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Grand Angle

Maroc : Les langues se délient suite à l’affaire de pédophilie à Taourirt

Après le scandale du viol répété d’un enfant de sept ans par son oncle soixantenaire, un sit-in a été organisé cet après-midi dans la province de Taourirt. Les associations soutenant la victime présumée ont été reçues par la Gendarmerie : le prévenu serait impliqué dans d’autres affaires similaires.

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Sit-in ce jeudi à Taourirt / Ph. Rachida Moujniba
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Moins d’un mois après les révélations publiques sur le viol d’un mineur, dans un village de la province de Taourirt, les langues ont commencé à se délier. Désormais, d’autres parents affirment que leurs enfants ont été victimes de la même personne, un soixantenaire, numéro 2 de la mosquée la plus fréquentée par les riverains.

Dans ce sens, une marche a été organisée ce jeudi, commençant aux portes du tribunal de première instance de Taourirt pour finir devant la Gendarmerie royale. Sur place, des membres d’associations s’étant portées parties civiles ont été reçues. Rachida Moujniba est l’une des membres, active au sein de l’Association Al Amal, en charge du Centre de protection sociale des femmes et des enfants victimes de violences à Taourirt.

En attendant la première audience de l’affaire en cours, elle nous confie que cette mobilisation a permis de témoigner la solidarité avec la famille du garçon, mais aussi de libérer la parole sur d’autres affaires similaires, impliquant vraisemblablement le même agresseur présumé.

«La meilleure chose que nous avons pu obtenir des sit-in et des manifestations est cette sortie du silence de deux personnes, qui sont désormais décidées à porter plainte. Il s’agit d’une fille de 14 ans et de sa mère divorcée, se disant toutes deux victimes de la même personne. Elles sont soutenues par plusieurs associations et la Gendarmerie leur a conseillé d’enregistrer leurs plaintes, afin qu’elles soient ajoutées au dossier du prévenu.»

Ainsi, Rachida Moujniba évoque «un fléau dans la région», faisant que la loi du silence règne encore sur ces questions jugées taboues. Pour changer cette situation, elle lance un appel.

«Les parents n’en parlent pas beaucoup, peut-être par peur ou par pudeur. Cela nous a donné l’idée d’organiser des campagnes de sensibilisation dans ce sens, afin d’expliquer à ces parents pourquoi il est si important d’en parler, de faire parler leurs enfants s’ils subissent des sévices sexuels et d’enregistrer leurs plaintes auprès des autorités compétentes.»

Quiproquo avec la gendarmerie

Cependant et jusqu’à ces derniers jours, un quiproquo a semblé perdurer entre associations et Gendarmerie. Selon Moujniba, «les gendarmes pensaient que les femmes s’étaient rassemblées pour demander à ce que l’affaire soit tue et pardonner à l’homme incriminé, puisque c’est une personne âgée». Elle raconte avoir dû expliquer aux autorités que ces rassemblement exprimaient un soutien à l’enfant et à sa mère, qui «subit des pressions sociales de toutes parts pour abandonner la plainte».

De son côté, la Gendarmerie indique qu’un test ADN est en cours à Casablanca. Sauf qu’entre temps, les pièces analysées (des sous-vêtements), avaient été nettoyées par la mère avant qu’elles ne soient demandées pour l’expertise. Pour les autorités, l’instruction est bel et bien en cours et le fait de garder en liberté le prévenu ne le blanchit pas pour autant des faits qui lui sont reprochés. «Mais cet homme doit être éloigné, car il représente désormais un danger pour plusieurs personnes», rétorque notre interlocutrice.

Infections suite au viol présumé ?

Par ailleurs, l’enfant souffre de nombreuses infections qu’il aurait contractées du prévenu. Il n’a pas de fièvre, mais son état nécessite des soins médicaux réguliers. Rachida Moujniba nous explique un autre aspect de son cas :

«Jour après jour, son état psychologique se détériore. Il n’a pas encore commencé ses séances thérapeutiques et semble montrer les signes d’une grande dissociation. Il se montre distant de sa mère, qui doit être prise en charge pour un soutien moral urgent.»

Pour Rachida Moujniba, «dans le cadre de l’instruction, il n’existe pas encore de garanties que demain ou après-demain, l’homme ne pourrait pas sévir ailleurs», surtout qu’il fait désormais l’objet de deux plaintes de plus. «Faut-il encore attendre de prendre le prévenu en flagrant délit pour le placer en détention ?», s’interroge-t-elle.

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