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22 octobre 1956 : Ben Bella, Mohammed V et l'histoire de l'avion dérouté

Le 22 octobre 1956, la France coloniale toujours présente en Algérie, interpelle un avion en provenance de Rabat et à destination de Tunis, appartenant au Maroc. L’arrestation de cinq leaders du FLN algérien à bord de cette avion provoquera une grande crise entre le Maroc et la France.

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Les cinq leaders algériens arrêtés par la France à bord de l'avion appartenant au Maroc, le 22 octobre 1956 à Alger. / Ph. DR
Temps de lecture: 4'

Le 22 octobre 1956, un avion appartenant à la Compagnie chérifienne du transport aérien est sommé d’atterrir à Alger par les avions de chasse de l’armée de l’air française, basés en Algérie. Il transportait Mustapha Lacheraf et Houcine Aït Ahmed, Ahmed Ben Bella, Mohammed Boudiaf et Mohamed Khider, leaders algériens du Front de libération nationale (FLN). Les événements ayant suivi cet incident auront d’importantes répercussions sur le Maroc, l’Algérie et la France.

Nous sommes en 1956. Dès la première année de son indépendance, le Maroc milite pour une Algérie voisine libre et indépendante. Ainsi, le roi Mohammed V rencontre, le 10 avril 1956 à Séville, le leader algérien Ahmed Ben Bella. Il lui transmet son assurance que la frontière avec le Maroc sera toujours ouverte à la circulation des «hommes et des armes».

Dans leur livre «Quelle gouvernance et quelles institutions au Maghreb face aux enjeux géostratégiques ?» (Editions L’Harmattan, 2015), Camille Sari et Abderrahmane Mebtoul racontent comment Mohammed V accorda au ténor de l’indépendance algérienne «un passeport marocain au nom de Mustapha Malik» et autorisé la création de la «première mission du Front de libération nationale à Rabat et l’ouverture d’autres bureaux à Oujda, Tétouan et Nador».

«Le souverain du Maroc a aussi décidé d’offrir à la révolution algérienne la première livraison d’armes d’Irak qui était destinée à l’armée marocaine ainsi qu’une quantité importante d’armes dont disposait cette dernière.»

Camille Sari et Abderrahmane Mebtoul

Le roi avait aussi multiplié les contacts avec le gouvernement français afin de l’amener à un dialogue direct avec les leaders du FLN. Il reçoit aussi, le 20 octobre 1956, Mustapha Lacheraf et Houcine Aït Ahmed, représentants du FLN à l’étranger. Habib Bourguiba, alors président de la Tunisie, émit le vœu d’accueillir, à Tunis, une délégation algérienne. C’est ainsi que Ahmed Ben Bella, Mohammed Boudiaf et Mohamed Khider rejoignent les deux autres membres du FLN à Rabat depuis le Caire.

Les cinq leaders algériens avec feu le roi Hassan II alors prince héritier. / Ph. DRLes cinq leaders algériens avec Hassan II alors prince héritier. / Ph. DR

Des avions de chasse pour dérouter l'avion marocain

Ils regagnent ainsi Madrid, puis Nador où ils croisent Hafid Ibrahim et Abderrahman Youssoufi, selon le récit de Maurice Buttin dans «Ben Barka, Hassan II, De Gaule : ce que je sais d’eux» (Editions Karthala, 2010).

Le 21 octobre, un communiqué commun rappelle «la position du souverain dans le conflit voisin». La France, outré, suspend les négociations franco-marocaines sur l’interdépendance ouvertes après le 2 mars. La France prend sa revanche en portant un coup dur au FLN et à la souveraineté du Maroc. «Elle fait détourner un avion portant les couleurs marocaines et menant à son bord Ben Bella et ses amis, hôtes officiels du roi du Maroc», raconte Maâti Monjib dans «La monarchie marocaine et la lutte pour le pouvoir» (Editions L'Harmattan, 1992).

Le 22 octobre 1956, et suite aux conseils de ses proches, Mohammed V emprunte son avion royal, en compagnie notamment de Hafid et Youssoufi. Les dirigeants algériens, qui partent aussi vers la Tunisie, sont à bord d’un autre appareil, appartenant à la Compagnie chérifienne du transport aérien, sous le nom de «F OABV», comme le raconte l’historienne Mounya Essemlali dans son article «Le Maroc entre la France et l’Algérie (1956-1962)», paru dans la revue «Relations internationales» (Editions Presses universitaires de France, numéro 146, 2011). Mais cet appareil sera interpellé par les autorités françaises dans un acte de piraterie aérienne.

