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Grand Angle

Diaspo #48 : Fatiha Rouissem, le combat d’une vie pour intégrer l'immigration dans la société italienne

Fatiha Rouissem est une femme dotée d’une énergie débordante. Cette native de Casablanca se consacre depuis plusieurs années à une meilleure intégration des immigrés en Italie.

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Fatiha Rouissem est une femme qui a dédié sa vie à l'intégration des immigrés au sein de la société italienne. / Ph. DR
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Le moins que l’on puisse dire après quelques minutes de conversation avec Fatiha Rouissem, c’est qu’elle a une vie bien remplie, parle un français mâtiné d’un accent italien et se livre spontanément. Après 29 ans d’expatriation, cette Italienne d’origine marocaine s’est finalement stabilisée en tant que médiatrice linguistique et culturelle dans la province de Trévise en Italie.

Au tout début, Fatiha Rouissem a commencé en tant que professeure de français à El Brouj (à 72 km de Settat) pendant cinq ans. Puis, par amour, cette native de Casablanca, âgée de 27 ans à l'époque, décide de suivre son mari en Italie pour entamer une nouvelle vie. Depuis, sa vie prend différents tournants, tous caractérisés par un altruisme et une envie de donner le meilleur envers son prochain.

Ses premiers mois en Italie ont été un peu compliqués puisque Fatiha Rouissem ne connaissait pas du tout la langue, alors elle s'est forcée à apprendre par elle-même. «J’ai appris l’italien grâce à la télévision et à un dictionnaire que m’avait acheté mon mari», confie-t-elle à Yabiladi. Elle décide alors de commencer à travailler comme serveuse, une expérience qui l'aide davantage à apprendre l'italien et à s’intégrer.

Très sociable, extravertie et amoureuse de la gastronomie, l’Italo-marocaine décide alors d’ouvrir son propre restaurant en 1998, dans la ville de Vittorio Veneto (province de Trévise). «J’ai eu ce restaurant pendant six ans. Au fur et à mesure, je faisais de la médiation linguistique et culturelle. J’allais dans les écoles, je présentais le Maroc, ces changements, etc. Du coup, en 2003, j’ai eu beaucoup de choses à gérer et j’ai dû fermer mon restaurant. Je sentais que je n’avais plus de vie et que je ne vivais que pour mon restaurant», confie-t-elle.

Fatiha Rouissem, (à gauche) lors de la sixième édition du festival italo-marocain. / Ph. DRFatiha Rouissem (à gauche) lors de la sixième édition du festival italo-marocain. / Ph. DR

Présidente de l’association Mondo Insieme

A l’aise à l’oral, Fatiha Rouissem aime parler du Maroc, veut changer les préjugés qui existent sur le royaume et aider les immigrés marocains et d'autres nationalités à s’intégrer dans la société italienne. Dès qu’elle entend parler d’une formation de médiateur linguistique et culturel, elle fonce tête baissée. «J’ai toujours été sensible au fait d’aider autrui. J’allais dans les écoles à titre personnel avant même d’intégrer l’association Mondo Insieme (Le monde ensemble, ndlr). Plus le temps passait, plus je me rendais compte que certains immigrés ne comprenaient pas certaines lois. J’étais toujours présente pour leur expliquer les choses. Je me suis retrouvée dans ce monde sans l’avoir prévu», déclare la femme de 56 ans.

En 2008, elle prend les rênes de l’association et la préside pendant neuf ans. Entre-temps, elle gère un bureau d’information pour les immigrés dans la commune de Conegliano (province de Trévise) en collaboration avec les services sociaux, jusqu’en 2016. Depuis mai de la même année, la native de Casablanca fait partie du bureau exécutif et de la table ronde de l’immigration de la région de Vénétie en Italie.

Fatiha Rouissem, à gauche, en compagnie de l'ambassadeur du Maroc en Italie. / Ph. DRFatiha Rouissem, à gauche, en compagnie de l'ambassadeur du Maroc en Italie. / Ph. DR

Fatiha Rouissem est également vice-présidente du festival italo-marocain, qui en est à sa sixième édition cette année. «Nous organisons des conférences avec des professeurs d’université du Maroc et d’Italie. Nous programmons de la musique italienne et marocaine, des acteurs marocains viennent nous voir également», précise la vice-présidente de l’événement culturel. Le festival a même reçu une médaille du président de la République italienne, comme le confie fièrement Fatiha Rouissem.

Toutefois, le sujet qui pourrait la tenir en haleine pendant des heures et qui la fait vibrer, c’est son travail au sein de l’association. «Quand j’étais à El Brouj, en 1985, j’étais très jeune, j’ai appris à côtoyer les gens de la région. Beaucoup de Marocains immigrés en Italie viennent de cette région. Leur culture, je l’avais déjà assimilée et je parlais leur dialecte, ce qui a rendu mon travail plus simple», confie la médiatrice culturelle et linguistique.

Le rôle de Fatiha Rouissem est simple en apparence, celui de faire comprendre la culture des Marocains aux Italiens et faire comprendre aux immigrés les avantages de l’intégration au sein de la société italienne. Plus globalement, le rôle de l’association Mondo Insieme est d’accélérer l’intégration des immigrés.

«On exerce dans les hôpitaux, les écoles, les tribunaux, des écoles dédiés aux enfants en situation de handicap. On organise même des conférences pour les opérateurs et les docteurs, pour leur expliquer comment ça se passe au Maroc, comment on voit cet handicap, comment l’enfant handicapé est traité au Maroc... On vient du monde entier. A chaque fois qu’il y a quelque chose qui ne va pas et qu’ils veulent faire comprendre aux immigrés ce qui se passe, ils font appel à nous.»

Fatiha Rouissem

En un mot, Fatiha Rouissem se dit «fière» du travail qu’elle accomplit, même si «financièrement, ce n’est pas le top». Elle confie : «Je l’ai dans le sang, je le fais avec passion.»

La native de Casablanca n’oublie pas ses origines, elle reste attachée à sa «marocanité» qu’elle clame haut et fort. «Si je ne descends pas quatre, cinq fois par ans, ça ne me ressemble pas», ajoute-t-elle. Le mari de Fatiha Rouissem envisage de rentrer s’installer au Maroc, mais ce n’est pas la même chose pour la médiatrice culturelle et linguistique. «J’aimerais vivre entre les deux pays. J’ai passé plus d’années en Italie qu’au Maroc. Ici, je sens que je suis utile.»

«Avec mon expérience, j’ai appris à aimer et respecter tout le monde. J’espère un avenir radieux pour tout le monde, surtout les Marocains.» 

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