Menu

Grand Angle

La veuve belgo-marocaine de l’assassin du commandant Massoud déchue de sa nationalité belge

Après un feuilleton judiciaire de 14 ans concernant plusieurs affaires de terrorisme, la cour d’appel de Bruxelles a tranché : Malika El Aroud, connue pour être la veuve de l’assassin du commandant Massoud, a été déchue jeudi dernier de sa nationalité belge pour manquement «à ses devoirs de citoyenne».

Publié
La veuve belgo-marocaine de l’assassin du commandant Massoud a été déchue de sa nationalité belge. DR
Temps de lecture: 3'

En Belgique, la déchéance de nationalité est une mesure peu courante : en 2001, quatre personnes avaient été concernées. Malika El Aroud, veuve belgo-marocaine de deux djihadistes, dont l’un des tueurs du combattant afghan Ahmed Shah Massoud, vient s’ajouter à la liste.

La procédure de déchéance de nationalité à son encontre a été enclenchée en 2014, alors que la prévenue était dans le viseur des services de renseignement belges pour ses activités djihadistes depuis 2002.

La cour d’appel de Bruxelles a finalement rendu son verdict jeudi 30 novembre, décidant de déchoir Malika El Aroud de sa nationalité belge pour avoir «manqué à ses devoirs de citoyenne». La veuve a toujours refusé de revoir ses positions salafistes ; c’est ce qui a convaincu la cour bruxelloise de recourir à cette solution ultime.

Une salafiste qui gravit les échelons

Fille d’un ouvrier de voirie, Malika El Aroud connaît une jeunesse chaotique. Sans aucun diplôme, elle se tourne rapidement vers l’islamisme. Elle est influencée par un prédicateur très actif, Cheikh Bassam, qui tenait le Centre islamique de Bruxelles au quartier Molenbeek. Ce dernier lui fait rencontrer Dahmane Abd El-Sattar, un étudiant en communication à l’Université catholique de Louvain, qui deviendra plus tard l’un des assassins d’Ahmed Chah Massoud.

C’est d’ailleurs avec ce conjoint tunisien que la salafiste, 58 ans aujourd’hui, décide de rejoindre l’Afghanistan en janvier 2001. Là-bas, elle disait être engagée dans des «projets humanitaires» et enseigner «l’islam véritable». Elle mène une vie de notable au sein des talibans non-afghans. Le meurtre du commandant Massoud par son mari, lors d’un attentat-suicide le 9 septembre 2001, lui confère un statut prestigieux dans les milieux salafistes : veuve de martyr.

Lors d’un premier procès débuté en 2002, Malika El Aroud revendique l’opération d’Abd El-Sattar contre le Lion du Pandjchir. Elle est acquittée en 2003 et devient une figure de proue du djihadisme en Belgique. Un an plus tard, elle publie son ouvrage «Soldats de lumière» (Editions La Lanterne) avec l’appui des milieux islamistes de Bruxelles. Elle y présente son ancien époux comme «un homme réfléchi, prêt à sacrifier sa vie pour sauver des innocents opprimés».

Après son retour en Belgique, blanchie à l’issue de ce procès, Malika El Aroud épouse Moez Garsallaoui, un autre djihadiste tunisien affilié au groupe Al-Qaïda. Tous deux sont condamnés à six mois de prison avec sursis en 2007 en Suisse pour avoir lancé un site faisant l’apologie du djihad.

«L’icône des djihadistes»

Revenu en Belgique, le couple créé cette fois-ci une filière d’envoi de combattants en Afghanistan et au Waziristant, un camp d’entraînement d’Al-Qaïda au Pakistan. Sept personnes sont ainsi enrôlées et Moez Garsallaoui est abattu sur place par un drone.

Malika El Aroud est arrêtée en 2008 et condamnée à huit ans de prison ferme. Pour le parquet fédéral belge, qui la considère comme «l’icône des djihadistes», elle était l’instigatrice de ce réseau ayant notamment recruté Mohamed Merah, auteur des tueries de Toulouse et Montauban en mars 2012. Elle collectait également des fonds pour financer ses activités. Défiant la cour pendant ce procès, elle ira jusqu'à s’excuser «auprès des porcs pour les avoir comparés à des soldats américains». Elle était libre depuis décembre 2016.

La prévenue comparaissait en même temps que le djihadiste tunisien Bilal Soughir, lui aussi déchu de sa nationalité belge. En 2005, il avait recruté Muriel Degauque, première kamikaze d’origine européenne à avoir perpétré un attentat-suicide en Irak, commandité par un groupe islamiste. Bilal Soughir avait également fait partie de la filière salafiste d’El Aroud et de Moez Garsallaoui.

La déchéance de nationalité est habituellement suivie par une procédure d’expulsion, mais la date du retour des accusés dans leurs pays d’origine n’est pas encore connue.

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com