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Grand Angle

Maroc : MUR-PJD, un divorce à double tranchant ?

Le Mouvement unicité et réforme (MUR) compte se détacher du volet politique pour se concentrer sur l’idéologie. Un divorce annoncé avec le PJD, commenté par les politologues Abdessamad Belkebir et Abderrahim Elaalam.

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Saâdeddine El Othmani, secrétaire général du PJD (d) en compagnie d'Abderrahim Chikhi, secrétaire général du MUR lors d'une rencontre partisane. / Ph. DR
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Le Mouvement unicité et réforme (MUR), bras idéologique du Parti de la justice et du développement (PJD), organisera à partir de ce vendredi son 6e congrès. Au menu de cette rencontre, l’élection d’un nouveau secrétariat général du MUR, mais surtout une «modification des statuts du mouvement», rapporte l’agence turque Anadulu, citée par Alyaoum 24.

Abderrahim Chikhi, à la tête du MUR, confie à l’agence de presse que «le MUR consacrera la différenciation entre ce qui est politique et ce qui est idéologique». Un «divorce» entre l'ossature idéologique du PJD et le parti de la Lampe qui ne sera pas sans répercussion sur les deux partis, nous affirme ce mercredi le politologue et professeur universitaire Abdessamad Belkebir.

Le PJD perdra son ossature idéologique

Pour lui, il s’agit d’un «pas positif et conforme à la voie empruntée par le mouvement islamiste, visant le respect du travail politique contemporain qui sépare, lui, au niveau de la société et de l’Etat, entre la politique et la religion». «Cette séparation a nécessité un temps politique, organisationnel et intellectuel et il faut savoir que plusieurs mesures ont été prises depuis la création du parti pour séparer les deux et minimiser la présence des mêmes membres dans les deux structures», nous rappelle-t-il.

«Cela ne peut être que bénéfique pour le parti et pour le mouvement mais il ne faut pas s’attendre à une rupture totale puisque les bases sont les mêmes, les buts à long terme sont partagés, bien que les moyens et l’organisation diffèrent. La séparation positive entre la politique et la religion ne peut être qu’une bonne chose, tout en maintenant le dialogue et en évitant que l’une contrôle l’autre.»

Abdessamad Belkebir

Le politologue et ancien parlementaire affirme que cette «séparation aura un impact négatif sur le PJD, du moins sur le plan organisationnel». «Mais à long terme, le parti laissera le MUR s’activer dans son domaine éducatif et idéologique alors que le mouvement laissera le parti se charger du domaine politique», poursuit-il.

Le MUR à la croisée des chemins ?

De son côté, le professeur de sciences politiques à l’Université Cadi Ayyad de Marrakech, Abderrahim Elaalam, préfère parler au conditionnel. «Je ne sais pas si le congrès du MUR validera ce pas ou s’il y aura une autre formule pour gérer la relation entre les deux parties», affirme-t-il.

«Il est donc préférable d’évoquer les deux scénarios : soit la situation reste comme elle est actuellement, soit la séparation aura lieu». Dans ce dernier scénario, Abderrahim Elaalam estime que la séparation est symptomatique d’un impact négatif du PJD sur le MUR.

«Certains membres du mouvement préfèrent la politique et s’engagent plus dans le parti, au moment où le MUR ne veut pas que son sort reste lié aux réalisations et aux échecs du PJD. Mais une chose est sûre, le spectre de la scission au sein du parti hante le mouvement qui ne veut pas que cela lui arrive aussi et donc qui anticipe.»

Abderrahim Elaalam

Pour le politologue, la séparation entre la politique et l’idéologie est «une option imposée au mouvement» d’Abderrahim Chikhi et non un choix. «Cela impactera aussi temporairement le parti en attendant de trouver les moyens pour survivre loin des renforts du MUR», enchaîne-t-il. 

Citant l’expérience tunisienne, Abderrahim Elaalam considère que l’option la plus adéquate aurait été «la dissolution du mouvement au lieu de le séparer du parti». «Plusieurs objectifs du MUR au départ ont été appropriés par l’Etat qui met en place des moyens dédiés à la religion, sachant même que plusieurs membres du mouvement sont au sein du ministère des Habbous et des affaires islamiques, les conseils supérieurs des oulémas… Donc le MUR n’a plus d’objectifs si ce n’est la politique», conclut-il.

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