«L’avion décolle de Rabat à midi pour se rendre à Palma (capitale de l'île espagnole de Majorque, ouest de la mer Méditerranée) afin de contourner l’Algérie. Puis, à 17 heures 15, celui-ci décolle de Palma pour Tunis. Or, à 17 heures 35, les membres de l’équipage, français ont reçu l’ordre de la France d’atterrir d’urgence à Alger.»

Mounya Essemlali

L’avion est ainsi dérouté par les autorités françaises au-dessus de la Méditerranée après avoir été intercepté par des avions de chasse de l’armée de l’air française, basés en Algérie. L’appareil se pose à l’aéroport «Maison Blanche» d’Alger où Ben Bella et ses compagnons sont arrêtés. La nouvelle est transmise à Mohammed V par le président tunisien Bourguiba dès son débarquement à Tunis.

Ben Bella avec feu le roi Hassan II. / Ph. DRBen Bella avec le roi Hassan II. / Ph. DR

Dans son livre «Des Républiques, des justices et des hommes» (Editions Albin Michel, 1976), cité par Maurice Buttin, Jean-Louis Tixier-Vignancour accuse le général Mohamed Oufkir. «Nous lui devions la capture en octobre 1956 de Ben Bella et de ses compagnons du FLN», écrit-il.

La vive réaction des Marocains et de Mohammed V

Mais l’acte de piraterie aérienne est perçu par la population comme une «offense visant la dignité de son roi, la souveraineté de son Etat et l’hospitalité du Maroc», raconte Mâati Mounjib. La réaction marocaine est ainsi très vive. «La foule se déchaîne dans une violence qui n’a été vue depuis les événements de Oued Zem en 1954. Les Européens sont attaqués et les forces de police débordées», raconte-t-il.

A Meknès et sa région, 50 Français sont tués dans des violences ayant eu lieu les 23 et les 24 octobre». Des Européens commencent à plier bagages – Mâati Mounjib évoque un chiffre de 20 000 Européens ayant quitté le Maroc dans les semaines qui suivent. Le roi propose même à la France d’échanger les dirigeants algériens contre son propre fils, le prince Hassan. Il envoie le président de Conseil discuter avec la France leur libération immédiate. 

Face au refus du gouvernement français, le Maroc rappelle son ambassadeur à Paris et «fait preuve d’une méfiance illimitée vis-à-vis des autorités françaises». Le roi Mohammed V regagne ainsi le Maroc «dans un avion non marocain et conduit par un pilote de nationalité non française». De Tunis, il fait «un détour par Rome et Madrid et non par Paris». Le Maroc, venant d’apprendre l’utilité de diversifier ses relations extérieures, commence alors à nouer des liens avec d’autres puissances telles que l’Italie et les Etats-Unis. Depuis la déposition de Ben Youssef en août 1953, les relations entre le Maroc et la France venait de connaître leur première crise.

Ce n’est que fin décembre 1956 que les deux pays mettront place une «Commission d’enquête et de conciliation» chargée de résoudre le contentieux. Elle permettra enfin «d’apaiser une crise sérieuse entre la France et le Maroc» et la reprise progressive de liens diplomatiques. Ce n’est qu’en septembre 1957 que les deux pays échangeront à nouveau des ambassadeurs.

