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Grand Angle

Lutte contre la radicalisation au Royaume-Uni : Un programme gouvernemental attire les critiques

Le syndicat enseignant au Royaume-Uni a vivement critiqué l'obligation pour les professeurs de signaler tout élève suspecter d'appartenir à un groupe radical ou de véhiculer des idées extrémistes en classe. Il estime que cette obligation contenue dans la stratégie de lutte contre la radicalisation et le terrorisme est inefficace et contre-productive. De plus, elle jette la suspicion et la stigmatisation sur la communauté musulmane sans vraiment la protéger contre l'islamophobie. Le syndicat enseignant et les associations d'étudiants ont lancé des pétitions pour le retrait de cette mesure.

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Au sein du Syndicat national des enseignants (NUT) tout comme à l’Union nationale des étudiants (NUS) du Royaume-Uni, le plan de lutte contre la radicalisation que le gouvernement a lancé en 2015 fait grincer des dents. Baptisé «Prevent Strategy» (stratégie de la prévention), le plan gouvernemental vise à détecter très tôt auprès des plus jeunes, les signes de radicalisation. Dans ce but, les professeurs sont tenus depuis l’été dernier à signaler à la police tout comportement suspect ou tout signe de radicalisation observé chez les élèves dans les classes de tout le Royaume-Uni.

Comme le rapporte The Guardian, le syndicat des enseignants a profité de son Congrès national pour critiquer les dispositifs de la stratégie gouvernementale. Les intervenants  à ce congrès ont tour à tour dénoncé une stratégie qui jette «la suspicion dans les salles de classes et la confusion dans le corps enseignant». Ils ont aussi pointé l’inefficacité de la stratégie et le faible soutien accordé aux écoles pour sa mise en œuvre. Certains enseignants ont signalé que le devoir des enseignants de prévenir la police de tout comportement suspect alimentait encore plus les stéréotypes en particulier contre les musulmans systématiquement assimilés à la radicalisation et au terrorisme. Par ailleurs, les enseignants ont souligné que dans la plupart des cas, la radicalisation se faisait sur internet et pas dans les salles de classes. Le syndicat n’en dénonce pas moins une stratégie qui cible les musulmans

Des chiffres qui confortent le caractère islamophobe de la stratégie

Selon des données accessibles aux public en vertu de la liberté d'information, le syndicat rappelle qu'entre 2007 et 2010, 67% des références sur le radicalisme et le terrorisme de la stratégie «Prevent» concernaient  les musulmans. Entre 2012 et 2013, ce chiffre était de 57,4 % alors qu’au Royaume-Uni, les musulmans ne représentent que 5% de la population.

Le gouvernement de son côté explique ne viser aucun groupe religieux en particulier mais vise toutes les formes d’extrémisme. Seulement selon le NUT la définition de l’extrémisme comme tout problème lié aux musulmans ou à l’islam rend plus vulnérable les élèves issus de cette communauté. Il s’y ajoute que le budget que la stratégie octroie en guise de soutien aux autorités locales est calculé au prorata du nombre de musulmans selon le NUT.  La pétition de la NUT fait suite à celle de la NUS qui a lancé une campagne «étudiants pas suspects» dénonçant une mesure qui ne promeut pas l’équité au sein des étudiants puisque les élèves musulmans sont ceux qui en souffrent le plus. Dans le passé, cette mesure avait conduit à des dénonciations infondées d'enfants musulmans d'à peine 10 ans par leurs professeurs suscitant la peur des musulmans dans les établissements et la stigmatisation des enfants issus de cette communauté. 

La difficulté du gouvernement britannique sera de trouver l’équilibre entre l’impératif sécuritaire de lutter contre le terrorisme et le radicalisme et la protection des minorités contre le racisme religieux. Il peut peut-être choisir de suivre le conseil de la NUT de trouver des solutions alternatives pour lutter contre l’extrémisme. Au terme de leur congrès, les enseignants ont voté une  pétition réclamant au gouvernement britannique, le retrait de l’obligation de prévenir la police. «Le NUT appelle le gouvernement à faire participer la profession dans l'élaboration de stratégies alternatives pour protéger les enfants et l’identification des risques encourus par les jeunes».

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