Menu

Grand Angle

CIA : Déclassification prudente des documents sur l'affaire Ben Barka

En juin 2007, la CIA déclassifiait une série de documents secrets. Cependant, les câbles se rapportant à l’affaire Mehdi Ben Barka n'ont pas été divulgués. Dix ans plus tard, l’agence américaine lève le voile sur certains textes concernant l’opposant marocain. Une opération savamment calculée qui obéit à la raison d’Etat.

Publié
Mehdi Ben Barka, organisateur de la Tricontinentale. / DR
Temps de lecture: 2'

En juin 2007, la CIA déclassifiait un dossier sur ses opérations menées durant les années 50 et 60. Un trésor pour les chercheurs baptisé «Les Bijoux de la famille». Ces documents dévoilaient des projets d’assassinat de Fidel Castro ou de l’autre grand leader africain, Patrice Lumumba, très bref Premier ministre de la République démocratique du Congo (juin-septembre 1960). En revanche, sur l’assassinat de Mehdi Ben Barka, pas la moindre information n’a été révélée au grand public. Pourtant, les Américains suivaient de très près les activités de l’opposant de Hassan II et organisateur de la Conférence tricontinentale.

Dix ans après cette première opération, la CIA lève la confidentialité sur 930 000 notes de ses agents. Cette fois, l’agence américaine a intégré une dizaine de documents sur l’affaire Ben Barka, consultables sur son site. Cette ouverture reste toutefois prudente : toutes les notes publiées sont des copies d’articles de presse. Par exemple, une dépêche de l'Associated Press datant de septembre 1966 évoque l’arrivée à Paris de la veuve de Ben Barka. On y trouve aussi des comptes-rendus du procès des assassins réalisés par le New York Daily Service et le Washington Post.

Semblant de révélation de la CIA

Cependant, aucune des notes rédigées par les agents de la CIA installés en France ou ailleurs n'a fait l'objet d'une déclassification dans cette affaire. Il en est de même pour les diplomates américains qui auraient pu informer Washington des déplacements du leader de la gauche marocaine. La raison d’Etat continue ainsi d’imposer sa loi.

Au milieu des années 60, les Etats-Unis suivaient pourtant de très près les activités de Ben Barka en sa qualité de président du comité préparatoire de la conférence de la Tricontinentale qui s’est tenue à La Havane en janvier 1966. Un ambitieux projet visant à réunir dans le même cadre les mouvements révolutionnaires de l’Afrique, de l’Asie et de l’Amérique du Sud. Troublante coïncidence, les porteurs de ce rêve ont été soit tués (Ben Barka en octobre 1965 et Che Guevara en octobre 1967), soit écartés du pouvoir comme ce fut le cas pour Ahmed Ben Bella en juin 1965 à la suite d'un coup d'Etat.

La Tricontinentale est l’autre dimension de l’engagement politique de Ben Barka à l’origine de l’intérêt particulier des services de renseignement des Etats-Unis, d’Israël et de la France. D’ailleurs, un mois avant son assassinat à Paris, Mehdi Ben Barka se trouvait à Cuba pour des entretiens avec Fidel Castro, comme l'a rapporté Maurice Buttin dans son livre «Ben Barka, Hassan II, De Gaulle : ce que je sais d’eux» (édition Karthala, 2010). Il est évident que cette réunion a fait l'objet d'un câble des agents de la CIA ou du Mossad.

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com