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Grand Angle

Avec l'annulation de deux événements phares, la culture fuit-elle Marrakech ?

Alors que deux évènements culturels phares de la ville ocre ont été annulés cette année, plusieurs acteurs du monde culturel s’inquiètent du recul des arts au Maroc, véritable levier d’intégration social.

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Photo d'illustration. / Ph. Brooklyn Street Art
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La cité ocre en panne culturelle ? Après l’annulation de l’édition 2017 du Festival international du film de Marrakech, c’est au tour de la Biennale de Marrakech d’être reportée, a révélé hier le Monde.

Faute d’argent, l’évènement créé en 2005 par la Britannique Vanessa Branson (sœur de Richard Branson, patron du groupe Virgin) n’aura effectivement pas lieu cette année. «C’est bel et bien un problème d’argent», répète Amine Kabbaj, président exécutif de la Biennale.

Spéculations

«La Biennale de 2016 n’a pas coûté plus cher que celle de 2014, mais Vanessa Branson, qui a financé pratiquement les cinq premières, s’est retirée de l’organisation et du financement. Ce financement, qui était providentiel du fait de l’argent personnel de Vanessa, n’est aujourd’hui plus là. On a quand même réussi à lever auprès des sponsors et des mécènes presque 9 millions de dirhams. Il en manque 2,5 millions pour boucler le budget», déplore Amine Kabbaj.

Le président exécutif de l’évènement spécule d’ailleurs sur les prochaines éditions. «On veut faire une mise au point, un bilan d’étape. Qu’est-ce qu’une Biennale ? Pourquoi celle-ci existe-t-elle ? Quel est son rôle ? Ce sont des questions que l’on doit se poser à un moment donné dans le parcours d’un évènement. On organisera de toute façon des rencontres et des conférences pour expliquer la situation, voir si l’on peut repartir du bon pied, ou pas, sur l’édition 2020», avance-t-il.

«La culture au cœur du développement»

Neila Tazi, productrice du Festival Gnaoua et Musiques du Monde d’Essaouira, figure incontournable du monde culturel et entrepreneurial au Maroc, regrette l’annulation d’un «rendez-vous crédible» : «Il est regrettable d’apprendre l’annulation d’un évènement, surtout après presque 10 ans de travail et d’efforts pour installer un rendez-vous crédible, qui sert l’image d’une ville et d’un secteur qui a beaucoup à apporter au Maroc.» Elle plaide pour «une mobilisation de l’ensemble des acteurs», estimant que «la culture est au cœur du développement».

«Il faut chercher à comprendre les raisons profondes de cette situation et espérer pouvoir donner un nouveau souffle à cet évènement, rapidement, pour ne pas perdre ce qui a été construit. Certaines remises en question permettent parfois de déboucher sur de nouvelles perspectives. Le secteur culturel nécessite la mobilisation de l’ensemble des acteurs et doit être porté avec force, vision et conviction car la culture est au cœur du développement.»

«Tous les acteurs culturels ont un rôle à jouer dans la Biennale, que ce soit le secteur privé ou public, car il s’agit avant tout d’un espace de rencontre. Vous savez, je dis toujours que la Biennale, ce n’est pas une exposition en soi ; c’est un évènement culturel et éducatif qui permet de faire rencontrer le public et les médiateurs culturels, les commissaires et les artistes», abonde Amine Kabbaj.

Au Maroc, la culture n’est manifestement pas la «priorité de ce gouvernement», comme l’a confié Amine Kabbaj au Monde. Il confirme : «Il y a une incompréhension ; on ne donne pas d’importance au fait culturel. Les Romains ont vécu dans notre région pendant deux siècles, qui le sait ? La culture, c’est un levier social, éducatif et économique. C’est aussi un secteur qui a un nombre incalculable d’emplois à créer dont nous avons besoin.»

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