Menu

Grand Angle

Histoire du droit de vote des MRE : Un pas en avant, deux pas en arrière

Les MRE pourront seulement voter par procuration aux élections du 25 novembre. Ils n’ont pu élire, dans toute leur histoire, que 5 députés.

Publié
DR
Temps de lecture: 3'

5 élus. Les Marocains résidant à l’étranger ont compté, en tout et pour tout, depuis les premières heures de l’émigration, 5 élus à la Chambre des représentants. Malgré la nouvelle constitution marocaine adoptée par référendum – elle consacre le droit de vote et d’éligibilité des MRE depuis leur pays de résidence - les Marocains qui vivent à l’étranger en seront encore pour leur frais : s’ils veulent voter, ils devront donner procuration à un Marocain vivant au Maroc.

La première et unique expérience de députation date de 1984. Cinq circonscriptions avaient été décidées : Paris, Lyon, Bruxelles, Madrid et Tunis. Les députés avaient ainsi rejoint la Chambre des représentants jusqu’en 1992. 8 ans d’une expérience très critiquée et abandonnée dès la législature suivante.

Difficile communication entre les élus et les citoyens, volonté de conserver un esprit unitaire au sein des MRE, les raisons étaient nombreuses pour y mettre fin. La «migration politique» de trois des cinq députés pendant leur mandat a également sapé pour un temps le soutien de leurs partis d’origine, l’Union Constitutionnelle et l’USFP, au droit de vote Marocaine de la diaspora.

Abdelkrim Belguendouz, professeur de Sciences économiques à la faculté de droit de Rabat-Agdal et chercheur  spécialisé dans le domaine des migrations avance, dans un article publié dans l’Opinion en 2002, une autre explication plus prosaïque encore : une guerre d’intérêts entre le nouveau et éphémère ministère délégué à la Communauté marocaine résidant à l’étranger et les cinq députés. «Le différend était motivé notamment par l’achat de l’immeuble abritant également le ministère de la Communauté par les ressources de la Fondation et non pas par le budget de l’Etat».

Rapidement, les institutions pour les MRE ont semblé suffisant pour assurer la défense des intérêts de la  communauté MRE et la représentation nettement moins nécessaire. Dépourvus d’élus, les MRE ne sont pas totalement oubliés du droit de vote, puisqu’ils sont consultés directement, comme tous les Marocains, en 1996, pour le referendum constitutionnel et en 1995, lors du referendum pour l’amendement de la loi de finance.

En 1999, avec l’arrivée de Mohamed VI au trône, l’espoir renaît pour les militants du droit de vote. «Parmi les questions auxquelles Nous accordons également un intérêt particulier, celle de Notre communauté établie à l’étranger, en réfléchissant sérieusement à aplanir les difficultés auxquelles elle est confrontée [...]», assure le nouveau souverain dans son discours du trône cette année là.

Pourtant, en 2002, le premier ministre, Abderrahmane Youssoufi, exclut vertement les MRE des élections législatives, par le décret du 8 août, en ne leur rouvrant pas les listes électorales. «Nous avons eu une expérience durant laquelle nos compatriotes ont élu des députés. Tout le monde est unanime pour reconnaître qu’il s’agissait d’une mauvaise expérience parce qu’ils représentaient des continents entiers, n’avaient aucun contact avec leurs mandants et l’émigration ne se sentait pas représentée», justifie alors le premier ministre.

Le Conseil de l’Union des Associations des Professions Libérales des Marocains en France et le Collectif des Marocains de l’Ile de France et autres régions de France, coordonnés par A. Baghdadi, déposent alors un recours contre le premier ministre devant la Chambre administrative de la Cour suprême de Rabat. Le verdict, rendu après l’élection, le 26 septembre 2002, rejetait le recours pour vice de forme.

Le 6 novembre 2005, le discours de Mohamed VI aurait dû marquer une rupture. Pour la première fois, le roi assure explicitement et directement les Marocains de la diaspora de leur droit à voter à toutes les élections  marocaines et ce depuis leur pays de résidence. Deux ans plus tard, doivent avoir lieu les élections législatives,  mais là encore, les espoirs sont déçus.

Dans un communiqué commun, le 16 juin 2006, le gouvernement et les partis politiques vont à contre courant du discours royal. Les MRE pourront voter aux législatives de 2007 à condition de se déplacer au Maroc, chose qu’ils avaient déjà tout pouvoir de faire, par le passé, mais il fallait pour cela être inscrits sur les listes électorales.

C’est sur ce dernier point que s’appuie l’unique concession du gouvernement : les listes électorales sont ouvertes  expressément, du 5 avril au 4 mai 2007, afin que les MRE nés à l’étranger puissent venir s’inscrire, voire se porter candidats au Maroc. Mécaniquement, les espoirs se reportent sur les législatives de 2012.

Le premier juillet 2011, le referendum constitutionnel est organisé, comme en 1996 et 1995, dans les pays de résidence de la diaspora. L’article 17 de la nouvelle Constitution consacre les droits civiques des MRE : ils « jouissent des droits de pleine citoyenneté, y compris le droit d’être électeurs et éligibles.»

Dans les mois suivant, le ministère de l’Intérieur et les partis politiques, dans leurs débats pour la révision du code électoral, bottent en  touche une nouvelle fois. Seule concession : l’article 69 du code permet aux MRE inscrits sur les listes électorales de voter par procuration depuis leur pays d’accueil.

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com