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Interview

Familles et amis des victimes de Gdim Izik : « Nous exigeons que justice soit faite et nous restons contre la peine de mort »

A quelques jours de la tenue du procès devant une juridiction civile des personnes arrêtées au lendemain du démantèlement du camp de Gdim Izik, les familles des victimes ont annoncé la naissance de l'association de coordination des familles et amis des victimes de Gdim Izik. Pour clarifier les conditions de la création de cette ONG, Mohamed Atertour, son président, revient sur sa naissance et ses objectifs. Interview.

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La mère d'un membre de la Gendarmerie royale tué dans le démantèlement du camp de Gdim Izik. /Ibergag
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Votre association vient de voir le jour. Quels en sont les objectifs ?

L’idée ne vient pas de naître puisqu’il y avait une coordination mise en place depuis le début du procès des accusés devant un tribunal militaire. Notre objectif est de se constituer en tant que partie civile dans le nouveau procès. Pour cela, nous devions s’organiser en association, puisque la coordination avait des tâches et des prérogatives limitées. Elle n’avait pour ambition que d’informer sur cette cause et de faire face à ceux qui tentent de criminaliser les victimes et faire passer les criminels pour des victimes.

Maintenant que nous nous sommes constitués en association, nous sommes entrés dans une nouvelle phase. Nous nous sommes donc en mesure d’être une partie civile lors du premier procès qui se tiendra à 26 de ce mois de décembre. Il faut aussi souligner que ce droit nous avait été refusé lors du procès devant le tribunal militaire.

L’annonce de la création de l'association a coïncidé avec la Journée internationale des droits de l'Homme. Cela a-t-il une signification particulière ?

Nous avons profité de cette journée pour préciser que nous sommes les vraies victimes. Nous avons voulu exprimer notre idée selon laquelle le droit le plus sacré est le droit à la vie. Un droit qui a été confisqué à nos enfants, avec une manière brutale, sauvage et inhumaine. J’imagine que vous avez vu les photos et les vidéos qui montrent comment leurs corps ont été mutilés et on urinait même dessus. Ce que nous avions vu était très douloureux et il n'y a pas de religions ou de lois qui autorisent ou qui ignorent ces scènes.

Qui sont les membres de votre association et existent-il d’autres associations ou partis politiques qui vous soutiennent ?

Les membres de notre association sont les familles et les amis qui nous soutiennent depuis les premiers jours de cette tragédie et aussi lors du procès militaire. Ce que je voudrais souligner c’est le fait que notre association est ouverte à tous ceux qui croient dans les questions relatives aux droits de l'Homme. Nous ne voulons pas toutefois jouer le rôle des organisations de défense des droits de l’Homme, puisque notre rôle sera limité à ce dossier uniquement.

Notre association n'a reçu le soutien d'aucun parti politique. Il y a ceux ayant annoncé qu’ils nous soutiennent, mais seulement à titre personnel. Quant aux associations de droits de l'Homme, il y a ceux qui ont choisi de nous épauler, comme l'Organisation marocaine des droits de l'Homme, la Ligue marocaine des droits de l'Homme et l’Institution du Médiateur. Quant à l'Association marocaine des droits de l'Homme, elle a choisi depuis les premiers jours de présenter des avocats pour défendre les accusés. Ils ont donc choisi l'autre camp.

Quel est votre position quant à ce nouveau procès devant une juridiction civile ?

En tant que militant associatif, je suis déjà passé par des arrestations et des jugements. J’ai donc annoncé pour la première fois ma satisfaction vis-à-vis de la justice marocaine, après la fin du procès devant le tribunal militaire, puisque ce procès était juste. Les accusés ont eu le temps de se défendre, alors que nous, nous avions été privés de notre droit de s’exprimer et exprimer notre peine. Malgré cela, j’affirme que la justice était à la hauteur. Le jugement prononcé a rendu les Marocains fiers et a eu notre bénédiction.

En ce qui concerne les associations internationales qui critiquaient le jugement, je leur dis que le Maroc a changé. J’étais une victime des années de plomb, alors que nous étions privés de prendre la parole devant le juge pour notre défense. Le pays a heureusement changé et pendant les procès, les proches des victimes ont même brandi des cartes et des slogans et exprimer librement leurs opinions.

Quelles sont vos prochaines étapes ?

La première et la plus importante exigence, est de se baser sur le droit à la vie dans le cadre du procès et nous allons présenter des avocats pour défendre les familles des victimes.

Nous exigeons que justice soit faite et nous restons contre la peine de mort.  Nous ne ferons pas de pression sur la justice. L'autre partie doit comprendre notre souffrance, puisque eux aussi parcouraient des centaines de kilomètres pour rendre visite à leurs enfants détenus. Nous ressentons ces difficultés mais ils doivent être conscients qu’ils peuvent voir et rencontrer leurs enfants, alors que les nôtres sont enterrés pour toujours.

Que deviendra donc votre association après la fin de ce procès ?

L’association continuera et lorsque la justice rendra son jugement final, nous allons demander à préserver la mémoire des martyrs et leur rendre hommage. Nous allons veiller à représenter les familles des victimes dans les divers forums internationaux pour faire entendre la voix des vraies victimes. Pour conclure, je tiens aussi à souligner que nous avons pleinement confiance dans le système judiciaire comme étant un mécanisme pour assurer l'équité et rendre la justice.

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