Après avoir médiatisé l’affaire du jeune Abdelali qui affirme avoir été expulsé du CHU de Fès alors qu’il est atteint d’un cancer très avancé, nous avons voulu connaitre la version de l’établissement hospitalier. Une source au sein du CHU Hassan 2 nous a ainsi déclaré ce mercredi que Abdelali présentait un cas «très avancé» voir même «désespéré» d’une tumeur. Rejetant catégoriquement les accusions, notre source explique même que le jeune patient aurait été «très gâté» par le centre régional d’oncologie de Fès.
Pour avoir plus de précisions concernant ces propos, nous avons joint la responsable de la cellule communication du CHU. Nawal Mouhoute reste catégorique sur la question relative à l’expulsion. «Expulser un patient ne rentre en aucun cas dans la déontologie» de cet établissement, nous a-t-elle d’emblée affirmé, ajoutant même que «c’est une aberration d’avancer des propos pareils sans fondement. »
La section locale de l’Association l’Avenir des parents et amis des enfants atteints de cancer abonde dans le même sens. Son président, Mehdi Belkhayat nous affirme que «l’expulsion n’est qu’une rumeur » et que le jeune Abdelali a déjà été «suivi pendant 4 ans» et a «eu des soins au CHU Hassan 2. »
La position officielle du CHU, communiquée par cette responsable, indique que «le cas de A. E. est un cas avancé qui, selon les médecins traitants, ne présente ni indication d’hospitalisation, ni indication d’une quelconque chirurgie.» L’établissement public cite ici une décision issue d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP).
Arrivé en 2014 au CHU Hassan 2 de Fès avec une tumeur au niveau du thorax, Abdelali, «outre la prise en charge adéquate qui lui a été accordée », a été soigné selon la version de l’hôpital. Ce dernier persiste et signe : «Etant titulaire d’une carte RAMED, le patient a bénéficié d’une exonération des frais de toutes les prestations : Consultations, examens ambulatoires et traitements, dont la chimiothérapie prescrite par voie orale.»
Le CHU et le médecin traitant se renvoient-ils la balle ?
Pour répondre la question ultime de «pourquoi ce patient fait des allers-retours entre son domicile et l’hôpital alors qu’il est censé être alité ? », le CHU Hassan 2 de Fès indique que «le médecin (traitant, NDLR) est seul habilité à prendre la décision de son hospitalisation selon l’évolution de sa maladie. »
Nous nous sommes donc orientés vers le professeur Naoufal El Mellas, le médecin traitant d’Abdelali. Bien que le service communication du CHU nous ait confirmé sa disposition à nous fournir plus de détails sur le cas du jeune patient, le docteur a refusé de nous répondre, nous invitant à passer par la cellule de communication pour «toute question ou communication sur le sujet ».
Le CHU de Fès nous a appris que le diagnostic initial du jeune garçon « a été confirmé par une relecture de ses examens anatomo-pathologiques par une experte biologique en France.» Notre source au sein de l’hôpital avance, pour sa part, que le patient aurait «subi quatre traitements chimiothérapiques différents, mais sa tumeur est très résistante.»
Malgré leurs explications, toutes les sources contactées n’ont pas pu répondre à notre simple question de départ : Pourquoi Abdelali, compte tenu de son cas avancé, n’est pas pris en charge et hospitalisé ?
Son frère, contacté par nos soins mercredi, semble avoir compris notre question. «Il était déjà alité au début, et il passait 5 à 6 jours à l’hôpital lors des premières séances de chimiothérapie, mais plus maintenant» nous affirme-t-il. Lui et son frère atteint de cancer devaient repartir au village de Bahmad pour revenir à Fès à plusieurs reprises pour des visites «sur rendez-vous».
«Récemment, les rendez-vous sont devenus plus espacés, le dernier étant prévu dans 28 jours», dit-il, indiquant que durant cette période, son frère n’avait pas de place où rester à l’hôpital. Et d’ajouter que dans leur maison familiale à Bahmad, même ses «parents ne s’approchent pas d’Abdelali et ne lui changent même pas les pansements traditionnels qu’on lui met, à cause de sa tumeur et l’odeur qu’elle dégage.»
Rejeté donc par la famille et par l'hôpital public, le jeune malade est actuellement alité dans la clinique privée Annakhil de Fès, grâce à l'intervention de Khadija Al Amri. Il souffre moins mais sa plaie reste toujours «saignante», selon les propos de son frère.