La décision «irrévocable» du non retour des fonctionnaires de la Minurso expulsés du Sahara semble avoir fait des remous au sein du Polisario. Pour mener l’offensive diplomatique, le chef du front a adressé un courrier au SG de l’ONU, Ban Ki-Moon demandant à l’organisation internationale de faire pression sur le Maroc pour que le royaume cesse d’interférer dans les affaires des soldats de la Minurso, rapporte Reuters qui a consulté la lettre.
Rhétorique guerrière
«Nous avertissons que l'absence de pression réelle et directe sur le Maroc ... sera considérée comme un feu vert à une agression militaire par le Royaume du Maroc contre le peuple sahraoui », écrit le président du Polisario, Mohamed Abdelaziz. Selon lui, les 15 membres du conseil de sécurité devraient faire pression sur le Maroc pour «le retour de la MINURSO afin qu’elle reprenne son travail et son mandat concernant l’organisation d’un référendum sur l’autodétermination du peuple sahraoui ». Le chef du Polisario va même plus loin affirmant que si la Minurso ne revenait pas, le peuple sahraoui «va se retrouver, encore une fois, obligé de défendre ses droits par tous les moyens légitimes, y compris la lutte armée ».
Le Polisario a encore ressorti une rhétorique bien rôdée, celle de la menace de reprendre les armes contre le Maroc. Mohamed Lamine El Bouhali, un ancien "ministre de la Défense" du front plaidait déjà en mars pour un retour aux hostilités armées. Pour prolonger le récital, c'est le représentant du Polisario à l'ONU, Ahmed Boukhari qui indiquait 2 semaines plus tard qu'un retrait de la Minurso serait «une invitation à la guerre». Pourtant les inquiétudes du front ne sont que partiellement fondées. L'expulsion décidée par le Maroc, ne concerne que le personnel civil et politique de la Minsurso. La composante militaire de la Minurso, chargée du maintien de la paix continue de mener son travail. Le retrait de la Minurso n'est donc pas total.
Un timing bien choisi
Le Polisario a bien choisi le timing de son courrier. La lettre intervient après que le SG de l’ONU a reporté la semaine dernière la présentation au Conseil de sécurité de son rapport annuel sur le Sahara. Le courrier intervient aussi avant le vote au cours de ce mois, du renouvellement du mandat de la Minurso. Pour le Polisario le Maroc tente de faire capoter le plan pour l’organisation d’un référendum pour l’autodétermination afin de promouvoir le plan d’autonomie qu’il propose.
Des sources de Reuters analyse l’expulsion du personnel de la Minurso comme une stratégie pour modifier le mandat de la Minurso afin d’en rayer toute mention de l’organisation d’un référendum, ce à quoi la majorité des membres du Conseil est opposée. Les mêmes sources indiquent que le Maroc peut compter sur le véto français et le soutien du membre africain du Conseil, le Sénégal.
Pour rappel, en réponse à la déclaration de Ban Ki-Moon qualifiant la présence marocaine dans le Sahara occidental d’«occupation», le Maroc a décidé d’expulser 83 fonctionnaires de la Minurso et la fermeture du bureau militaire de l’ONU au Sahara. Une décision qualifiée d’«irrévocable» par les autorités marocaines. A noter que la Minurso est installée au Sahara depuis 1991 à la faveur d'une médiation onusienne suite à un conflit dans la zone.