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Grand Angle

Le paradoxe des échanges commerciaux entre le Maroc et l'Afrique subsaharienne

La Banque africaine de développement explique que le Maroc et les pays subsahariens commercent plus difficilement entre eux qu'avec les pays européens et asiatiques, entre autres. Détails.

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La Banque africaine de développement explique que le Maroc et les pays subsahariens commercent plus difficile entre eux qu'avec les pays européens et asiatiques, entre autres. / Ph. AFP
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C’est un paradoxe de taille que soulève la Banque africaine de développement (BAD) dans sa dernière publication intitulée «Analyse de la politique commerciale du Maroc - Impact de la politique tarifaire du Maroc sur sa position de hub à destination du reste de l’Afrique».

Si les échanges commerciaux entre le Royaume et le reste du continent ne cessent d’aller crescendo ces dernières années (+ 20%, soit plus de 1,5 milliard de dollars), l’écart entre le taux moyen des droits de douane que le Royaume pratique avec les pays européens et la moyenne des droits de douane appliqués aux pays africains s’élève à quelque 17 points de pourcentage. Les pays africains, quant à eux, appliquent à leurs importations marocaines des tarifs douaniers supérieurs de 3 ou 4 points en moyenne aux tarifs pratiqués pour leurs importations d’Europe ou des États-Unis.

 «Il y a une logique à comprendre : le Maroc déploie des droits de douane plus élevés avec les pays avec lesquels il n’a pas d’accord de libre-échange. Il applique ainsi les tarifs de droit commun. Pour les PMA (pays les moins avancés, ndlr) africains, le Maroc avait décrété une exonération, un accès libre aux marchés pour ces pays là. A ma connaissance, c’est le seul régime de faveur qu’il exerce», explique l’économiste Najib Akesbi, contacté par Yabiladi.

L’adhésion à la CÉDÉAO, une solution ?

Tant le Maroc de son côté, que de nombreux autres pays africains du leur, ont cependant beaucoup renégocié leurs droits de douane avec des pays et les blocs régionaux… d’Europe, d’Asie et d’Amérique. Sauf que cette stratégie a abouti à ce paradoxe : il leur est devenu plus aisé de commercer avec l’Europe, l’Asie ou les Etats-Unis qu’avec leurs propres voisins et pairs continentaux. Najib Akesbi ne voit pour l’heure aucune contradiction : «Ce n’est pas contradictoire, ça le serait si après quatre ou cinq ans il ne se passait rien sur le front du libre-échange.»

Réduire les droits de douane marocains appliqués aux produits importés d’Afrique subsaharienne aiderait à stimuler les exportations des pays de la région vers le Maroc. Selon les projections, baisser de moitié ces tarifs douaniers entrainerait une hausse de 20 % des importations en provenance d’Afrique subsaharienne.

L’adhésion à la CÉDÉAO (Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest) pourrait-elle être un outil pour faciliter les échanges commerciaux ? «En soi, bien sûr, à partir du moment où elle se traduit par un accès libre, une réduction conséquente des droits de douane. Mais la question est d’abord institutionnelle : géographiquement, le Maroc ne fait pas partie de l’Afrique de l’Ouest. De plus, il est difficile d’être sur deux espaces en même temps», estime Najib Akesbi. Pourtant la Mauritanie a fait partie de l'Union du Maghreb Arabe (UMA) en même temps que la CEDEAO.

Mais ce dernier de poursuivre son argumentaire : «L’union douanière est une étape où on ajoute à la libéralisation des échanges une protection commune, des tarifs douaniers communs à la zone. Or on ne peut pas appartenir à la fois à une zone de protection commune et à une autre zone où on a instauré le libre-échange. De même, ça n’échappe à personne que la CÉDÉAO projette une monnaie unique. Le Maroc est-il en situation de renoncer ou, au contraire, est-il prêt à faire le saut d’une monnaie autre que la sienne ? La question est très complexe.» 

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