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Interview

Hassan Bennajeh sur le Hirak : «L’Etat ne fait que couvrir les braises avec des cendres»

Retrait des forces de l’ordre du centre d’Al Hoceima, rassemblement des femmes marocaines à Casablanca en solidarité avec le mouvement de protestation ou encore l’annonce de la FGD de rompre toute relation avec la Jamaâ. Hassan Bennajeh, membre du secrétariat général du cercle politique d’Al Adl Wal Ihsane, commente pour Yabiladi les derniers développements du Hirak du Rif.

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Hassan Bennajeh, membre du secrétariat général du cercle politique d’Al Adl Wal Ihsane. / Ph. DR
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Les forces de l’ordre se sont récemment retirées du centre-ville de la ville d'Al Hoceima et d’Imzouren et la tension a baissé d’un cran. Comment analysez-vous ce retrait ?

Malheureusement, ce qui se passe actuellement est marqué par des contradictions et une grande confusion illustrant le manque de sérieux de la part de l’Etat pour traiter ce dossier. Parce qu’en même temps qu’on aborde le retour au calme et le retrait des forces de l’ordre, la répression se poursuit. Preuve en est ce qui arrive à Tamassint et certaines zones où dès qu’il y a manifestation, il y a intervention policière.

L’approche sécuritaire, l’une des causes principales de la cause, a échoué. Il fallait l'abandonner depuis longtemps. Nous espérions que le dossier soit pris avec beaucoup de sérieux. Déployer un arsenal des forces de l’ordre n’est pas la solution mais une partie du problème.

Mais il ne faut pas s’arrêter à cette question. Le principal dossier actuellement est celui de détenus. Jusqu’à aujourd’hui, les verdicts continuent d’être prononcés et les peines sont lourdes. Ce sont des signes négatifs qui contredisent ce qui est paru dans la presse. Nous aimerions, comme tout le monde, que cela soit vrai, mais malheureusement ça ne l'est pas et ça ne rend la situation que plus compliquée.

A mon avis, il y a trois piliers qu’il faut prioriser pour parvenir à une solution : Non à l’approche sécuritaire, la libération des détenus et ensuite répondre aux causes sous-jacentes qui ont conduit à la sortie des gens dans la rue. Ce qui se passe actuellement, c’est qu’on cherche des boucs-émissaires pour les accuser d’être derrière la crise. Alors que si l’Etat avait résolu les vrais problèmes, les choses se seraient calmées.

L'approche adoptée par l’Etat ne résoudra pas le problème. Il est possible de manœuvrer ou de contourner et répéter ce qui s’est passé en 2011. Les choses pourront même se calmer temporairement, mais si le vrai problème n’est pas abordé et résolu, nous ne ferons que couvrir les braises avec des cendres.

Comptez-vous participer à la marche féminine en solidarité avec le Hirak qui aura lieu demain à Casablanca ?

Bien sûr. Les femmes d’Al Adl Wal Ihsane y prendront part, même si nous n’avons pas émis de communiqué officiel sur la participation parce qu’il n’y a pas d’organisations ayant appelé à cette manifestation. L’appel a été en effet lancé par un groupe de femmes de différentes sensibilités et horizons, dont les femmes de la Jamâa.

Cela veut-il dire que la Jamâa continuera à participer à des rassemblements de soutien et de solidarité avec le Hirak ?

Nous sommes une partie de la société et cela veut dire que ce qui se passe nous concerne. S’il s’agit de manifestations, de solidarité et contre la répression, Al Adl Wal Ihsane sera partie prenante. Nous appelons toujours à la résolution des problèmes. S’il n’y en a pas, il n’y aurait certainement pas de manifestations.

Ceux chargés de la gestion des affaires doivent comprendre que les choses ont radicalement changé. Tout le monde est unanime à affirmer que les périodes pré-2011 et post-2011 sont très différentes. La barrière de la peur a été brisée et les gens appellent et réclament leurs droits. La dignité se place à la tête des revendications, bien avant le pain. Le recours aux manifestations est alors devenu une nécessité parce qu’il a été prouvé que ces formes de protestation permettent de réaliser des résultats face à des institutions élues qui ne jouent aucun rôle. Le problème est que l’Etat contribue à envenimer la situation. Ce n’est pas une honte de reconnaître ses erreurs et résoudre les problèmes des citoyens. Au contraire, c’est une qualité et non un défaut.

La Fédération de la gauche démocratique a récemment annoncé qu’elle arrêtera toute collaboration avec vote mouvement. Que pensez-vous de cette position ?

Nous ne sommes pas prêts à nous attarder sur des choses marginales. L’attention doit être focalisée sur le Hirak et les questions primordiales de la société. Il suffit donc que certains intellectuels de ces partis refusent cette position. Nous ne sommes pas préoccupés par cette question.

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