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Grand Angle

Angleterre : Quand la sélection médicale se fait au gré des discriminations

D’après une étude de la revue British Medical Journal, des salariées musulmanes du Service national de santé disent notamment avoir opté pour une spécialité médicale plutôt que pour une autre pour s’éviter des problèmes liés à la réglementation vestimentaire.

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Photo d'illustration. / DR
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Le leadership prôné par le Service national de santé (NHS), qui se veut «compatissant», selon ses termes, demeure encore en décalage avec la réalité du terrain telle qu’elle a été recensée par le personnel musulman, en l’occurrence les femmes.

C’est ce qui ressort d’une étude récemment menée par la revue British Medical Journal sur la base de témoignages de femmes musulmanes salariées au sein du NHS, le système national de santé de l’Angleterre, et que dénonce également Siema Iqbal, médecin britannique et auteure d’une tribune publiée mercredi 23 avril dans les colonnes du journal The Independent.

«Les nouveaux modèles de leadership du Service national de santé (NHS) axés sur le "leadership compatissant" encouragent une représentation plus large aux niveaux supérieurs, car cela pourrait améliorer la sécurité des patients et [générer] une meilleure productivité / innovation. Cependant, les groupes issus de minorités religieuses sur le lieu de travail peuvent rencontrer des obstacles importants en raison de codes professionnels en opposition avec des croyances religieuses étroitement ancrées», observent les auteures de l’étude – des femmes pour la plupart.

L’analyse décrit les expériences de femmes musulmanes qui portent le foulard dans les salles d’opération, ainsi que leur point de vue sur la politique de nudité des coudes (nommée BBE dans l’étude, pour «bare below the elbows»). Elle a pour objectif d’«étudier l’impact des politiques et des directives relatives au code vestimentaire en milieu de travail susceptibles d’influer sur l’inclusion et les opportunités sur le lieu de travail».

Privilégier des spécialités médicales plutôt que d’autres

Les sondées, qui sont issues de divers groupes ethniques et zones géographiques du pays, ont convenu que le port du foulard était important pour elles et au regard de leurs convictions religieuses (94,1%). Pourtant, plus de la moitié (51,5%) ont rencontré des difficultés à le porter en salle d’opération. Certaines femmes se sont senties gênées (23,4%), anxieuses (37,1%) et intimidées (36,5%).

«Les femmes musulmanes travaillant au sein du NHS ont déclaré avoir eu des difficultés à porter le foulard dans les salles d’opérations et à respecter la politique de dénudement des coudes. Cela illustre un problème plus vaste sur la façon dont les politiques peuvent être en contradiction avec les croyances personnelles, ce qui peut contribuer à réduire la diversité de la main d’œuvre», souligne l’étude.

Elle rapporte également que certaines femmes disent avoir opté pour une spécialité médicale plutôt que pour une autre pour s’éviter des problèmes liés à la réglementation vestimentaire : «L’insatisfaction à l’égard de la pratique actuelle du foulard dans les salles d’opération et de la politique de BBE a été mise en évidence, certaines répondantes préférant se spécialiser en tant que généraliste plutôt qu’en médecine hospitalière en raison de problèmes relatifs au code vestimentaire.»

Pour rappel, le 14 mars 2017, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a stipulé qu’«une règle interne d’une entreprise interdisant le port visible de tout signe politique, philosophique ou religieux ne constitue pas une discrimination directe». «Cependant, en l’absence d’une telle règle, la volonté d’un employeur de tenir compte des souhaits du client de ne plus voir ses services assurés par une travailleuse portant un foulard islamique ne saurait être considérée comme une exigence professionnelle de nature à écarter l’existence d’une discrimination», a-t-elle ajouté.

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