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Tribune

Mustapha Kharmoudi : Monde arabe, un nouvel élan ?

C’est avec un fort sentiment de dignité retrouvée que le regard des Arabes est rivé sur la situation en Tunisie et en Egypte. Et comment ne pas se réjouir de ce vent de liberté qui souffle aujourd’hui dans ces deux pays, et demain certainement dans d’autres contrées ? Car c’en est assez que les pays arabes vivotent à la traîne des nations à cause de leurs dirigeants archaïques. C’en est assez que le citoyen arabe reste coincé dans un emprisonnement physique et mental entre des dictatures abjectes et des menaces de l’impasse islamiste.

Publié
Mustapha Kharmoudi, écrivain franco-marocain
Temps de lecture: 4'

Et comment ne pas sentir l’espoir remplir nos cœurs quand on voit tant de jeunes braver la répression policière et crier à la face du monde que le temps est enfin venu de mettre fin à ces tyrannies surannées. Comment ne pas se réjouir que les peuples arabes se soulèvent cette fois-ci pour de bon, à l’initiative de cette belle jeunesse qu’on croyait définitivement dépolitisée et formatée par la fatalité ? Cette jeunesse qu’on imaginait ne vivre que dans le virtuel, et qui justement s’appuie sur les réseaux virtuels pour impulser des mobilisations sans précédent en faveur de la démocratie, de la liberté et de la justice sociale... et contre la corruption qui a gangrené les sociétés arabes depuis plusieurs décennies.

Et quel bonheur de voir les Ben Ali et les Moubarak tomber, au moment même où ceux qu’ils avaient forcé à l’exil sont accueillis en héros dans leurs pays. Quel bonheur de voir à longueur de journée défiler dans la rue des foules enfin débarrassées de cette peur «ancestrale» qui a inhibé des générations entières…

Oh, on voit déjà se dresser un certain cynisme arabe qui prendrait pour des têtes écervelées ces jeunes enthousiasmés à l’idée d’un nouveau monde arabe décomplexé et libre. Tout de même, c’est cette jeunesse, toutes origines sociales confondues, et sans le soi-disant leadership politique traditionnel, qui a ébranlé les fondations de ces tyrannies qui ne savent opposer que la répression brutale et sanglante pour toute réponse à la moindre contestation citoyenne.  

Quelle que soit l’issue de ces gigantesques soulèvements, il est certain que le vieux nationalisme arabe ne pourra plus relever la tête, après ces débâcles et après celles à venir. Il est certain que sera clos le cycle de ces régimes aussi corrompus qu’inefficaces.   

Encore faut-il que les vieilles classes politiques arabes, de gauche et de droite, sachent prendre le train en marche, et comprennent une bonne fois pour toute qu’ils ne peuvent éternellement tenir leurs peuples à l’écart du mouvement de l’histoire et de la modernité.

Fini l'autoritarisme pour éduquer le peuple

Ce qui est en train de se jouer est crucial pour l’avenir : il faut prendre exemple sur cette jeunesse ouverte au monde, cette jeunesse courageuse qui a brisé le mur de la peur. Cette jeunesse prometteuse qui utilise à merveille les outils médiatiques les plus modernes pour chasser les tyrans et réclamer ce qui est dû à tout être humain : à savoir la liberté, la démocratie et la justice sociale. Et foin de ce soi-disant nécessaire autoritarisme pour éduquer je ne sais qui, car ce sont les tenants de cette vision du monde qui ont besoin d’être éduqués…

En se soulevant de façon quasi spontanée, les Tunisiens et les Egyptiens ont mis à terre la vieille vision occidentale qui consiste en un soutien ferme et constant aux pires dictateurs arabes, sous prétexte que ces dictateurs sont les seuls à pouvoir tenir en laisse les islamistes. Les occidentaux ferment les yeux quand ces dirigeants humilient leurs peuples en instaurant la corruption la plus abjecte. Ils ne disent mot quand ces mêmes dictateurs organisent des parodies de consultations électorales qui leur garantissent des scores outrageants. Les occidentaux font à peine semblant de s’émouvoir quand la police réprime dans le sang toute contestation collective réclamant un peu d’espace pour un peu de liberté d’expression.

Bref longtemps la souffrance des peuples arabes a laissé l’Occident dans l’indifférence et l’expectative. Il est vrai qu’on supporte plus la souffrance de l’autre que la sienne propre. Triste sort que les démocraties occidentales aient passé les cinquante dernières années à soutenir des régimes les plus rétrogrades et les plus tyranniques. Triste sort que leurs intérêts matériels et stratégiques aient largement piétiné les valeurs universelles qui sont les fondations même de ces vieilles démocraties.

Triste sort enfin que ces vents de liberté balaient les dictatures sans que l’Occident ne le soutienne énergiquement en vue de jeter les bases d’une nouvelle confiance. Que d’étroitesse d’esprit de ne pas tabler sur la promesse d’une dynamique libératrice de ces jeunesses arabes pour un avenir libre et démocratique.

