Qui l’aurait cru ? Malgré l’attentat à Marrakech en avril dernier, un Ramadan en plein mois d’août, les révoltes et les crises politiques en Egypte et en Tunisie, la guerre en Libye, la répression en Syrie, des évènements qui en somme ont refroidi les touristes, le royaume a réussi à éviter le pire. Lors d’une conférence de presse le 14 septembre dernier, à Casablanca sur le bilan de la saison, le ministre marocain du tourisme Yassir Znagui a affirmé à l’Agence France Presse : "Nous ne sommes pas dans l'euphorie, mais la forte progression de notre tourisme avec 10% en moyenne au cours des 10 dernières années nous a permis de résister au ralentissement de l'activité cette année". Yassir Znagui ajoute que le royaume ne connaitra pas cette année une progression à deux chiffres de son tourisme. Il vise plutôt une augmentation de 5% du nombre de touristes pour 2011. Au premier semestre, 4,2 millions de touristes ont visité le royaume. Pour rappel, en 2010, le Maroc a accueilli 9,3 millions de touristes sur son territoire.
Le réveil des Tunisiens
Les tunisiens n’ont pas dit leur dernier mot pour autant et comptent bien remonter la pente. C’est ce qu’a fait savoir Mehdi Houas, le ministre du commerce et du tourisme tunisien qui était de passage hier à Paris, rapporte 20 Minutes. Mehdi Houas a été nommé ministre au lendemain de la révolution tunisienne et sa mission est claire : remettre le tourisme de son pays sur les rails. Et il est prêt à tout pour parvenir à ses fins. C’est d’ailleurs lui qui a lancé une campagne de publicité (d’un montant de 55 millions d'euros) faisant le buzz sur le web puisqu’elle utilisait la Révolution du Jasmin comme argument de vente. Un des slogans de cette campagne était : «on dit qu'en Tunisie, les balles fusent», une image qui montrait un homme jouant au golf. Le tourisme est un secteur clé de l’économie tunisienne puisqu’il fait travailler un Tunisien sur 5. La Révolution du Jasmin a fait chuter de 36% l’arrivée des touristes. Mais la Tunisie a tout de même limité la casse, le ministre Houas prévoyant une dégringolade de 50%. Au total, 3,2 millions de visiteurs se sont rendus en Tunisie depuis le début de l’année.
Toutefois, le ministre tunisien reste optimiste et ambitieux. Il a fait savoir qu’il visait d'ici 2016 dix millions de touristes par an, les mêmes chiffres réalisés l’an dernier par le Maroc. Pour ce faire, Houas veut mettre de côté le tourisme balnéaire et mettre en avant ses 3000 ans d’histoire et ses 7 sites inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco. Il souhaite également développer de nouveaux produits qui privilégieraient les randonnées et les circuits à l’intérieur des terres.
Nouvelle clientèle, nouvelles niches
Malgré le contexte actuel en Tunisie, le pays du Jasmin a toujours été et reste un concurrent sérieux du Maroc selon Adnane JELB, chef du Service Etudes et Veilles Stratégiques à l’Observatoire du Tourisme du Maroc. «La Tunisie a toujours misé sur des produits de grande masse et moins chers que le Maroc, principalement le balnéaire avec des vacances de 2 semaines à 300 euros autour des plages et près des palmiers. Mais aujourd’hui la Tunisie se réveille et vise une nouvelle clientèle et de nouvelles niches» explique-t-il. En d’autres termes, la Tunisie compte bien s’accaparer une part du marché touristique marocain, voire même marcher sur ses plates-bandes en développant des produits haut de gamme, culturels et plus courts de 3-4 jours. Elle compte également mettre à niveau ses hôtels, investir plus d’argent dans les formations du personnel et rehausser la qualité des prestations.
Adnane JELB insiste sur le fait que le Maroc doit faire en sorte de ne pas commettre les mêmes erreurs que la Tunisie concernant le bétonnage intensif des plages tunisiennes, un bétonnage qui perturbe l’équilibre écologique du littoral, et qui alarme les urbanistes, écologistes et élus locaux. Plus de 40% de la superficie totale des zones littorales tunisiennes est une énorme dalle de béton.