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Interview

Guillaume Jobin : « Je ne me considère pas comme un auteur marocain mais comme un auteur du Maroc »

Arrivé au Maroc il y a huit ans pour fonder l’Ecole supérieure de journalisme et de communication de Casablanca, Guillaume Jobin a ensuite élu domicile à Rabat en 2010. Marié à la styliste marocaine Fadila El Gadi, ses romans policiers aux intrigues politiques et secrètes détonnent par leur côté prophétique qui les propulse en tête des ventes.

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Les romans de Guillaume Jobin dans un kiosque à Rabat. / Ph. Mounira Lourhzal
Guillaume Jobin entouré de quelques uns de ses lecteurs. / Ph. Mounira Lourhzal
Séance de dédicace organisée par le drugstore Man Ray à Rabat. / Ph. Mounira Lourhzal
Séance de dédicace organisée par le drugstore Man Ray à Rabat. / Ph. Mounira Lourhzal

Après «Route des Zaërs» paru en 2015, son dernier roman «Route d'Anfa» se déroule dans la ville blanche, où se poursuit l'aventure littéraire. Guillaume Jobin, médecin de formation puis journaliste, «auteur du Maroc» tel qu'il se décrit, s’est livré à Yabiladi lors d'une séance de dédicace à Rabat.

Est-ce le mélange de la politique et des services secrets qui stimule votre imaginaire par rapport à votre goût pour les enquêtes ?

Ce sont des romans policiers, mais aussi de politique et d’espionnage et autant de politique nationale ou internationale que d’enquêtes policières. C’est vrai que mon goût pour l’actualité et pour la réalité des faits fait que mes romans s’y prêtent bien parce qu’on peut mélanger le vrai, inventer le réel et l’imaginaire.

Votre proximité avec la sphère politique et diplomatique joue-t-elle également ?

Résidant à Rabat, je fréquente des ambassadeurs, des diplomates marocains et étrangers. De temps en temps j’arrive à glaner des anecdotes, des petits détails, quelque chose d’amusant qui me permet de commenter l’actualité ou d’imaginer comment elle pourrait être commentée, parce que je n’ai pas de lien particulier avec les choses secrètes. Mais à force de fréquenter certains milieux, on arrive à comprendre le pourquoi des choses et d’imaginer après ce qui peut se passer.

Cette particularité de toujours s’installer dans un décor qui parle aux Marocains, l’ancrage dans ce paysage d’abord à Rabat puis à Casablanca… Avez-vous fait des repérages ou bien avez-vous passé suffisamment de temps au Maroc pour le connaître ?

J’ai quand même vécu quelque temps à Casablanca, puis surtout à Rabat. Je ne me considère pas comme un auteur marocain mais comme un auteur du Maroc. J’aime bien parler de choses concrètes. Mon lectorat est d’abord marocain et ensuite francophone de tous les pays. Quand j’achète un livre, j’aime lire des choses réelles, pas de l’imagination ou de la fiction pure. J’aime m’ancrer dans la réalité, ça rapproche toujours du travail de journaliste.

On remarque un côté prophétique dans vos romans. Avez-vous été surpris avec Route des Zaërs ?

J’ai quand même été surpris. Je suppose que vous parlez de l’affaire des journalistes maîtres chanteurs. J’avais entendu parler d’une affaire comme ça, qui n’était pas du tout de cette dimension là et que j’ai essayé d’enjoliver ; c’est pour ça que j’ai rajouté un deuxième maître chanteur qui était Catherine Grasset. Ma connaissance de la vie marocaine fait que j’ai essayé de coller au maximum à la réalité. Vous savez, comme on dit en mathématiques, pour faire une droite il suffit de deux points. Là, j’avais quatre, cinq points. Je n’avais pas d’hésitations pour broder l’histoire. J’avoue que lorsque l’affaire est sortie, j’ai été très surpris, je me suis dit que ce n’était pas vrai, pourtant ça l’était. Quand j’ai écris «Route d’Anfa», j’ai imaginé des affaires qui allaient sortir. Quand je dis que l’obsession des salafistes est fondamentalement sexuelle, c’était avant que sorte l’affaire des deux adultérins de Mohammedia. Ce n’était pas très loin de la vérité... Je ne fais que constater ce que tout un chacun peut deviner.

Ce qui profite également à vos livres ?

Avec «Route des Zaers», lorsque l’affaire des journalistes maîtres chanteurs est sortie, le livre s’est vite épuisé. On s’est précipité chez l’imprimeur en travaillant trois jours sans dormir pour imprimer un troisième tirage et répondre à la demande. Comme vous le disiez tout à l’heure, je pense que comme mon genre littéraire est relativement nouveau au Maroc, il se vend plutôt bien. Le lecteur marocain en assez de lire les mêmes choses et a envie de découvrir des genres nouveaux.

Toutes les ventes de votre livre vont à l’association que dirige votre épouse ?

Seulement les droits d’auteur. Pour le premier, ça sera quand l’éditeur voudra bien payer, ça fait un an... Le second est en vente depuis le 29 août, donc depuis une semaine. A Man Ray et à Gauthier, il est épuisé depuis trois jours. Le distributeur a effectué une deuxième livraison. Pourtant, c’est la période des vacances et l’Aïd approche. Ce n’est pas la meilleure période commerciale mais je me suis dis ‘autant que le livre sorte à une période où personne ne l’attend’.

Comment se passent les ventes en France ?

«Route des Zaers» s’est très bien vendu. «Route d’Anfa» a été mis en vente en août. Les Français sont en congé, c’est le cauchemar. Pour la rentrée littéraire, je me classe hors système, j’essaie de faire différemment.

Vous attendez-vous à des prix littéraires ?

Comme je ne suis pas en France, je ne risque pas d’en recevoir, et comme je ne suis pas Marocain, c’est pareil. Mais, sans vouloir jouer le prétentieux, je pense que je suis le premier auteur francophone au Maroc depuis trois ans en termes de vente de romans. Hamdoulah, comme on dit…

Article modifié le 2016/09/05 à 15h26

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