Entre le marteau et l'enclume

Bien sûr, qui ne sait que les islamistes se tiennent prêts à s’accaparer du pouvoir pour instaurer des régimes tout aussi rétrogrades, sinon plus encore ? Ils sont là à crier à l’avènement de la démocratie avec des arrière-pensées pour le moins non-démocratique. S’ils s’emparent des rennes du pouvoir, nul doute que le champ des libertés se rétrécira. Nul doute que les droits de l’homme en général et ceux de la femme en particulier en pâtiront tôt ou tard. Quelle que soit leur discours, aussi haut pérorent-ils leur nouvelle et hâtive conversion à la démocratie, ils restent au fond d’eux, tout au moins pour l’heure, des archaïques et des autoritaires qui ne rêvent que d’instaurer leurs lois de Dieu aux dépens du libre-arbitre des citoyens qui ne sont à leurs yeux que des déviants à remettre sur le droit chemin.

Cela dit, la jeunesse arabe, constamment aux aguets de ce qui se passe ailleurs et notamment en Iran, ne fait confiance ni aux nouveaux chantres de l’islamisme modéré ou radical, ni aux résidus du vieux nationalisme arabe agonisant.

De toute façon, il faut mettre fin, d’une manière ou d’une autre, à ce cercle vicieux qui met les Arabes entre le marteau des dictatures actuelles et l’enclume de la menace islamiste.

Il n’est guère de solution durable que celle qui consiste à faire confiance en ces jeunesses arabes qui ne supportent plus le chômage, la corruption, la marginalisation culturelle, et l’injustice sociale. C’est avec ces générations montantes qu’on gagne à poser solidement les fondations d’un monde arabe nouveau, d’un monde arabe arrimé à la marche du monde.

Autrement, ce sera encore plus de dictature et encore plus de révolte. Et ce qui s’ensuit de radicalisation de part et d’autre…

Mustapha Kharmoudi, écrivain franco-marocain

Dernières publications :
-  « Ô Besançon (une jeunesse 70) », roman, 2009
-  « La saison des figues », nouvelles, 2010

Site internet : 
http://kharmoudi.mustapha.free.fr

Donnez-moi la définition du mot Liberté svp......
Auteur : Chibani2
Date : le 02 février 2011 à 19h12
Malheureusement le mot liberté connait pas et surtout celle de l'expression et de l'opinion.Dans mon intervention je parle des pays du Maghreb et pays Arabe mais je ne fais aucune comparaison.Si vous me dites que vous vivez sous une Monarchie séculaire tant mieux pour vous mais à vos côtés il y a des peuples qui préfèrent de vivre 50 ans comme des lions que 300 ans comme des moutons c'est le choix de chacun et c'est ça la liberté et mettez-vous bien ça en tête que la Démocratie ne vient jamais sans sang et la révolution,c'est la tentative pour faire aboutir les rêves....
À qui le dites-vous, naimo ?
Auteur : loiseaurare
Date : le 02 février 2011 à 17h57
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Au maroc, on a déjà gouté à la liberté.
Auteur : naimo slaoui
Date : le 02 février 2011 à 15h59
A Chibani 2,
Pourquoi vous cherchez toujours à comparer l'incomparable.
Le Maroc est une monarchie séculaire que les marocains dans leur majorité,aiment et respectent.
Le jeune Roi qui a était à bonne école, a compris, dés le début de son régne que les peuples avaient besoin de liberté.
Pensez vous que Benali,ou Moubarak ont donné à leur citoyens des occasions de s'exprimer librement?
Des théoriciens et des champignons !
Auteur : loiseaurare
Date : le 02 février 2011 à 15h37
Pour qui ces riches théoriciens nous prennent-ils ?
Il y a des gens qui, pour une raison ou d’autre, ont gâché leurs vies ; ils voulaient épouser des régimes totalitaires tels le communisme Stalinien et Cubain pour ne citer que ceux là, ils ont alors vu leurs rêves se briser sur des roches du Makhzens, et parce que, encore hantés par la peur d’un fantôme nommé Makhzen, ils n’ont trouvé d’autre moyens pour se faire justice que la lâcheté devenu à la mode ces jours-ci ; c.à.d, lancer des appelles aux gens pour faire ça ou cela. Ces gens, qui se cachent dans des villas de luxes, des suites d’hôtels ***** assis derrière leurs pc, veulent nous faire croire qu’ils sont sérieux et honnêtes ; détrompez-vous, car les jeunes- surtout du Maroc- savent bien que vous êtes simplement des HYPOCRITES, prêt à bondir sur le gâteau une fois mit sur la table !
Mais à quoi sert la Ligue arabe ?
Auteur : aswatfree
Date : le 02 février 2011 à 13h01
Créée en 1944, la Ligue arabe a été incapable de résoudre le moindre problème survenant dans les pays qui en sont membres.
Le président égyptien Moubarak qui a mis en place Amro Moussa au poste de secrétaire général de la Ligue arabe doit dégager aussi car il ne sert pas les intérêts du peuple arabe.
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