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Grand Angle

3 mars 1973 : Quand des jeunes idéalistes voulaient renverser le régime de Hassan II

Le 3 mars 1973, un groupe de jeunes idéalistes de l’Union nationale des forces populaires (UNFP), manipulés par d’autres parties, voulaient lancer un mouvement armé. Même avec ses promoteurs marocains et algériens, l’opération fut un échec.

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Le roi Hassan II. / Ph. DR
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Le 3 mars 1973, le Maroc a connu la dernière action armée de l’opposition. Un groupe d’opposants, tous membres de l’Union nationale des forces populaires (UNFP) et après des séjours d’entrainement paramilitaire dans des camps en Syrie, en Libye et en Algérie, voulait lancer un mouvement de rébellion à partir du Moyen-Atlas. Ils avaient ainsi choisi la commune Moulay Bouazza.

Le projet était conforme aux marqueurs de l’époque. Les coups d’Etat et les mouvements armés étaient légion. Le Maroc a, d’ailleurs, vécu en 1971 et 1972 deux tentatives de putsch mais sans parvenir à changer la nature du régime. Le choix du village de Moulay Bouazza, située dans la province de Khénifra, s’inscrivait également dans ce cadre-là. Il n’est pas sans rappeler celui du Che Guevara de s’installer à La Higuera, en Bolivie, pour lancer sa révolution en Amérique latine.

Dans les deux cas, certes l’échec était au rendez-vous mais si le leader argentin a trouvé la mort dans l’assaut de l’armée bolivienne un certain 9 octobre 1967, au Maroc Mohamed El Basri, alias Fqih, est sorti indemne sans la moindre égratignure.

La figure de proue de l’UNFP, vivait alors en exil. Les présidents de l’Algérie, de l’Irak, de la Syrie et de la Libye l’accueillaient avec les honneurs dignes d’un chef d’Etat. En revanche, au Maroc et au sein de son propre parti, il était en minorité face à la montée des fidèles d’Abderrahim Bouabid, décidés à rompre avec le recours aux armes. C’est dans ce contexte que Fqih Basri cherchait à tout prix à réaliser un coup d’éclat.

Un échec annoncé

Lancé dans la précipitation, juste une année après le coup d’Etat du général Mohamed Oufkir, le projet était voué à l’échec. A commencer par la personne choisie pour chapeauter l’organisation de l’action armée qui aurait commis des erreurs dans la sélection du «réseau des correspondants» au Maroc et à l’étranger.

Abderahim Bouabid, le 14 juin 1971 au tribunal de Marrakech, en tant qu'avocat des membres de l'UNFP accusés de complot fomenté à l’étranger. / Ph. GI-AFPAbderahim Bouabid, le 14 juin 1971 au tribunal de Marrakech, en tant qu'avocat des membres de l'UNFP accusés de complot fomenté à l’étranger. / Ph. GI-AFP

Ce qui a permis aux services de renseignements d’être au courant du nombre exact des combattants, de leur cachette et de la quantité des armes en leur possession. Des armes en provenance de l’Algérie. Et bizarrement, après l’échec de l’opération, certains membres du «réseau des correspondants» ont été récompensés en échange de services rendus par une ascension dans la fonction publique.

Grâce à ses infiltrés, le pouvoir avait donc une longueur d’avance. En conséquence, les autorités s’étaient bien préparées avant de passer à l’acte. Des unités de l’armée et des Forces auxiliaires à Agadir, Meknès, Marrakech et Casablanca avaient ainsi reçu l’ordre de se diriger vers Béni Mellal et Khénifra.

L’opération Moulay Bouazza se résume en un baroud d’honneur de Mohamed El Basri qui a malheureusement coûté la vie à de jeunes combattants de l’UNFP, tombés sous les balles de l’armée, dont Mohamed Bennouna, Askour Mohamed ou Ibrahim Tizintli.

Alger parie sur le Polisario

Après leur procès, un groupe de seize militants a été exécuté le 1er novembre 1973. Les plus chanceux ont réussi à fuir en Algérie et en Syrie où ils ont passé des décennies avant que l’ancien Premier ministre Abderrahim El Youssoufi n’intercède en leur faveur auprès des autorités pour qu’ils puissent retourner au Maroc. Depuis, ils tentent de recoller les morceaux d’une vie brisée dans un jeu qui dépassait leurs compétences.

L’échec de l’opération de Moulay Bouazza a eu des répercussions sur la scène marocaine et régionale. Sur le plan intérieur, elle a servi d’argument à Abderrahim Bouabid et les siens de rompre le cordon ombilical avec Mohamed El Basri. Ils fondent alors l’Union socialiste des forces populaires (USFP). Le parti appelait à mettre en place des réformes démocratiques.

Au Maghreb, l’échec a surtout convaincu l’Algérie de Boumediene, dans sa quête d’affaiblir le régime de Hassan II, de jouer la carte du Polisario. Depuis, elle continue d’apporter de l’assistance militaire et politique au front séparatiste.

Quant au projet de mouvement armé, il a été enterré au village Moulay Bouazza le 3 mars 1973.

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