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Grand Angle

Les Belgo-marocains bientôt interdits de logements sociaux parce que propriétaires au Maroc ?

Les Belgo-marocains ne pourront plus aspirer à l'octroi d'un logement social, et ce depuis que le ministre belge des Finances, Johan Van Overtveldt a annoncé une nouvelle mesure pour traquer les bénéficiaires de logements sociaux mais propriétaires d’un bien immobilier, en particulier les Marocains. Détails.

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Photo d'illustration. / DR
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Le ministre belge des Finances, Johan Van Overtveldt souhaite restreindre l’octroi des logements sociaux aux Belgo-marocains possédant une propriété au Maroc. Ces résidents ne pourront désormais plus aspirer à un logement social en Belgique, indique la RTBF.

En effet, 60% des Marocains résident en Belgique sont propriétaires d’une maison au Maroc, d’après les conclusions de la Fondation Roi Baudouin. Toutefois, ces 60% de Marocains ne bénéficient pas tous d’un logement social. D’après le média belge, «nul ne peut prétendre à un logement social s’il est propriétaire d’un bien immobilier».

Le fisc belge peut consulter les données d’un autre Etat mais «uniquement» à des fins fiscales. Il n’est pas question de conférer les informations à d’autres services, poursuit la RTBF.

Le ministre Van Overtveldt souhaite adapter la Convention de collaboration avec les pays permettant en conséquence l’utilisation des données à des fins autres que fiscales si le pays concerné donne son feu vert. Le ministre chercherait donc à convaincre le Maroc de transmettre ces renseignements aux sociétés de logements sociaux.

Une stigmatisation de la communauté marocaine

Interrogé sur ce que dit le règlement général dans ce genre de situation par la RTBF, Hicham Imane, président de la Sambrienne, société de logement social à Charleroi, déclare : «Le règlement est très ambigu, on dit qu'on ne peut pas être propriétaire. On ne parle pas de l'Etat belge et on ne parle pas de l'Etat étranger. Evidemment, vous trouverez toujours des juristes qui vous donneront une version contradictoire mais aujourd'hui, globalement, nous imposons aux futurs locataires de ne pas être propriétaires. Donc forcément, la règle elle est là pour tout le monde, pas que pour les Marocains, les Italiens, les Belges ! Elle est pour quiconque demande un logement public en Wallonie.»

Hicham Imane serait favorable à ce que tous les résidents soient identifiés et non seulement les Belgo-Marocains : «Je suis demandeur pour tout le monde car tout le monde doit être dans la légalité ! Stigmatiser la communauté marocaine, personnellement, sur le fond, je trouve ça scandaleux.» Dans le cas où la personne serait dans l'illégalité, Hicham Imane ajoute : «Ca va être traduit par des directives et nous aurons des ordres par rapport aux sociétés tutelles.»

«Mais je tiens à rappeler un détail qu'on a oublié que je rappellerais bien au cabinet du ministre, c'est qu'en Wallonie, si vous êtes propriétaire partiellement, vous pouvez quand même être locataire dans un logement public.»

Un besoin d’authentification de l’information

Joint par téléphone, Ahmed Laaouej, chef du groupe parlementaire PS à la Chambre des représentants et vice-président de la Fédération bruxelloise du Parti socialiste, parle d’une incompréhension. «Le fait que cette mesure concerne uniquement les Belgo-marocains, c’est complètement ahurissant», s’étonne-t-il.

«Cela nous étonne, nous interpelle, nous échappe, surtout compte tenu du personnage qu’est le ministre Johan Van Overtveldt», nous confie-t-il. «Nous allons saisir le ministre au Parlement dans deux semaines pour l’interroger. Nous avons besoin d’une clarification pour authentifier l’information», enchaîne-t-il.

«Il est très important de connaître les accords qui ont été conclus entre la Belgique et le Maroc. Ce sont également des choses à clarifier avec le ministre», dit-il, déplorant le manque d’informations dont disposent les parlementaires concernant les centaines de conventions conclues entre les deux royaumes.

Les données fiscales comme porte d'entrée

Fouad Ahidar, politicien et député au Parlement de la région Bruxelles-Capitale, également joint par téléphone, confie à Yabiladi que ces échanges se font déjà à l’échelle européenne. Cependant, le Maroc participe à ces échanges uniquement à visée fiscale et rien d’autre. «Le ministre demande aujourd’hui à tous les pays avec qui il a signé des conventions s’il est en mesure d’utiliser les informations collectées à des fins autre que fiscales.»

Si le Royaume répond par l’affirmative, tous les Marocains bénéficiant de logements sociaux et possédant un bien au Maroc seraient dénués de leurs habitations en Belgique. «Ce qui serait très grave car aujourd’hui beaucoup de gens l’ont fait à leur insu, déclarant posséder un héritage, une maison ou un terrain», regrette-t-il. Pour Fouad Ahidar, la manière dont ces choses ont été présentées est très péjorative, très ciblée contre les Marocains.

«Quand on prend une mesure, on la prend contre tous et non seulement contre une tranche de la population.»

«Il faudra donner un délai raisonnable à ces gens ; soit le temps de quitter leurs logements sociaux, soit le temps de revendre leurs biens se trouvant au Maroc car l’octroi d’un logement social ne dépend pas de combien vous avez sur votre compte en banque, mais de combien vous touchez mensuellement», affirme-t-il.

Et d’ajouter : «Pour ce gouvernement de droite, s’il peut emmerder les plus pauvres, il le fait parce que la priorité d’un gouvernement, c’est d’aller chercher les 225 milliards d’euros cachés dans les paradis fiscaux. Apparemment, il estime que la priorité est d’attaquer les petites familles qui ont un petit logement qui leur sert de petite maison de vacances quand ils rendent visite à leurs familles. Ces familles-là n’ont jamais eu les moyens de s’acheter un logement en Belgique. Si elles les avaient, elles l’auraient fait depuis longtemps», conclut le député.

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