Menu

Grand Angle

Langue amazighe : Une officialisation qui tarde à devenir effective

Une nouvelle étape s’est inscrite pour la langue amazighe hier lors du conseil des ministres présidé par le roi Mohammed VI à Tanger. Deux lois concernant la mise en œuvre du caractère officiel de l’amazighe et le Conseil national des langues et de la culture marocaine ont été adoptées. Le plan législatif du gouvernement prévoyait déjà de finaliser le projet de loi sur l'amazigh entre 2013 et 2015. 2016 sera-t-elle l’année où l’officialisation de l’amazigh deviendra effective ?

Publié
DR
Temps de lecture: 3'

La loi adoptée fait l’objet de diverses critiques. Plusieurs acteurs associatifs et responsables amazighs sont sceptiques par rapport à la conjoncture actuelle de son adoption et à son contenu. Le porte-parole du palais royal a fait part dans son communiqué du contenu des lois adoptées. 

L’amazigh et le le Conseil national des langues et de la culture marocaine

La loi organique fixant les étapes de la mise en œuvre de son caractère officiel définit les modalités et mécanismes de son intégration dans l'enseignement et dans les différents secteurs prioritaires de la vie publique. L’amazigh devra être intégré dans le secteur de l’enseignement, la législation, l’action parlementaire, l’information et la communication, la création culturelle et artistique, dans l’administration, les services, établissements et espaces publics et collectivités territoriales.

Le Conseil national des langues et de la culture marocaine va regrouper l’ensemble des institutions concernées par les langues arabe et amazighe ainsi que les autres instances chargées de promouvoir le patrimoine culturel. Dans le cadre de la mise en œuvre de l’article 5 de la Constitution, sont définies ses attributions, sa composition et les modalités de son fonctionnement. Ce Conseil proposera les orientations stratégiques de l’Etat dans les domaines des politiques linguistique et culturelle et veillera à leur harmonisation, sachant que ces orientations seront soumises au conseil des ministres pour approbation. 

Le mouvement amazigh mécontent

Ahmed Assid, président de l’Observatoire amazigh des droits et des libertés, s’indigne contre cette loi, qu’il juge loin de satisfaire les aspirations du mouvement amazigh, et ce qui a été réalisé dans la Constitution.

«Une lettre a été envoyée au roi Mohammed VI pour qu’il crée une commission qui revoit cette loi avant de la faire passer. La loi a été adoptée, il faut désormais attendre le processus des débats parlementaires. Cette loi doit être absolument modifiée, après un débat approfondi avec le gouvernement prochain, parce que celui-là a atteint la fin de son mandat. Elle ne respecte pas la Constitution et ne préserve pas les acquis de l’amazigh durant le processus d’institutionnalisation qui avait commencé en 2001. Cette loi devait préciser les étapes, les modalités et l’intégration de l’amazigh dans l’enseignement et dans tous les secteurs de la vie publique. Malheureusement, cette loi est vide à ce niveau. Les articles 3 et 4 concernant l’enseignement ne disent rien sur le procédé de son enseignement, alors que la Constitution mentionne que la loi doit le préciser», explique Ahmed Assid.

Et de préciser : «Cette loi attendue pendant cinq ans jette finalement la balle dans le camp des autres institutions comme le Conseil national des langues et le Conseil supérieur de l’éducation. Ce n’est pas à ces institutions de décider comment intégrer l’amazigh dans l’enseignement, mais plutôt cette loi qui ne l’a pas fait. D’autre part, on utilise des mots qui ne signifient pas que l’amazigh est obligatoire pour les institutions, par exemple le verbe 'devoir' au lieu de 'pouvoir'. Les expressions utilisées donnent l’impression que l’amazigh est facultatif alors que c’est une langue officielle qui doit être mise en œuvre dans tous les secteurs de la vie publique».

Temps mort et session extraordinaire  

Mohamed Chami, activiste amazigh et professeur universitaire en linguistique, contacté par Yabiladi, estime que le gouvernement doit utiliser ce «temps mort» pour développer l'amazigh : «Nous sommes fiers de la réaction marocaine car nous sommes pionniers dans la région maghrébine à reconnaître l’identité amazighe et à prendre des mesures véritables. La loi adoptée est un point positif. On avait peur que le Conseil ne se réunisse pas. Après la conférence du 21 août qui a réuni 370 associations à Nador, nous avions adressé une requête au roi. Maintenant, la loi connaît des déficiences, une session extraordinaire doit se tenir au Parlement  pour les rectifier et c’est le rôle du président du gouvernement. Cela doit se faire le plus tôt possible. Abdelilah Benkirane a une certaine réticence idéologique : celle de prendre les vraies attitudes démocratiques pour l’avancement de l’état de la langue amazighe.»

Soyez le premier à donner votre avis...
Emission spécial MRE
2m Radio + Yabiladi.com