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Grand Angle  

Emission spéciale MRE : La diaspora marocaine réagit aux élections en Italie

Au lendemain des législatives en Italie, le 4 mars, la coalition de droite et d’extrême droite a marqué son coup. Ce choc électoral ouvre les pistes à de nombreux scénarios quant à la formation du gouvernement, laissant dans le doute les ressortissants étrangers (notamment Marocains) établis dans le pays.

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Un des bureaux de vote ouverts en Italie, lors du scrutin du 4 mars 2018 / Ph. Andreas Solaro (AFP)
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Depuis le scrutin législatif de dimanche dernier, l’Italie est entrée dans une phase d’incertitude politique. Une période qui pourrait durer plusieurs mois. En effet, les résultats de ce scrutin dénotent d’un rejet populaire des partis traditionnels, d’une exaspération face à la situation économique, ainsi que des tensions vis-à-vis des questions de la migration et de l’Union européenne.

Ainsi a été intoduit ce sujet, lors de l’émission spéciale MRE, co-animée mercredi par Mohamed Ezzouak, directeur de la publication de yabiladi.com, et Fathia Elaouni, rédactrice en chef de Radio 2M.

Dans une première lecture des résultats, Mohamed Ezzouak fait remarquer d’emblée que la carte de l’Italie est divisée en deux : Dans le nord, qui vote traditionnellement à droite, la Ligue mène le bal. Le sud, quant à lui, est trusté par Le Mouvement cinq étoiles, «un OVNI politique» encore difficile à définir politiquement, de part ses alliances qui n’obéissent pas à des critères idéologiques clairs. Une situation qui pourrait mettre à mal la politique migratoire du pays, comme le rappelle le co-animateur :

«En réalité, les grands vainqueurs sont des mouvements anti-système et les mouvements populistes eurosceptiques. L’heure est grave pour les populations migrantes qui risqueraient de perdre en droits et en garanties.»

Natif de Bologne, où il effectue actuellement ses études, Mohamed Amine, invité de l’émission, explique que la Ligue du nord a évolué pour devenir un parti national anti-migrants (en situation irrégulière) et résolument eurosceptique. Il indique que même des Marocains ont soutenu la droite italienne au sein du parlement, en tant que députés, à l’image de Souad Sbaï qui a évolué au sein du parti Forza Italia, avant de rejoindre justement la Ligue du nord.

Une troisième période d’incertitude politique

Politologue et éditorialiste, Abderrahim Hafidi met en contexte cette situation :

«Durant les 50 dernières années, l’Italie a connu trois moments d’évolution politique. Jusqu’aux années 1980, le bipartisme est bien installé. Dans les années 1990, cette cartographie a laissé place à un doute, donnant naissance à des partis comme Forza Italia. Aujourd’hui, nous vivons une troisième rupture. Nous ne savons pas exactement ce qu’elle donnera. Nous sommes dans une Europe où le malaise généralisé se traduit par un choix des peuples, optant pour la plus grande offre politique capable de répondre non pas à leurs demandes mais à leurs déceptions.»

De ce fait, y aurait-il une grande inquiétude, du côté de la diaspora marocaine ? «Pas tant que ça», croit comprendre Fathia El Aouni, qui constate une certaine confiance chez les Marocains résidents en Italie.

Globalement, «les Marocains accélèrent leur intégration, pensent à voir ailleurs, ou se font petits en se disant que l’heure n’est pas à la revendication des droits. C’est une période inquiétante», estime pour sa part Mohamed Ezzouak.

Quant à Mohamed Amine, il indique que la diaspora marocaine installée en Italie est assez bien intégrée pour ne pas s’inquiéter de cette situation, d’autant plus les migrants sont aidés lorsqu’ils quittent leur pays en fuyant la guerre ou la famine. «Sauf que parmi ces migrants, beaucoup veulent arriver en Italie pour pouvoir rejoindre un autre pays, mais les accords de Dublin ont mis un frein législatif à cette possibilité, en leur imposant de s’installer dans le premier pays qui les accueille», ajoute-t-il.

Abderrahim Hafidi, lui, relève que la sédentarisation des communauté maghrébines en Europe n’obéit pas aux mêmes critères :

«L’Italie, jusqu’à preuve du contraire, est un pays démocratique ayant signé les traités internationaux et européens quant à la protection des droits des migrants. Je ne pense pas que les migrations installées durablement puissent pâtir de la situation actuelle, mais le risque est de voir apparaître une fracture au sein de ces migrations. D’un côté, les migrants installés durablement et intégrés à la société et d’un autre, les migrants en situation irrégulière.»

Une ouverture à toutes les possibilités

Mohamed Ezzouak se penche sur la nature du Mouvement cinq étoiles et son éventuelle influence sur cette politique migratoire. Résolument contre l’establishment européen, cette formation politique «n’est pas encore définitivement installée dans le paysage», rappelle Hafidi. Il souligne qu’elle ne prétend pas incarner «la relève de la gauche», contrairement à des formations comme la France insoumise, Podemos en Espagne ou encore Syriza en Grèce.

«Il ne s’agit pas d’une reproduction de ces modèles-là, mais d’une variante adaptée au climat que vit l’Italie», ajoute encore le politologue, qui espère que la politique italienne en matière de migration restera au-dessus des calculs partisans.

«La coalition qui constituera le gouvernement et le parlement italien n’est pas encore claire. C’est une problématique qui se pose dans nombre de pays de l’Europe et surtout de l’Union européenne», indique Mohamed Amine, précisant de ce fait que la préoccupation actuelle des Italiens reste de savoir qui sont les partis qui formeront ces alliances stratégiques.

Pour écouter le replay de l’émission, cliquez ici :

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com