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Grand Angle

Maroc : Les registres de l’Etat civil s’ouvrent aux personnes non inscrites

Le gouvernement a annoncé hier l’inscription de plus de 23 000 personnes sur les registres de l’Etat civil. Une mesure vivement saluée par Aicha Chenna, qui souligne toutefois qu’un changement de mentalité doit accompagner l'évolution des lois.

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Le nombre de personnes non inscrites a atteint 83 682, dont 23 151 ont été inscrites. DR
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Bientôt la fin d’un calvaire pour les 83 682 personnes non inscrites à l’Etat civil ? Le gouvernement a annoncé hier l’inscription de plus de 23 000 personnes sur les registres de l’Etat civil, a indiqué Mustapha El Khalfi, ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement et la société civile et porte-parole du gouvernement, cité par l’agence MAP.

Le nombre de personnes non inscrites a atteint 83 682, dont 23 151 ont été inscrites, soit 28%, a précisé M. El Khalfi lors d’une conférence de presse à l’issue du Conseil de gouvernement. 39 481 dossiers sont en cours de traitement devant la justice, a-t-il ajouté.

«C’est une excellente chose, c’est un droit fondamental», réagit Aicha Chenna, présidente de l’association Solidarité féminine, qui lutte contre l’exclusion des mères célibataires, auprès de Yabiladi. «Quand vous possédez un acte de naissance, cela signifie que l’on vous reconnaît en tant que Marocain. Pour moi, ça va au-delà de ce qu’on peut imaginer. Ça va permettre aux enfants d’aller à l’école, puis plus tard d’étudier, d’avoir une carte nationale, d’ouvrir un compte bancaire. Cette action reconnaît leur existence. Elle respecte l’esprit de la Constitution de 2011 sur l’égalité des chances pour les enfants, quels que soient leur naissance», commente-t-elle. Aicha Chenna fait sans nul doute référence à l’article 35 de la loi fondamentale, qui stipule que «l’Etat veille à garantir l’égalité des chances pour tous et une protection spécifique pour les catégories sociales défavorisées». La militante associative s'interroge toutefois : 

«Comment ces droits vont-ils être appliqués? Quelles facilités vont-ils offrir aux mères? Jusqu’à quel degré cette reconnaissance va-t-elle se faire? Il y a encore tout un travail à réaliser en matière de sensibilisation de l’opinion publique, qui passe notamment par les médias. Les lois ne suffisent pas; il faut que les mentalités évoluent.»

Aicha Chenna.

Des parents qui connaissent parfois mal les lois

Les mentalités de l’opinion publique, oui, mais aussi celles des responsables politiques. En septembre 2017, Bouchra Ghiati, présidente de l’Insaf, une association qui vient en aide aux femmes célibataires, regrettait que le Maroc ait rejeté certaines des recommandations émises en mai 2017 par le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, lors de son Examen périodique universel, d’après le HuffPost.

Devant le conseil onusien, réuni à Genève du 11 au 29 septembre dernier pour sa 36e session, le royaume avait ainsi rejeté les recommandations visant à abolir la criminalisation des mères célibataires, à permettre une reconnaissance juridique complète des enfants nés hors mariage, à effectuer des tests ADN pour déterminer la paternité, à retirer toute référence dans les documents d’identité qui permettrait d’identifier les enfants nés hors mariage, et à abroger les dispositions juridiques discriminatoires établissant des différences entre les enfants nés hors mariage et ceux de parents mariés, soulignait l’association de défense des droits humains MRA Women (Mobilising for rights associates).

«Ce qui nous scandalise, c’est que le gouvernement reste campé sur ses positions, alors que l’enfant n’a pas à porter la responsabilité des conditions de sa conception», avait réagi Bouchra Ghiati.

La non consignation du mariage des parents, l’expiration du délai de déclaration de naissance ou la négligence découlant de l’ignorance de la loi par les parents sont souvent les principales causes de la non-inscription sur le registre d’état civil, a rappelé Mustapha El Khalfi.

Pour rappel, le 15 janvier dernier, le gouvernement avait lancé une campagne nationale pour l’inscription des enfants non enregistrés aux registres de l’état civil, sous le signe «L’inscription à l’état civil, un droit constitutionnel : je suis inscrit donc j’existe».

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