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Grand Angle

Diaspo #33 : Khalid Sossey-Alaoui, couper le mal à la racine

Installé aux Etats-Unis, ce cancérologue marocain a cloné un gène sur lequel il travaille depuis dix-sept ans pour mettre au point un traitement contre le cancer du sein.

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Khalid Sossey-Alaoui, cancérologue, travaille à la mise au point d'un traitement contre le cancer du sein. DR
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Khalid Sossey-Alaoui est un homme qui ne fait guère parler de lui dans son pays. Ce cancérologue originaire de Casablanca est pourtant à la tête d’une équipe de chercheurs à la Cleveland Clinic (Etat de l’Ohio, nord-est) qui travaille sur un programme scientifique sur le cancer du sein.

«Je travaille surtout dans le domaine de la recherche. Je suis en train de chercher un traitement pour le cancer du sein triple négatif. Nous avons déjà une patente provisoire pour un traitement pour ce type de cancer», nous explique Khalid Sossey-Alaoui depuis Cleveland, où il réside.

Le cancer du sein «triple négatif» est ainsi nommé car il lui manque des œstrogènes, de la progestérone et des récepteurs HER2 (du nom de la protéine), indique la Société canadienne du cancer. Il représente seulement 10 à 20% de tous les cancers du sein invasifs, mais il est pourtant responsable d’une forte proportion de décès, car il est très virulent et plus susceptible de s’être déjà propagé dans d'autres parties du corps au moment du diagnostic. Ce type de cancer du sein n’est actuellement traité que par chimiothérapie et radiothérapie, car il ne réagit pas aux médicaments ciblés qui visent les œstrogènes, la progestérone et les récepteurs HER2, poursuit la Société canadienne du cancer.

Génétique des plantes et gène cloné

«Pour l’heure, il n’y a pas de traitement pour ce type de cancer. La chimiothérapie est la seule manière de le traiter. Il revient généralement au bout de deux, trois ans. C’est un cancer très agressif qui provoque une multiplication de métastases», confirme Khalid Sossey-Alaoui. Le travail du cancérologue, entamé en 2002, s’articule justement autour de cette problématique : pourquoi le cancer du sein «triple négatif» est-il si agressif ?

Bien avant la recherche sur les métastases, Khalid Sossey-Alaoui s’est attelé à un tout autre sujet : la génétique des plantes. Né à Casablanca en 1967 de parents originaires de Fès, il poursuit ses études à la faculté des sciences de l’université Hassan II, où il décroche une licence en biologie générale. «J’ai eu de la chance : j’ai fait partie des trois étudiants de ma promo qui ont pu obtenir une bourse pour partir en France», confie-t-il.

En 1990, il s’installe à Dijon où il entame une thèse sur la génétique des pétunias, puis enchaîne sur un doctorat consacré à «la diversité du tournesol». En 1995, il rentre au Maroc mais n’y reste pas longtemps, lui qui s’imagine déjà vaquer à ses projets outre-Atlantique. Quatre mois après son retour, il s’envole en direction de Clemson, en Caroline du Sud (sud-est). Quatre ans plus tard, c’est à Cleveland qu’il pose ses valises, «là où [ma] carrière a réellement commencé». Il y reste huit mois, «le temps de cloner le gène WAVE3, sur lequel je travaille depuis 2000 pour mettre au point un traitement contre le cancer du sein».

Khalid Sossey Alaoui / Ph. FacebookKhalid Sossey Alaoui / Ph. Facebook

Attaquer la tumeur sans abîmer les tissus

Khalid Sossey-Alaoui emménage ensuite à Buffalo, dans l’Etat de New York (nord-est). Pendant huit ans, il arpente les couloirs du Roswell Park Cancer Institute. L’établissement, fondé en 1898, a été le premier dédié au traitement et à la recherche contre le cancer aux États-Unis. Il est le seul établissement de New York à détenir le titre de «centre de traitement complet du cancer».

Le Roswell Park Cancer Institute développement également de nouveaux médicaments et offre un traitement avancé pour toutes les formes de cancer chez l’adulte et l’enfant. «On utilise les nanoparticules, des particules microscopiques qu’on charge en traitements spécifiques. Elles peuvent être dirigées vers la tumeur pour l’attaquer, mais sans abîmer les tissus. On essaie d’attaquer seulement la tumeur sans toucher les autres organes aux alentours», renchérit le spécialiste.

D’après les statistiques aux Etats-Unis, une femme sur huit dans le monde est susceptible de développer un cancer du sein au cours de sa vie, ajoute-t-il.

«La sensibilisation et le dépistage sont très importants. Lorsque la tumeur commence à grandir, elle envoie des cellules cancéreuses dans le corps, dont certaines peuvent se maintenir dans un état latent. Si certains cancers sont détectés à temps, ils sont traitables à 99%.»

Khalid Sossey-Alaoui se dit particulièrement intéressé par le travail mené par la Fondation Lalla Salma de lutte contre le cancer. «J’aimerais rentrer au Maroc et faire profiter de mon expérience», dit-il. Il devrait rentrer dans un premier temps cet été «pour les vacances et la famille» avant, peut-être, de rentrer définitivement au bercail.

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