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Grand Angle

Antisémitisme en France : L’islam et les musulmans présumés coupables

La recrudescence d’actes antisémites, notamment ces dernières semaines, a été l’occasion pour certains intellectuels et responsables politiques de faire porter aux musulmans et à l’islam le terreau de l’antisémitisme.

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L’agression verbale dont a été victime l’écrivain et philosophe Alain Finkielkraut, samedi dernier à Paris en marge de l’Acte 14 des Gilets jaunes, a réveillé la culpabilité présumée des musulmans sur l’antisémitisme. / Ph. Julie Jacobson/AP/SIPA
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«La seule mesure qui peut permettre de lutter contre l’agression de nos compatriotes juifs, c’est l’éradication du fondamentalisme islamique dans notre pays.» Les mots sont signés Marine Le Pen, présidente du Rassemblement national, prononcés mardi 19 février sur le plateau d’i24News.

C’est que l’agression verbale à caractère antisémite dont a été victime l’écrivain et philosophe Alain Finkielkraut, samedi dernier à Paris en marge de l’Acte 14 des Gilets jaunes, a réveillé la culpabilité présumée des musulmans sur l’antisémitisme. D’autant que l’auteur présumé a été identifié comme appartenant à la mouvance salafiste. La ministre de la Justice, Nicole Belloubet, a en effet répondu positivement à la question d’un journaliste qui lui demandait s’il s’agissait d’un «musulman pratiquant, proche des milieux salafistes, radicalisé».

Certains passages du Coran à l’origine d’un manifeste

Le même jour de la sortie médiatique de Marine Le Pen, le philosophe Michel Onfray a de son côté évoqué, sur le plateau de CNews, «les musulmans des banlieues qui estiment que tous les problèmes viennent des juifs qui accumulent le capital, l’argent, etc.» Juste avant, il déclarait : «Moi j’ai lu le Coran, j’ai lu les hadiths et les biographies du prophète, donc je sais très bien qu’intrinsèquement, l’antisémitisme s’y trouve.» Dans la même veine, l’essayiste Barbara Lefebvre, co-auteure de «Le nouvel antisémitisme en France» (Albin Michel, 2018), avait déclaré en avril 2018 sur le plateau de Franceinfo que «l’antisémitisme traditionnel était relativement actif sur les réseaux sociaux mais celui qui passe à l’acte, qui agresse et qui assassine c’est cet antijudaïsme qui vient du monde musulman».

Ces propos font écho au «manifeste contre le nouvel antisémitisme» signé en avril 2018 par 300 personnalités, demandant aux imams de réinterpréter certains passages haineux du Coran. «Nous demandons que les versets du Coran appelant au meurtre et au châtiment des juifs, des chrétiens et des incroyants soient frappés d’obsolescence par les autorités théologiques, comme le furent les incohérences de la Bible et l’antisémitisme catholique aboli par Vatican II», écrivaient-elles.

Plus d’enfants juifs dans les écoles de Seine-Saint-Denis ?

Au lendemain d’un grand rassemblement contre l’antisémitisme, mardi soir, place de la République à Paris, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Francis Kalifat, y est également allé de son commentaire. «En 2018 et comme les années précédentes, des Français juifs ont été insultés, harcelés, menacés, volés, agressés ou frappés parce que juifs, a-t-il déclaré lors du 34e dîner annuel du CRIF, avant le discours du président Emmanuel Macron. Trop souvent, les agresseurs sont des jeunes musulmans. Il faut en finir avec la justification religieuse de la haine des Juifs.»

Dans les écoles aussi, les élèves musulmans se voient imputer certains maux. Mardi matin sur LCI, l’écrivain controversé Eric Zemmour a de nouveau pesté contre «l’immigration de masse, terreau de l’antisémitisme». «Il n’y a plus d’enfants juifs dans les écoles de Seine-Saint-Denis. Ce n’est pas comme dans les écoles publiques du 16e arrondissement !», a soutenu le polémiste, considérant que l’islam n’est pas «une religion de paix et d’amour». Des déclarations qui ont fait bondir l’humoriste Yassine Belattar, chroniqueur sur LCI, lequel n’a pas tardé à annoncer sa démission.

Mais voilà, cette affirmation, également assénée par le député Les Républicains Eric Ciotti et les anciens ministres Brice Hortefeux et Luc Ferry, ne s’appuie sur aucun élément factuel, d’après Les Décodeurs du journal Le Monde. Ainsi, Rodrigo Arenas, coprésident de la Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) de Saint-Denis, a plusieurs fois démenti, non sans lassitude, cette affirmation : «Oui, il y en a !», et on compte bien des parents d’élèves du département de confession juive. Dans un pays où les statistiques ethniques sont interdites, Rodrigo Arenas déplore une situation «insupportable». «C’est que cela oblige des parents d’élèves à sortir de leur intimité en rendant publique leur religion, c’est contraire au laïcisme de la FCPE, explique-t-il. C’est faux, et on ne fait pas de fichier des élèves par religion, donc, ce n’est pas sourcé, ce sont des rumeurs.»

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