Menu

Interview

Abderrahim El Allam : «L’avenir politique de Benkirane est tributaire de la force du PJD» [Interview]

L’élection hier de Saâdedine El Othmani à la tête du Parti de la justice et du développement (PJD) aura mis fin à des mois de conflits entre partisans et opposants à un troisième mandat d’Abdelilah Benkirane. Professeur de Sciences politiques à l’Université Cadi Ayyad de Marrakech, Abderrahim El Allam revient pour Yabiladi sur cet imbroglio intra-partisan. Entretien.

Publié
Abderrahim El Allam / DR.
Temps de lecture: 2'

Quelle est selon vous l’avenir du PJD au lendemain de l’élection de Saâdeddine El Othmani à la tête du secrétariat général ?

D’une manière globale, le rôle joué par les syndicalistes et les partis politiques au Maroc est très faible. Cela affecte une scène politique déjà dominée par les technocrates. Par ailleurs, les partis politiques ne respectent pas leurs engagements. L’opposition avance s’opposer aux politiques du roi, le gouvernement prétend être celui du roi. De ce fait, les rivalités se bornent à une course pour être proche ou loin du palais, ce qui est très négatif pour la scène politique.

Toutes ces raisons font que seulement 1% des jeunes Marocains adhère à un parti. Pour le peuple, l’importance de s’impliquer en politique est passée au second plan depuis longtemps.

De plus, la popularité que le PJD a réussi à obtenir au cours des élections de 2011 et de 2016 commence à s'effriter pour plusieurs raisons. Notamment parce que le parti s’est avéré incapable de former un gouvernement et de soutenir son secrétaire général dans cette tâche. Cependant, le PJD reste l’un des rares partis politiques marocains à maintenir une démocratie interne et une rotation du pouvoir.

Qu’en est-il de l’avenir de Benkirane ?

Le PJD n’est pas affilié à Benkirane en tant que personne. Le leadership est collectif. En d’autres termes, comme Benkirane a réussi à obtenir autant de popularité, d’autres peuvent le faire aussi. La position actuelle du secrétaire général du parti va certainement aider El Othmani à gagner davantage en popularité. Benkirane avait ses propres partisans et sympathisants, il pourrait y en avoir d’autres qui donneront du crédit à El Othmani. Dans tous les cas, un autre conseil national du PJD est prévu pour 2021 et Benkirane pourra renouveler sa candidature au poste. Il est libre d’être le politicien qu’il a toujours été.

Le chapitre de Benkirane ne sera fermé que si le parti parvient à apprendre de ses erreurs, en améliorant son statut sur la scène politique. L’avenir politique est tributaire de la force du PJD. Si ce dernier se renforce, l’ère Benkirane sera certainement révolue. Autrement, le parti pourrait s’effriter et beaucoup réclameraient alors le retour de l’ex-secrétaire général pour fédérer les membres. Je pense que le PJD a survécu à sa récente crise interne, sans perdre la foi en la démocratie. En effet, la démocratie interne peut prolonger la vie des partis politiques, tout comme elle maintient la continuité des régimes et des nations.

Certains politiques considèrent qu’El Othmani a écarter les soutiens de Benkirane du secrétariat général. Ne pensez-vous pas qu'il tente justement de fermer le chapitre Benkirane ?

Avoir des membres qui soutiennent Saâdeddine El Othmani au sein du secrétariat général du parti est une chose normale. L’actuel Chef du gouvernement a le droit d’avoir une équipe qui l’appuie, car il doit aussi affronter l’opposition au sein du parlement. L’avenir du PJD dépend de sa capacité à rester fort ou à se relâcher et à céder à ses différends.

Vous considérez donc que l’unité du parti est restée intacte ?

Il est impossible que PJD se fractionne. Bien que le clan Benkirane ait été écarté du secrétariat général du PJD, il est toujours présent au parlement.

Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com