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Grand Angle

Maroc : Ali Lmrabet a-t-il été interdit de conférence par l’UIR ?

Prévue le 15 mars dernier sous l’égide de l’Université internationale de Rabat (UIR), une conférence intitulée «Les droits des Femmes : Progrès et Perspectives» n’aura finalement pas eu lieu en présence du journaliste Ali Lmrabet.  Le concerné dénonce «une censure», l’université s’en défend.

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Ali Lmrabet, ici le 29 Juin 2015 devant les bureaux des Nations unies à Genève. / Ph. Fabrice Coffrini (AFP)
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Le 15 mars dernier, le journaliste Ali Lmrabet devait prendre part au panel «Le rôle des artistes, médias et réseaux sociaux dans la promotion de l’égalité des genres», dans le cadre d’une conférence sur les droits des femmes au Maroc. L’activité ne se passera finalement pas comme prévu, l’intéressé ayant reçu, la veille de l’événement, un message lui indiquant que le rendez-vous est annulé pour non disponibilité des autres intervenants.

Pourtant, Ali Lmrabet avait bien reçu une invitation de la part des étudiants organisateurs, indiquant que l’activité devait se tenir à la Bibliothèque nationale du royaume du Maroc (Rabat), en partenariat avec le programme Arab Master in Democracy and Human Rights (ARMA) du Global Campus of Human Rights. Pour le journaliste, «il s’agit d’une censure de la part de personnes qui ont des a priori».

Selon lui, des membres de l’administration de l’UIR «n’ont pas souhaité» qu’il prenne part à l’une des activités de l’établissement, estimant qu’il serait «interdit» compte tenu de son historique et de sa condamnation passée. Par ailleurs, il soutient que le panel «a été supprimé à cause de [sa] présence».

Une «censure» qui ne dit pas son nom

Jean-Noël Ferrié, directeur de Sciences-Po Rabat au sein de l’université, explique qu’«un étudiant qui apportait son aide à l’organisation du colloque a, en aval de la fixation du programme de celui-ci, sollicité M. Lmrabet, sans en parler à la professeure responsable du colloque. Quand il l’a informée de son initiative, elle lui a fait remarquer que M. Lmrabet aurait une spécialité plus reconnue dans d’autres domaines que celui objet de la conférence».

Egalement directeur du Laboratoire d’études politiques et de sciences humaines et sociales, le professeur explique qu’«à aucun moment la présidence de l’Université n’est intervenue». «Je n’ai moi-même appris cette histoire qu’à la lecture du post de votre confrère. De fait, M. Lmrabet n’a pas été ni censuré, ni déprogrammé ; il n’a tout simplement jamais été programmé», soutient le chercheur.

Contacté par Yabiladi, Ali Lmrabet rétorquera : «Sur le fait que je ne sois pas ‘expert en matière de droits des femmes’, trois précisions : j’ai écrit des dizaines d’articles sur les droits des femmes dans La Vie économique, Le Journal hebdomadaire, Demain et surtout la presse internationale. Selon un professeur ami à l’UIR, généralement on ne demande jamais la ‘qualité’ des intervenants aux étudiants des universités qui organisent des débats. Je ne devais pas donner une conférence, seulement intervenir dans un panel de journalistes, qui a été supprimé.»

Un épisode qui ne serait pas le premier

Une source contactée par Yabiladi confirme en effet que «l’administration de l’UIR n’a pas été mise au courant de l’initiative» et qu’une fois la responsable de master -dont les étudiants ont piloté l’organisation- l’a apprise, elle aurait recommandé à ces derniers de «ne pas relancer Ali Lmrabet» et qu’elle prendrait le relais de lui répondre s’il revenait vers eux. «Tout le monde n’a pas entendu parler de cette affaire au sein de l’université, mais le choix de la BNRM a étonné car l’UIR allait tenir une précédente activité là-bas et l’a finalement déménagée», nous explique notre source. Contactée par Yabiladi à plusieurs reprises, la directrice du master n’a pas répondu à nos sollicitations.

Ali Lmrabet appuye la version que cette annulation serait une «interdiction», expliquant que ce n’est pas pour la première fois qu’il se retrouve dans une telle situation. «Il y a quelques années, une invitation pour parler des droits de l’Homme au Maroc des étudiants de l’Université Al Akhawayn a eu la même fin ; brutale même puisque le débat a été purement et simplement supprimé, comme peut en témoigner Ahmed Snoussi, ‘Bziz’, qui avait servi d’intermédiaire», rappelle le journaliste.

«A l’étranger, en 2009, Lola López Mondéjar, coordinatrice du festival de Cartagena, a dû démissionner parce qu’un conseiller de l’ambassade du Maroc à Madrid est allé à la mairie de cette ville du sud de l’Espagne à la tête d’une délégation, afin d’exiger la suppression de mon invitation et celle de Mme Nadia Yassine», affirme encore Ali Lmrabet. Selon lui, ce conseiller «dont le nom est cité par El Pais dans un article (qui n’a jamais été démenti)» est actuellement ambassadeur du Maroc dans un autre pays. «A l’époque, l’écrivain marocain, Abdallah Taïa avait annoncé publiquement son refus de se rendre à l’activité, pour dénoncer cette censure», précise-t-il.

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