A Marrakech, l’heure est à l’indignation après la publication d’un post sur Facebook par Amal Mellakh. Chercheuse en patrimoine matériel et immatériel, cette femme originaire de la ville ocre effectuait une tournée à la médina lorsqu’elle a découvert qu’une maison a été construite au sein des remparts extérieurs de la ville de Marrakech, à Bab Doukkala.
«Construits autour des années 1126-1127 par la dynastie almoravide, et en particulier sous les ordres d’Ali Ben Youssef, les remparts de Marrakech, en forme de quadrilatère, formaient alors une muraille afin de protéger la ville des attaques extérieures», écrit-elle sur Facebook. Une sonnette d’alarme qu’elle tire, dénonçant une «situation où l’on court une grande insécurité et qui menace l’existence de notre histoire» et mettant en avant «des remparts en détresse». «Notre patrimoine n’est plus menacé : il est détruit», s’indigne-t-elle.
Contacté par nos confrères du 360, un responsable du service de l'inspection du patrimoine a affirmé qu’il s’agit d’une «infraction qui date d'au moins 30 ans». «La maison ne se voyait pas de l'extérieur», a expliqué Abdellatif Marou selon qui «tous les habitants (de cette zone, ndlr) ont bénéficié de lots de terrain» pour être relogés. Tous, sauf les propriétaires de cette maison qui auraient «tenu tête» aux autorités de la ville.
Un argument qu’Amal Mellakh réfute. «La construction semble récente», déclare-t-elle ce mercredi à Yabiladi. «Même l’argument avancé ne tient pas. C’est aberrant comme excuse», fustige-t-elle. La chercheuse en patrimoine matériel et immatériel enchaîne : «Le problème c’est ce qu’ils vont actuellement faire, car le mur a déjà été détruit pour construire la maison. Va-t-on la démolir ? Ce n’est pas possible.»
La maison construite dans la muraille de Marrakech. / Ph. Amal Mellakh
Le patrimoine de Marrakech en danger
Pour notre interlocutrice, «il faut trouver le responsable ayant donné son autorisation pour la construction de cette maison, comment cela a été fait et comment l’agence urbaine a permis cela». Dénonçant des fraudes qui menacent le patrimoine de la ville ocre, elle met en garde contre un «acharnement contre l’histoire de Marrakech».
Elle met également en garde contre la rénovation. «Embellir est un problème, car la couleur et la façon de rénover notamment diffèrent de la restauration. On n’est pas dans la ville ocre, mais plutôt dans une ville qui devient blanche», s’insurge-t-elle contre une restauration qui «a été malheureusement mal faite».
Les remparts de Marrakech après leur rénovation. / Ph. Amal Mellakh
Pour la chercheuse, il est «malheureux» de constater que «les gens n’aient pas cette culture de préservation du patrimoine, sachant que Marrakech est classé patrimoine mondial de l'humanité depuis 1985 par l' UNESCO, ce qui est très symbolique». Une cité qui «fêtera bientôt ses 1 000 ans alors qu’on arrive à faire de pareilles catastrophes», ajoute Amal Mellakh.
«Le comble, c’est qu’il ne s’agit pas d’un endroit isolé : c’est une route fréquentable, parallèle à une autre route plus grande et où un souk existe. Les gens voient cette maison de façon quotidienne mais personne ne s’indigne.»
La chercheuse en patrimoine matériel et immatériel précise qu’une enquête a été ouverte par les autorités de Marrakech pour déterminer les circonstances de la construction de cette maison et identifier ainsi les responsables de cette anarchie.