«Trois affaires dont nul, à leur commencement, ne sait comment elles vont évoluer et surtout finir : un amour, une carrière, une révolution…» Cette célèbre citation d’un penseur reprise récemment par Béchir Ben Yahmed dans Jeune Afrique mérite de nouveau d’être rappelée à propos des troubles en cours dans le monde au arabe. En Egypte, «la révolution a réussi à renverser le régime mais n'a pas encore réussi à édifier un nouveau régime démocratique», regrette l'ancien vice-Premier ministre égyptien, Yahya Al Gamal. Chez le voisin tunisien également, la révolution du Jasmin tarde à porter ses fruits alors qu’elle a mis la Libye à terre.
Au Maroc par contre, «il est dit et reconnu par les différents leaders que la démarche marocaine est une démarche non seulement saine et utile pour les Marocains, mais aussi utile pour nos frères dans le monde arabe.» Déclaration de Taïeb Fassi Fihri, chef de la diplomatie marocaine qui s’attend à ce que le royaume soit «une source d’inspiration» pour les autres pays arabes. C’est dans ce cadre qu’est organisé à Rabat le Forum international sur les transitions démocratiques et les processus constitutionnels dans le monde arabe.
Une rencontre de deux jours ouverte ce vendredi 16 septembre et qui vient de se clôturer ce samedi. Des personnalités de renommée internationale du monde politique, économique, académique et journalistique y ont échangé sur les «processus de consultation constitutionnelle pour les transitions démocratiques dans le monde arabe» et «les dispositions constitutionnelles pour assurer la réussite de [ces] transitions démocratiques». Une manière de mettre en valeur la pertinence de la démarche marocaine, indique Taïeb Fassi Fihri. Une démarche «audacieuse» que la réforme constitutionnelle entend matérialiser.
Task Force
Aux yeux des «partenaires» du royaume à l’instar l’UE, cette réforme est vue comme une «évolution spectaculaire», à en croire Bernardino Leon, le représentant spécial de l'Union européenne pour le Sud de la Méditerranée. Tout effort méritant récompense, l’UE entend mettre en place une «Task Force» pour soutenir les pays en transition démocratique que sont la Tunisie, le Maroc, la Libye ainsi que l’Egypte et la Jordanie. «C’est notre responsabilité, notre devoir d’aider ces pays» confie Bernardino Leon.
Reste à savoir si les peuples révolutionnaires ne manqueront pas d’y voir une manière pour l’UE d’essayer de renforcer sa présence dans les pays du Sud-est de la Mare Nostrum malgré la volonté affichée des peuples arabes de soustraire leurs Etats de la tutelle occidentale. « La dynamique actuelle de révolte dans le monde arabe est une revanche sur le nouvel ordre mondial et son incapacité à favoriser et appuyer la démocratie» explique Abdelaziz Lamghari, président de l'Association Marocaine de Droit Constitutionnel, co-organisatrice du Forum, avec le Club diplomatique marocain.
L’Union pour la Méditerranée pour sa part, n’entend pas laisser cette occasion filer pour tenter de ressusciter. A travers notamment des «projets concrets qui vont contribuer à la création d’emploi et assurer la stabilité des pays membre de l’UPM», avance Youssef Amrani, le nouveau secrétaire général de l’organisation basée à Barcelone. Une manière de stabiliser la région et de limiter «le printemps arabe» à une seule saison afin qu’il ne devienne pas «un défilement de saisons», comme l’a souligné le professeur Abdelaziz Lamghari.