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Interview

Avec Yemma Abdel Alaoui offre une cuisine marocaine décalée

Un nouveau restaurant marocain a ouvert à Paris. Loin du format habituel, Yemma se veut une cantine marocaine atypique offrant de la street food comme on en trouve dans les métropoles américaines ou britanniques. Sauf qu’ici, on mange de la kefta ou du méchoui de veau… proposés sous forme de sandwichs à base de msemen ou de batbout. Depuis quelques jours, la nouveauté parisienne attire la curiosité de plusieurs. Dans un entretien avec Yabiladi, son concepteur, qui n’est autre que le célèbre chef cuisinier, animateur culinaire et acteur Abdel Alaoui, nous en dit un peu plus. Interview.

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Le chef Abdel Alaoui à la manoeuvre chez YEMMA. Photo/Boui-Boui.com
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Qu’est-ce que Yemma ?

Yemma, c’est le genre de cantine marocaine un peu accessible à tous, un couscous qui peut se manger presque sur le pouce, des sandwichs à base de msemen ou de batbout garnis au choix de kefta à la bolognaise ou méchoui de veau, pikles d’oignons, concombres à la fleur d’oranger…

Yemma c’est en fait un mélange de la tradition marocaine, ma culture gastronomique acquise à Londres et au Japon notamment, ainsi que ma culture française, parce j’ai grandi ici [en France, ndlr]. Dans le restaurant on a de vieilles tables, le parquet un peu ancien comme on en trouve dans les appartements, de vieilles boites de conserves…c’est aussi un métissage au niveau de la décoration.

Pourquoi un tel concept à Paris ?

Tout simplement parce que le restaurant marocain en France est plus ou moins synonyme de sortie en famille, cuisine gastronomique, petits plats dans les grands… Le but pour moi est vraiment de vulgariser la cuisine marocaine, la rendre accessible, populaire et un peu ludique, décalée. C’est pour cela que j’ai lancé Yemma.

Comment l’idée vous est-elle venue ?

Cette idée trotte dans mon esprit depuis longtemps : rendre accessible la cuisine marocaine, la simplifier au maximum. J’ai écrit un livre il y a près d’un an pour Hachette sur la cuisine marocaine intitulé : «Ma petite épicerie marocaine». C’est un peu le déclencheur. J’ai fait 20 ans de gastronomie, mais je reviens un peu à mes origines et redécouvre la cuisine marocaine, même si je la connais par cœur grâce à ma mère.

Pourquoi avoir baptisé votre restaurant «Yemma» ?

Au Maroc, quand on se plaint, on dit : «yemma». Quand on se sent bien aussi, on dit : «yemma», la maman quoi ! Moi je suis originaire d’Oujda, on dit «walida», «yemma», «ma»…Pour moi, «yemma» est encore plus représentatif de notre culture.

Dans les restaurants marocains à Paris ou ailleurs en Europe, on trouve des mamans marocaines en cuisine. Chez Yemma, qui est en cuisine ?

Beh c’est moi ! (Rires). C’est moi qui fait la mise en place…Le but est justement de faire travailler les mamans marocaines. Je vais y penser sérieusement à la rentrée, vers septembre-octobre. A partir de cette période, je vais faire venir les épices, les huiles … des coopératives au Maroc. J’aimerais à partir de ce moment-là faire entrer des mamans en cuisine.

C’est le ramadan, comment ça se passe chez Yemma ?

Nous proposons un ftour tous les soirs. Ça se passe bien. La bouche-a-oreille fait de plus en plus effet. Il y a des commandes et on est heureux !

Comment le nouveau concept est-il reçu par les Parisiens ?

Très bien ! Il faut dire que j’ai été longtemps branché street food américaine. Je suis depuis de nombreuses années dans le burger et j’ai d’ailleurs ouvert deux restaurants street burger. Mais depuis quelques années je fais découvrir la cuisine marocaine au travers de mon livre chez Hachette et j’ai fait quelques événements ces deux ou trois dernières années où j’ai essayé de reproduire des recettes.

Du coup, les gens sont bien curieux de voir ce qu’on propose chez Yemma. Ils peuvent entrer, prendre un sandwich dans lequel on retrouve des pickles, des concombres à la fleur d’oranger, méchoui, tout cela roulé dans un msemen. C’est une caritas mexicaine, sauf que c’est le msemen. En somme, je casse un peu les codes en associant ce que j’ai appris à travers le monde et les gens apprécient. Ça commence à faire un petit «boom» et on est content. On commence à avoir des articles sur «le nouveau sandwich parisien», «ce qui manquait à Paris»…

En fait, il y a un grand phénomène sur la street food à Paris depuis trois à quatre ans. Cela existe depuis longtemps à Berlin, Londres,  mais ce que je fais aujourd’hui n’existait pas jusque-là dans la capitale. De plus, les prix restent abordables. Ils vont de 8,50 à 14 euros.

Vous mettez de plus en plus en avant la cuisine marocaine dans vos émissions ou ateliers, c’est voulu ou on vous le demande ?

C’est mon initiative. Sur «C à vous» qui est l’émission qui marche le plus, à titre d'exemple, je fais un poulet au curry avec une aubergine rôtie à l’huile d’argan… Et je continue même au-delà des frontières françaises. Je reviens par exemple d’Algérie où je présente Top Chef. J’y fais découvrir aux Algériens la cuisine marocaine, même s’ils la connaissent très bien et l’apprécie puisque c’est la cuisine étrangère qu’ils aiment le plus. Mais je leur fais découvrir ce que je fais. J’ai par ailleurs des projets de grosses émissions là-bas, c’est dire qu’il y a toute une dynamique en marche pour vulgariser au maximum la cuisine de mes origines.

Est-ce dire le lien fort que vous entretenez avec le Maroc ?

Absolument ! Mes parents résident au Maroc depuis 10 ans et j’y vais tous les deux-trois mois et chaque fois que j’y ai des événements. En fait, l’objectif pour moi est de commencer avec Yemma à Paris, mais plus tard d’avoir un Yemma Casablanca, Tanger ou Marrakech. C’est une suite logique pour moi. Ce serait intéressant de venir casser les codes au Maroc pour faire découvrir mes sandwichs… Je vois déjà même ici à Paris que les Marocains qui viennent manger chez moi sont surpris, le concept est tout à fait nouveau pour eux. Ce serait cool de faire cela pour les Marocains du Maroc, leur montrer différemment ce qu’ils connaissent déjà.

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