Les photos de trois personnes âgées mal en point et abandonnées à même le sol dans une chambre au Centre hospitalier provincial (CHP) de Khénifra, relance le débat concernant la prise en charge de nos chibanis.
Deux de ces personnes ont été admises, après plusieurs jours, dans un établissement de l’Association musulmane de bienfaisance (AMB) alors que le troisième homme séjourne toujours au CHP en raison de son état de santé. Les clichés, pris par un citoyen, montraient trois hommes âgés, maigres et affaiblis en T-shirts assortis de couches pour adulte, dormant par terre sur des couvertures pliées en deux. A leurs côtés, des bouteilles d’eau vides ainsi qu’un seau en plastique «équipent» modestement la chambre.
Le ministère d’El Ouardi renvoie la balle à celui de Hakkaoui
Le ministère de la Santé, réagissant mercredi à cette affaire, avait indiqué que seule l’une des personnes a été admise au CHP de Khénifra. Les deux personnes ne sont pas des patients de l’hôpital, avait déclaré le département d’El Houcine El Ouardi, renvoyant la balle au département de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social. Ce dernier étant en charge des personnes âgées dans des conditions difficiles.
Pour connaître la part de responsabilité du ministère de Bassima Hakkaoui dans cette affaire, nous avons tenté de joindre ce jeudi la ministre mais en vain. Sa conseillère a fini par nous orienter vers la délégation locale de l’Entraide nationale (EN).
Pour s’informer d’abord sur la réaction de la société civile, nous nous sommes dirigés vers l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH). Contacté par notre rédaction, le bureau local de cette ONG à Khénifra nous a confirmé l’admission des deux personnes âgées dans un établissement de l’AMB. Jamal Jamali de ce bureau local nous déclare que «l’AMDH est au courant de cette affaire mais n’a pas intervenu». Il ajoute que «les victimes (les trois personnes âgées, ndlr) n’ont pas sollicité » pour l'instant l’intervention de l’AMDH.
Lâchées par leurs familles, leur entourage et par la société civile, les deux personnes âgées sont admises donc à l’établissement d’accueil pour les personnes âgées. Un centre co-dirigé par l’AMB et l’Entraide nationale, département sous la tutelle du ministère de la Solidarité, de la femme, de la famille et du développement social.
Le Maroc dispose, en effet, de 62 établissements de ce type pour la prise en charge des personnes en situation difficile. Mais il reste loin des attentes de cette population, puisque son seul outil de veille, l’Observatoire national des personnes âgées qui doit permettre d’alerter, évaluer et anticiper l’évolution de la situation des personnes âgées, n’est encore qu’au stade de projet.
Trouver une place dans des centres qui affichent complets
En attendant, c’est l’Entraide nationale qui continue de prendre en charge les admissions et les prises en charge de cette population dont 5,2% vivent seuls selon les chiffres du Haut-commissariat au Plan (HCP). Toutefois, ce sont les autorités locales qui doivent approcher l’EN, à en croire les explications de Yassine Aârfani, délégué par intérim à la délégation locale de l’EN à Khénifra. «Nous avons eu des cas de personnes âgées qui ont été présentées par leurs propres enfants, pour des raisons liées à l’héritage, ou parce qu’ils ne veulent plus les prendre en charge. Actuellement, il faut passer par les autorités locales qui doivent nous présenter ces personnes âgées sans domicile fixe avant leurs admissions dans nos établissements », nous confie-t-il.
Ces établissements sont d’une capacité d’accueil d'environ 60 personnes âgées, ajoute ce responsable selon qui, le troisième homme qui est actuellement au CHP de Khénifra «ira probablement dans un autre établissement de l’Entraide nationale», faute de place au sein du centre de Khénifra.
Pour les centres qui affichent complets, «les places ne sont disponibles à nouveau qu’en cas de décès d’un pensionnaire ou son départ » indique-t-il en soulignant que dans certains cas, les proches de ces personnes reviennent pour les chercher.