C’est l’histoire d’un article contenant des révélations exclusives sur de nouvelles poursuites ciblant le chanteur Saad Lamjarred, qui a laissé une ardoise évaluée à 200 000 € par la société organisatrice du concert annulé. L’information a été publiée samedi en exclusivité sur Yabiladi. Il n’aura fallu que quelques heures pour la voir reprise sans aucune mention de la source par plusieurs sites arabophones (on a malheureusement l’habitude) et surtout par les sites des télévisions telle que TéléMaroc, dirigée par Rachid Niny, ainsi que la non moins respectable chaîne paneuropéenne Euronews.
Interpelés poliment sur Twitter, ces médias n’ont pas daigné répondre, préférant ignorer le plagiat éhonté. Ce comportement est symptomatique du mal qui est entrain de condamner une presse en ligne balbutiante au Maroc. Baignant dans le marigot des sites à scandales, il est déjà difficile de résister, lorsqu’on tente d’informer de manière sérieuse et professionnelle. Plagiés par nos confrères de la presse digitale, pillés par la presse papier qui se meurt, voilà donc que des chaînes télévisées s’y mettent.
Télé-château & Roulotte-News
Le long et fastidieux travail d’enquête est ainsi spolié en 10 minutes par ceux qui, à coup de millions, ont construit leurs châteaux médiatiques. Que diraient ces seigneurs de TéléMaroc et d’Euronews si le contenu vidéo de leur chaîne était repris par tous les sites qui auront préalablement collé leur logo au dessus du nom de la chaîne ? «Au voleur !», s’écrieraient-ils en chœur.
Tout ceci m’interroge grandement sur l’utilité d’investir dans un contenu informatif, lorsqu’il est si simple de faire comme les autres. Ce nivellement par le bas du contenu des supports et cet appauvrissement de l’information condamnent petits comme grands médias. Pire encore, les deux chaines reprennent une information traitant de nouvelles poursuites judiciaires contre Saad Lamjarred, sans citer de source et sans avoir vérifié ces faits. En clair, ils n’ont aucune preuve de ce qu’ils racontent dans leurs articles et n’ont même pas pris la peine d’appeler la gérante de la société Cairo By Night, qui est la partie plaignante. C’est dire la rigueur et le professionnalisme de ces télévisions.
Le grand public peut ne voir dans le plagiat un «simple» problème de propriété intellectuelle entre journalistes, ou pire une affaire d’égo. Pourtant, les enjeux en matière d’information sont bien plus grands et impactent la crédibilité de ce qu’ils lisent, même si cela vient de grands châteaux médiatiques.
Ce billet a valeur de trace pour rendre hommage aux romanichels venus squatter la pelouse des seigneurs.