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Edito : New-York, Paris, Marrakech, [Yabiladi Mag n°8]

Les dernières semaines, nous avons assisté à un coup de billard à 3 bandes inattendu. Dominique Strauss-Khan, patron du FMI, est inculpé, à New York, pour agression sexuelle et viol sur une femme de chambre à l’hôtel Sofitel. Si ce n’est l’enfance de DSK passée à Agadir et sa propriété à Marrakech, le Maroc n’est pas concerné par ce scandale politico-sexuel aussi médiatisé que le précédent Clinton.

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Tout ce que compte la France de leaders d’opinion, d’intellectuels cathodiques ou de politiques en tout genre est monté au créneau pour défendre DSK, ou au moins ménager l’honneur de la République dans le monde. La polémique sur le silence des journalistes sur les frasques des politiques a créé une ambiance délétère.

 Ainsi, les vieux dossiers sur DSK sont ressortis mais aussi ceux touchant d’autres personnalités politiques comme Georges Tron. L’occasion pour Luc Ferry de mettre les pieds dans la tanjia. Citant une affaire vieille de quelques années, il rappelle qu’un ancien ministre avait été «poissé à Marrakech à l’occasion d’une partouze avec des enfants».

Pis, le Premier ministre de l’époque aurait été au courant ainsi que le consul et l’ambassadeur de France au Maroc. Ils auraient réglé l’affaire avec les autorités judiciaires locales... Elle est jolie l’égalité devant la justice.

A ce titre, la justice américaine donne, actuellement, une belle leçon à la France. Des associations de protection de l’enfance et de lutte contre la pédophilie ont porté plainte au Maroc et en France pour faire la lumière sur cette affaire. Les insinuations de Luc Ferry sont vraisemblables et n’étonnent pas les journalistes marocains ou français. Qui ne se souvient

pas de l’affaire du directeur d’un grand théâtre parisien qui, après avoir été pris en flagrant délit pour pédophilie et détention de stupéfiants, est retourné libre en France ? Les amitiés politiques de cet homme «de culture» ont probablement joué en sa faveur.

 Au-delà des critiques légitimes à l’égard du néo-colonialisme français qui marcherait sur la dignité des Marocains et de la justice du royaume chérifien, il convient de s’attarder sur la situation au Maroc. L’incurie de notre système judiciaire est un secret de polichinelle : passe-droits, corruption, immiscions politiques. Nul besoin d’être Français pour bénéficier de la mansuétude d’un juge. Les élites politiques et économiques au Maroc bénéficient des mêmes faveurs ou priviléges que les notables français. Détournement de fonds, enrichissement personnel, délit, crime comme la pédophilie ne doivent pas faire exception au Maroc. Pourtant, les seuls à passer par la case prison sont des citoyens lambda qui n’ont pas les moyens d’acheter le juge ou de faire intervenir quelqu’un de haut placé.

 Le dernier rapport de l’OCDE ne s’y est pas trompé en pointant la réforme de la justice comme principal défi pour que le Maroc puisse attirer plus d’investissements étrangers. L’OCDE adopte un angle d’analyse purement économique, mais il est évident que le rapport met le doigt sur le talon d’Achille du royaume. La réforme de la constitution laisse entrevoir une lueur d’espoir pour un nouvel élan démocratique au Maroc, mais sans une justice indépendante et intègre nous continuerons à subir les mêmes humiliations.

Cet édito a été précédemment publié dans Yabiladi Mag n°8

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