Aguelmim
Date : le 22 octobre 2022 à 22h45
Toutes les révolutions terminent comme ça, elles prennent ceux qui la font. Cependant l'armée Algérienne est restée républicaine et a sauvé l'Algerie de l'idre islamique planifié, déployé et imposé progrès.
Citation
be à écrit:
C'est dommage que l'article ne mentionne pas ce qu'ils sont devenus ces 5 résistants et non 7 après l'indépendance !!! Un petit rappel : - Un a été renversé et mis en prison par Boukharrouba . Il s'agit de Benbella - Un autre a été assassiné par le régime actuel (la junte militaire) . Boudiaf - Un a été exilé en Suisse à cause de Boukharrouba et a fini sa vie en Suisse : Ait Ahmed - Un a fui en Espagne et a été assassiné par les services de Boukharrouba : il s'agit de Mohamed Khider . Seul Lacheraf est resté en Algérie en s'éloignant de la politique menée par la junte en devenant historien Donc tous ces intervenants algériens qui viennent nous donner des leçons de résistance qu'ils nous disent ce qu'ils sont devenus les vrais résistants !!!!
Aguelmim
Date : le 22 octobre 2022 à 22h37
Il y a eu beaucoup de choses qui se sont dites sur cet acte de piraterie !
be
Date : le 23 octobre 2021 à 18h46
C'est dommage que l'article ne mentionne pas ce qu'ils sont devenus ces 5 résistants et non 7 après l'indépendance !!! Un petit rappel : - Un a été renversé et mis en prison par Boukharrouba . Il s'agit de Benbella - Un autre a été assassiné par le régime actuel (la junte militaire) . Boudiaf - Un a été exilé en Suisse à cause de Boukharrouba et a fini sa vie en Suisse : Ait Ahmed - Un a fui en Espagne et a été assassiné par les services de Boukharrouba : il s'agit de Mohamed Khider . Seul Lacheraf est resté en Algérie en s'éloignant de la politique menée par la junte en devenant historien Donc tous ces intervenants algériens qui viennent nous donner des leçons de résistance qu'ils nous disent ce qu'ils sont devenus les vrais résistants !!!!
Newhorizon20
Date : le 23 octobre 2021 à 16h32
Si le Maroc voulait trahir l'Algérie, il aurait commencé par accepter le deal de De Gaulle de récupérer son Sahara Oriental en contrepartie de laisser tomber la résistance algérienne. Par contre, la trahison algérienne est manifeste quand la junte militaire algérienne a refusé de restituer le Sahara Oriental au Maroc, comme le Gouvernement provisoire de la République algérienne avait promis de faire après l’indépendance de l'Algérie.
ssoum
Date : le 23 octobre 2021 à 12h34
YABILADI...apporte sciement de l eau au moulin des haineux anti marocain avec des sujets multiecule remuant sans cesse la m..... pour susciter ce qu ils appellent des clash afin de genere des clicks mentalite pitoyable et anti journalistique J APPELLE quand meme nos compatriotes marocains a ne plus répondre a ces gens dont on ne connait pas l identite d une part par ce que chaque réponse les valorisent et leur donne de l importance alors qu il n y a pas franchement pas de quoi d autre part pourquoi répondre a un discours mille fois ecule et perdre son temps avec ca c est comme zemmour d ailleur de la meme origine qu eux lui viens avec son discours et s y tiens immigration islam musulmans eux qui partage la même culture que lui c est makhzen roi monarchie quelque soit le debat ca revient comme du chou de la perte de temps a quoi bon repondre a ces inutiles on peut tres bien débattre ensemble et les ignorer ils iront aboyer ailleur d aboyer
Awwal
Date : le 23 octobre 2021 à 06h36
Comment la France a pris connaissance de l’identité des voyageurs de cet Avion ?
Axis.7
Date : le 23 octobre 2021 à 00h48
Hocine Ait Ahmed revient sur l'appui decisif du prince heritier Hassan à la revolution algérienne: La dictature algérienne a osé accuser Mohamed V et Hassan II d'avoir livré l'avion aux français. Hocine Aît Ahmed a FORMELLEMENT DEMENTI Cette accusation ordurière et au dessous de la ceintures. Les porcs ne reculent jamais devant rien. Mohamed V a même proposé son fils le futur Hassan II en otage aux français en échange des dirigeants algériens. L'indignation du Roi a été telle que cela a donné un retentissement international a l'acte de piraterie de la France.Et en definitive donne un echos aux revendications algérienne. Ces temoignages donnent la nausée sur l'ingratitude du pouvoir algérien qui continue de plus belle à ce jour.
Maghrébin Amazigh
Date : le 22 octobre 2021 à 20h48
Aar ailikoum ya nas meknes de Dahmane Harrachi
Maghrébin Amazigh
Date : le 22 octobre 2021 à 20h44
Aar ailikoum ya nas meknes de Dahmane Harrachi
Rio de oro
Date : le 22 octobre 2021 à 20h33
Une chanson du patrimoine chaabi algérien que les caporaux ont banni de Leur patrimoine populaire d'el Haj laanka, cause la chanson remercie feu Hassan2 pour son aide à l'Algérie. Voici le lien : Https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=224673649759586&id=1000 66508576962&spnsn=scwspwa
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