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Grand Angle

Indice de perception de la corruption : Le Maroc ne bouge pas d’un iota

La corruption gangrène la région nord-africaine et moyen-orientale, alerte Transparency International. Les résultats déjà médiocres du Maroc n’ont quasiment pas évolué entre 2012 et 2016.

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«Malgré les changements politiques qui ont secoué la région arabe il ya six ans, l'espoir pour les pays arabes de lutter contre la corruption et de mettre fin à l'impunité n'a pas encore progressé.» / Ph. Transparency International
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L’équation n’a rien de très surprenant : corruption systémique + inégalité sociale = montée du populisme. Le calcul est signé Transparency International, l’ONG d’origine allemande qui, dans l’édition 2016 de son indice de perception de la corruption, fait le parallèle entre «la désillusion populaire vis-à-vis du monde politique» et «le nombre croissant de politiciens populistes dans de nombreux pays».

Au total, 69% des 176 pays figurant dans ce rapport enregistrent une note inférieure à 50, sur une échelle allant de 0 (où le pays est perçu comme très corrompu) à 100 (où le pays est perçu comme très peu corrompu), note l’organisation. «Cela montre combien la corruption est importante et omniprésente dans le secteur public à travers le monde. Cette année, les pays ayant perdu des places dans le classement de l’indice sont plus nombreux que ceux en ayant gagné, ce qui démontre la nécessité d’une action urgente», font encore remarquer les auteurs de l’étude.

Ainsi, le Danemark arrache la tête du classement avec un score de 90/100, suivi de la Nouvelle-Zélande (90 pts) et la Finlande (89 pts). Classée 176e, la Somalie ferme la marche (10 pts), précédée du Soudan du Sud (11 pts) et de la Corée du Nord (12 pts).

«Une plaie qui touche tous les secteurs»

Comme la Colombie, l’Indonésie et le Liberia, le Maroc occupe la 90e place, obtenant 37 points sur 100. Un résultat qui n’a quasiment pas évolué au cours des quatre dernières années : le royaume avait récolté 36 points en 2015 (88e sur 174 pays l'an dernier), 39 en 2014 et 37 en 2013 et 2012.

«Le Maroc n’avance pas en matière de lutte contre la corruption. C’est une plaie qui touche tous les secteurs, en particulier les tribunaux, les administrations et même l’emploi public. Par exemple, un étudiant qui souhaite s’inscrire en Master doit donner des pots-de-vin pour être accepté. Ce phénomène ne cesse d’augmenter. Le seul secteur à avoir connu une progression est celui de la sûreté nationale, qui instaure de plus en plus de règles pour davantage de transparence», souligne Fatimatou Zaama, membre du bureau exécutif de l’Instance nationale de protection des deniers publics, contactée par Yabiladi ce mercredi.

Elle évoque aussi le nouveau rôle de l’Instance nationale de probité, de la prévention et de la lutte contre la corruption, laquelle «ne parvient pas encore à remplir son objectif central depuis l’élargissement de ses missions et de ses prérogatives en 2015», suite à la loi n°113-12 publiée en août 2015 au Bulletin officiel.

«En tant qu’association, nous avons traité plusieurs dossiers de corruption qui ont été envoyés aux tribunaux, mais la justice n’a pas encore délibéré», conclut Fatimatou Zaama.

Des facteurs qui favorisent la corruption à l’échelle régionale

Le bilan pour la région MENA (Middle East and North Africa) est loin d’être encourageant. «Malgré les changements politiques qui ont secoué la région arabe il y a six ans, l'espoir pour les pays arabes de lutter contre la corruption et de mettre fin à l'impunité n'a pas encore progressé. Au contraire, la majorité des pays arabes n'ont pas répondu à la volonté du peuple de construire des systèmes démocratiques permettant une plus grande transparence et responsabilité», s’inquiète Transparency International.

L'échec de la lutte contre la corruption explique la forte baisse de la plupart des pays arabes dans l'indice de perception de la corruption 2016. 90% d’entre eux sont en dessous de 50, soit une note défaillante. Les Emirats arabes unis (24ème/66 pts) et le Qatar (31ème/61 pts) ont réussi à rester au-dessus de la moyenne, malgré leurs scores en baisse, relève Kindar Hattar, coordinatrice de l’ONG pour la région MENA.

De plus, cinq des dix pays les plus corrompus du monde sont issus de la région : l’Irak (166ème/17 pts), la Libye (170ème/14 pts), le Soudan (170ème/14 pts), le Yémen (170ème/14 pts) et la Syrie (173ème/13 pts). Des pays en proie à une profonde instabilité politique, à la guerre, aux conflits internes et au terrorisme. Autant de facteurs qui alimentent la corruption, notamment politique.

Seule la Tunisie (75e/41 pts) fait figure de bonne élève, compte tenu des lois que le pays du Jasmin a récemment adoptées : la loi sur l'accès à l'information, «l'une des […] plus progressistes de la région» et l'adoption d'une stratégie nationale de lutte contre la corruption, entre autres.

Pour enrayer ce fléau, Transparency International suggère de veiller «à ce que des systèmes efficaces et transparents de responsabilisation soient mis en place». L’organisation préconise également de respecter l’indépendance de la magistrature ainsi que les organes de contrôle. «Tout cela ne peut être réalisé sans la volonté politique réelle et sérieuse des gouvernements de donner suite à leurs engagements», conclut-elle, sans surprise. 

Article modifié le 2017/01/27 à 00h37

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