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En 1957, la route Al Wahda réunissait Ben Barka, Hassan II et le général Oufkir

Sans aucun doute, la route Al Wahda est l'un des souvenirs encore existant au Maroc des actions de Mehdi Ben Barka. Un projet qui a réussi à réunir sur le même lieu les trois protagonistes de l’affaire Ben Barka. Seul Ahmed Dlimi avait manqué ce rendez-vous.

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Feu le roi Mohammed V en compagnie du prince héritier Moulay Hassan et Mehdi Ben Barka, inaugurant les travaux de la route Al Wahda, le 5 juillet 1957. / Ph. DR
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Le Maroc a commémoré, la semaine dernière, le 60e anniversaire de la construction de la route Al Wahda (unité). Le 5 juillet 1957, Mohammed V donnait le coup d’envoi des travaux du tronçon reliant Taounate à Ketama sur une longueur de 80 km.

Mehdi Ben Barka était l’artisan d’un projet en vogue dans les pays socialistes et communistes (la Chine de Mao Tsé-toung en est d’ailleurs le parfait exemple) où se mêlaient travail et endoctrinement politique. C’est lui qui avait en effet convaincu, en juin 1957, feu le roi Mohammed V du bien-fondé de réaliser une route unissant le Maroc sous protectorat français avec celui sous protectorat espagnol.

En 1957, et à l’exception de l’unanimité autour de la personne de Mohammed V, les divergences étaient criantes entre les forces politiques et sécuritaires qui se disputaient le pouvoir. Le pays avait grandement besoin d’unité et de stabilité pour faire face à des tentatives visant à semer la division.

11 000 volontaires

L’organisation de cette vaste opération a révélé les talents de Ben Barka. Sans être ministre du gouvernement M’Barek El Bekkaï II, il a réussi à mobiliser 11 000 volontaires durant les trois mois du chantier. Des jeunes issus de toutes les régions du Maroc fraichement indépendant qui affluaient par convois, à raison de 4 000 bénévoles par mois, dans des campements installés à cet effet.

Réunir ce nombre n’était pas une si mince affaire. Sauf qu’en janvier 1957, il avait mis en place l’Union nationale des étudiants du Maroc (UNEM). Une organisation qui se situait à la gauche du Parti de l’Istiqlal et bien entendu placée sous la tutelle directe de Ben Barka.

Fort de cet atout, le leader à l’époque du PI a pu garantir la réussite de son entreprise avant même que le premier coup de pioche n’ait été donné. Le gouvernement a apporté les fonds nécessaires pour le transport, l’hébergement et l’alimentation des 11 000 volontaires.

Plaque commémorative de la route Al Wahda reliant Taounate à Ketama. / Ph. DR Plaque commémorative de la route Al Wahda reliant Taounate à Ketama. / Ph. DR

Des calculs politiques

La route Al Wahda avait révélé le degré de popularité de Ben Barka notamment auprès des jeunes. Au-delà de l’enthousiasme qu’avait suscité ce projet, sa mise en œuvre obéissait à un agenda politique bien précis.

L’Istiqlal, parti hégémonique au royaume en 1957, cherchait à asseoir son autorité sur la région du Rif opposée à son emprise sur les rouages de l’Etat. Le souvenir de l’assassinat (27 juin 1956) de Mohamed Ben Abdallah Ben Taïeb Ben El Habib, alias Abbas Messaâdi, commandant de l’Armée de libération nationale au Rif, était encore frais dans les mémoires des habitants locaux. Des voix se sont élevés au Rif et ailleurs accusant Ben Barka et Mohamed Basri, alias Fiquih, d'avoir donné des ordres pour éliminer Messaadi.

La route d’Al Wahda était le point de chute des représentants des forces politiques. Le prince héritier Moulay Hassan avait pris part aux travauxaux côtés des volontaires choisis par des commissions fidèles à Ben Barka. Le jour du coup d’envoi, il y était sur place pour accueillir Mohammed V arrivé sur le lieu à bord d’un véhicule militaire. Ben Barka était en retrait. Le général Oufkir y était également présent.

Le projet Al Wahda a ainsi réuni les trois protagonistes de ce qui allait être appelé, le 29 octobre 1965, l’affaire Mehdi Ben Barka.

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