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Grand Angle

Maroc : Mieux vaut être riche quand on est handicapé

Le Français Philippe Pozzo Di Borgo, auteur du livre qui a inspiré le film «les Intouchables», vit aujourd’hui au Maroc. Un déménagement qui n’aurait pas été possible sans sa grande fortune. Sur les 1,5 millions de personnes handicapées que compte le Maroc, seules 12% bénéficient d’une couverture santé.

Le français Philippe Pozzo Di Borgo, auteur du livre qui a inspiré le film «les Intouchables», vit aujourd’hui au Maroc. Un déménagement qui n’aurait pas été possible sans sa grande fortune. Sur les 1,5 millions de personnes handicapées que compte le Maroc, seules 12% bénéficient d’une couverture santé.

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«Je préfère les richesses de ma paralysie à celles de ma classe», affirme Philippe Pozzo Di Borgo dont le roman «Le second souffle», qui a inspiré le film «Les Intouchables», de Eric Toledano et Olivier Nakache, présenté au Festival International du Film de Marrakech, le 10 décembre. Philippe Di Borgo, ex-directeur des champagnes Pommery du groupe LVMH et héritier de deux grandes familles françaises, handicapé suite à un accident de parapente, habite aujourd’hui au Maroc. «Essaouira m'a été conseillée à cause de ma maladie. Cette ville est la seule au monde qui bénéficie de l'atmosphère nécessaire à mon état de santé, avec une température qui varie entre 25° maximum et 16° minimum», explique-t-il. Il ne fait, toutefois, pas bon vivre au Maroc pour tous les handicapés car le climat, seul, ne suffit pas à leur confort. Plus de 90% des handicapés vivent dans des milieux défavorisés, indiquait le secrétariat d’Etat chargé de la Famille, de la Solidarité et de l’Action Sociale, au début des années 2000.

Pas de couverture santé

Selon la dernière étude en date, remontant à 2004, réalisée par secrétariat d’Etat chargé de la famille avec l’assistance technique du consortium français CREDES/Handicap International, le Maroc compterait 1,5 million de personnes handicapées, tous handicaps confondus, soit 5,12% de la population. Une évaluation plus faible que celle que l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) qui estime à 7% le nombre de personnes handicapées quelque soit la société. Au Maroc, 12 % des personnes handicapées sont affiliées à la Caisse nationale de Sécurité sociale, à une assurance ou à une mutuelle. Parmi eux, seuls 11 % déclarent que leur assurance couvre la totalité de leurs frais.

«Le droit à la santé est essentiel pour les handicapés», rappelle Youssef Errkhis, président de l’Association Amal des handicapés de Hay Mohamadi, aujourd’hui les personnes ne reçoivent aucune allocation spécifique. «Il n’existe que les allocations familiales versées par la CNSS [la caisse de sécurité sociale pour les salariés du secteur privé] pour chaque enfant. Dans le cas d’un enfant handicapé, les allocations ne cessent pas à 21 ans et se poursuivent toute la vie», explique Youssef Errkhis. Cette allocation s’élève à 200 DH par enfant et par mois pour les trois premiers enfants.

Une somme très éloignée des besoins réels des personnes handicapées. «L’appareillage coûte excessivement cher. Un corset, par exemple, coûte près de 25 000 DH, alors que les assurances remboursent, dans le meilleur des cas 8000 DH», explique Fouzia Gharbaoui, présidente de l'Association marocaine pour jeunes handicapés.. Selon elle, les fauteuils roulants que le ministère de la Solidarité national offre parfois sont loin de convenir. Les personnes handicapées sont souvent très fragiles et les fauteuils doivent leur être parfaitement adaptés ; «les personnes atteintes de maladies neuromusculaires ont besoin de coquilles moulées et elles coûtent très cher», précise-t-elle. Lorsque les personnes handicapées bénéficient d’une couverture santé, elle reste plafonnée de façon forfaitaire, mais, même celle-ci, «encore faut-il être salarié», souligne Fouzia Gharbaoui.

Pas d'emploi

12,2 % des personnes handicapées qui ont entre 15 à 60 ans sont sans emploi alors que seulement 32,7% sont considérées comme totalement inaptes au travail pour des raisons médicales, indique l’étude de 2004. Théoriquement, 7% des emplois du secteur public doivent être réservés aux personnes handicapées, mais «c’est une disposition quasiment inapplicable», indique Youssef Errkhis. Il rappelle qu’aujourd’hui encore et ce depuis plus d’un an, des diplômés chômeurs handicapés manifestent devant la wilaya de Casablanca, dans l’indifférence générale, pour obtenir des postes dans la fonction publique.

«Grâce à l’off shoring, le Maroc dispose, pourtant, d’un vivier d’emploi tout à fait adapté à un grand nombre de personnes handicapées : les centres d’appels», indique Fouzia Gharbaoui. Ceux de la société espagnole Atento accueille «un très grand nombre de personnes handicapées. Elle les a formées, leur offre un cadre de travail, notamment par les bureaux sur lesquels ils travaillent, tout à fait adaptés à leur handicap», tient à souligner Youssef Errkhis. En dehors de ces rares cas d’embauches, les personnes handicapées, faute d’aide publique, «vivent grâce à la solidarité familiale qui, au Maroc, joue un grand rôle», affirme Youssef Errkhis.

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