux» projetés sur la devanture de l’ambassade saoudienne à Berlin. Il avait, selon DW, projeté «un drapeau de l'Etat islamique avec les mots "Daesh Bank"» sur la façade principale de la représentation diplomatique de l’Etat wahhabite.

Le même mois, l’activiste allemand avait choisi de projeter une grande photo du président turc Recep Tayyip Erdoğan portant un brassard nazi et une moustache hilterienne pour protester contre l'emprisonnement de deux journalistes en Turquie, rapporte The Independent.

Le fondateur de PixelHelper, qui se définit comme un «Guerrilla marketing expert», avait utilisé en 2014 une forme de «graffiti modifié» pour projeter un autre message sur la façade de l’ambassade des Etats-Unis à Berlin. Il s’agissait d’une «illustration idiote du président américain Barack Obama et un message : "NSA in da House"» pour protester contre l’Agence nationale de la sécurité suite aux révélations sur les activités de surveillance de personnalités à travers le monde, comme le rapporte le média The Verge. Un an auparavant, Oliver Bienkowski avait projeté les mots «United Stasi of America» sur la devanture de l’ambassade américaine de la capitale allemande, également dans le cadre d’une manifestation contre les activités d'espionnage, rapporte le média allemand Spiegel.

Bien avant, en 2015, il était à l’origine d’un message projeté sur la façade du siège de la Banque centrale européenne à Francfort, le jour où le Parlement allemand votait «oui» pour l'aide octroyée à la Grèce.

Quand Oliver Bienkowski qualifait le Polisario de groupe terroriste

Les actions coups de poing de l'association PixelHelper sont étroitement liées à la personnalité de son fondateur. Né en 1982, Oliver Bienkowski, diplômé en informatique et en gestion, avait créé sa propre entreprise de cyber-sécurité qu’il vendra en 2006 pour se consacrer à divers projets. «Entrepreneur social» comme il était présenté au TEDxMarrakesh, il s’est alors spécialisé en street-branding notamment pour le compte d’entreprises. Deux ans plus tard, en 2008, son amour pour le «Light graffiti» le pousse à illuminer les bâtiments de Hypo Real Estate à Munich, au sujet de la crise économique et financière, avec une citation empruntée d’une vieille chanson allemande.

Aujourd’hui, Oliver ne rougit pas lorsqu’il affirme que son ONG est «inspirée par les idéaux des francs-maçons». «Les membres maçonniques de PixelHelper veulent, comme à l’époque de la Révolution française, se défendre contre l’injustice où qu’elle se manifeste», est-il indiqué sur le site de l'association, soulignant que «les francs-maçons sont attachés au bien être du monde» et ce, «depuis des siècles».

De plus, les fervents défenseurs de la marocanité du Sahara seront surpris d’apprendre que PixelHelper a mené, en avril 2019, une campagne contre l’Afrique du Sud, le Hezbollah et les «terroristes du Polisario».

En effet, selon un article publié par Sahara-question, l’ONG allemande a projeté des images de protestation sur les murs des ambassades d'Afrique du Sud et de Slovaquie à Berlin et à la porte de Brandebourg en signe de protestation contre le soutien de l'Iran et de l'Afrique du Sud aux «terroristes du Polisario et du Hezbollah».

PixelHelper était alors qualifiée d’organisation «créative de lutte contre l’injustice sociale par le biais d’un réseau mondial d’activistes et d’artistes utilisant des moyens inhabituels et innovants». Depuis vendredi, l'ONG est devenue la cible de tout le spectre des organisations luttant contre la normalisation avec Israël, allant de l'AMDH aux différents courants islamistes du Maroc.

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com