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Grand Angle

Journée mondiale de la liberté de la presse : Le Maroc à la traîne

Les journalistes du monde entier se mobilisent ce mardi 3 mars 2011, à l'occasion de la Journée mondiale de  la liberté de la presse. Les manifestations prévues en cette journée mettent l’accent sur les enjeux des nouveaux médias. Au Maroc, la journée intervient alors que l’affaire Rachid Niny pousse (encore) à s’interroger sur l’état de la liberté de la presse dans le Royaume.

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La Journée mondiale de la liberté de la presse marquait cette année le 20e anniversaire de la Déclaration de Windhoek. Le 3 mai 1991, des journalistes réunis dans la capitale namibienne, à l’occasion d’une conférence, ont rappelé la nécessité, mais surtout l’importance d’une presse libre dans tout système se voulant démocratique. Cette journée sera proclamée deux ans plus tard, comme la Journée mondiale de la liberté de la presse, par l’Assemblée Générale de l’ONU.

20 ans après la conférence de Windhoek, et avec l’émergence des nouveaux médias et autres médias alternatifs, l’heure est à l’examen des difficultés auxquelles ces derniers sont confrontés. D’où d’ailleurs le thème choisi par l’Unesco pour la journée du 3 mai 2011 : «Les médias du XXIème siècle : Nouvelles frontières». Dans le message qu’il a adressé à cette occasion, Ban Ki Moon, Secrétaire Général des Nations Unies, a rappelé que «Notre époque présente un grand paradoxe. D’un côté, les nouvelles technologies et les nouveaux médias nous offrent des possibilités d’expression sans précédents (…) De l’autre côté, de nouvelles menaces se dessinent. Conjuguées, dans un contexte de changements rapides, avec des formes de restriction plus anciennes, elles représentent de formidables défis pour la liberté d’expression».

L’Unesco a annoncé sur son site plusieurs manifestations à travers le monde, pour célébrer cette journée. Les plus importantes devaient avoir lieu à Washington. La capitale américaine abrite à cet effet une conférence sur «le rôle croissant d’internet, l’émergence de nouveaux médias et l’explosion des réseaux sociaux». Autant d’outils qui ont récemment montré leur pouvoir de mobilisation, notamment lors des soulèvements populaires en Tunisie et en Egypte.

De son côté, l’Association mondiale des journaux et des éditeurs de médias d’information (WAN-IFRA) a choisi de célébrer cette journée sous le signe de l’importance de la liberté d’expression dans le processus démocratique, conformément à l’esprit de Windhoek. La WAN-IFRA a ainsi lancé une vaste campagne de sensibilisation sous le thème : «Le silence tue la démocratie… Mais une presse libre prend la parole.»

Parmi les actions entreprises, l’association a invité les journaux du monde entier à relever «Le défi de la feuille blanche». Le principe : «laisser une partie de leur une en blanc pour montrer ce qui manquerait si la presse n’était pas libre.» Sur son site, la WAN-IFRA rappelle par ailleurs que «La liberté de la presse est au cœur même du droit à la liberté d’expression», se référant à l’article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’Homme. Pour l’association, «le droit à la liberté d’expression sert de base aux autres droits fondamentaux».

Quid du Maroc ?

L’image du Maroc en termes de liberté de la presse n’est guère reluisante. Plusieurs professionnels du secteur sont unanimes sur ce triste constat. Ce sentiment s’est d’ailleurs renforcé avec l’affaire touchant Rachid Niny, directeur de la publication du quotidien arabophone Al Massae, arrêté le 28 avril dernier pour «atteinte à des corps constitués» et «atteintes à des personnalités publiques».

Khalid Tritki, président du Cercle des journalistes indépendants (CJI), contacté par nos soins, estime que le directeur de la publication d’Al Massae est une victime de «l’application du droit médiocre». M. Tritki a même ajouté cette affaire allait à contre-courant du vent de changement dans lequel veut s’inscrire le Maroc.

Pour lui, la liberté de la presse au Maroc pâtit de trois principales lacunes. Il y a d’abord le cadre juridique défaillant, qui selon le président du CJI, «ligote» la presse. Un code de la presse jugé trop restrictif, en est une parfaite illustration.

Le champ de la liberté de la presse au Maroc serait également miné par l’environnement malsain dans lequel évoluent les supports. Ces derniers sont affaiblis par des effectifs de peu consistants, mais également par le peu de moyens consacrés aux abonnements aux agences de presses, ou encore dans les déplacements. Les journalistes n’ont en somme pas les moyens de faire correctement leur travail. Ils sont aujourd’hui réduits au rôle de «fonctionnaires d’agence», selon M. Tritki.

Le troisième handicap en matière la liberté de la presse serait la pression exercée par les annonceurs. Dans un secteur où les publications sont dépendantes des recettes publicitaires, il devient difficile de rester critique face à une information concernant directement un annonceur.  «Tout ceci limite considérablement le champ de l’investigation», conclue Khalid Tritki. La solution résiderait selon lui, dans la réforme constitutionnelle dont l’ensemble du peuple attend plus de libertés octroyées.

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