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Grand Angle

Décès d'un ressortissant marocain : L'État français condamné par la Cour européenne des droits de l'Homme

Huit ans après le décès d'un Marocain pendant son interpellation en 2009, la Cour européenne des droits de l'homme a condamné ce jeudi la France pour «les traitements inhumains et dégradants» infligés à ce ressortissant. Détails.

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Mohamed Boukrourou était âgé de 41 ans et père d'une petite fille. / DR
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La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a condamné l'État français, jeudi, pour «traitements inhumains et dégradants» infligés par quatre policiers à un ressortissant marocain, et à verser de 4 000 à 6 000 euros pour dommage moral à six membres de la famille de la victime, annonce Le Parisien.

Mohamed Boukrourou était un ressortissant marocain de 41 ans arrêté le 12 novembre 2009 à Valentigney, dans le Doubs, par quatre policiers, suite à une simple altercation avec son pharmacien qui lui aurait fourni la mauvaise marque de médicaments. Les fonctionnaires s’étaient mis sur les épaules, les mollets et les fesses de ce père d’une petite fille, qu’ils avaient menotté après l’avoir attaché à l'intérieur du fourgon, où il est décédé d’une défaillance cardiaque.

L’autopsie pratiquée sur le corps du défunt avait révélé un arrêt cardiaque. Atteint de troubles psychiatriques, son état de stress et d’agitation aurait favorisé son décès, malgré l’intervention des sapeurs-pompiers et d’un médecin urgentiste, prévenus rapidement par les policiers. La conclusion des expertises médico-légales ont rapidement conduit le parquet de Montbéliard à ouvrir une information judiciaire contre X pour «homicide involontaire».

En 2012, les quatre fonctionnaires avaient été mis en examen pour homicide involontaire sur décision du juge d'instruction du tribunal de Montbéliard. Un an plus tard, en 2013, les quatre policiers avaient bénéficié d’un non-lieu de la part de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Besançon. La famille Boukrourou avait fait appel à ce jugement.

De violents coups à répétition

Les juges de la CEDH ont considéré que les quatre fonctionnaires, ignorant les antécédents cardiaques de la victime «ne pouvaient pas envisager l'existence du danger encouru» par celle-ci. De plus, «la demande rapide d'assistance des policiers (...) permet d’exclure tout manquement quant à leur obligation de protéger la vie de Mohamed Boukrourou», ont-ils détaillé.

Néanmoins, «deux coups de poings» portés au plexus de Mohamed Boukrourou pendant son évacuation de la pharmacie et la neutralisation «sur le ventre» et «avec trois policiers debout et pesant de tout leur poids sur les différentes parties de son corps» ont permis «d'amplifier l'agitation et la résistance de Mohamed Boukrourou», a expliqué la CEDH. En conséquence, «ces gestes, violents, répétés et inefficaces (...) sont constitutifs d'une atteinte à la dignité humaine».

Ainsi, la CEDH a condamné l'État français à verser de 4 000 à 6 000 euros pour dommage moral aux requérants, soit six membres de la famille de Mohamed Boukrourou.

Pour rappel, Amnesty International, qui suit l’affaire de près, avait confié à Yabiladi en 2012, depuis Londres, que tout comme la famille de la victime, l’ONG aurait souhaité «une qualification qui reflète mieux ce qui s’est passé». «Parler d’homicide involontaire, n’est pas correct», avait déclaré l’ONG.

Dans un rapport de décembre 2011, la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS) avait estimé que la police avait fait un «usage disproportionné de la force». Les policiers ont réagi «de façon stéréotypée, sans adapter leur comportement (...) alors qu'ils savaient que [Mohamed Boukrourou] était suivi pour des troubles psychiatriques». Ils «ont fait un recours ininterrompu à la force» qui était «contre-productif et dangereux pour l'intégrité physique» de l'interpellé.

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