Polémique dans les cockpits à bord des avions de la RAM. La compagnie nationale est pointée du doigt dans une enquête diffusée le 23 mars dernier par l’émission «Pièces à conviction» de France3. L’enquête de la chaîne française portait sur le «pay to fly». Une pratique courante qui consiste pour un pilote novice à payer une compagnie aérienne pour passer des heures de vols qui vont lui permettre par la suite de cumuler les 500 heures de vols nécessaires à son embauche dans une compagnie aérienne.
Tout au long de l’enquête, les journalistes de France3 vont suivre un jeune pilote diplômé d’une école privée. L’enquête révèle que des agences intérimaires sont à la manœuvre pour mettre en relation des pilotes fraîchement diplômés avec des compagnies aériennes. Ces dernières proposent aux nouveaux diplômés des programmes pour acquérir les 500 heures de vol nécessaires pour être embauché à des prix élevés. Le jeune pilote suivi par la chaîne française a pu filmer en caméra cachée, son entretien dans une de ses agences d’intérim ayant pignon sur rue en Lituanie.
Au cours de cet entretien, l’agent qui accueille le jeune pilote explique que la Royal Air Maroc propose un programme de 500 heures de vols à … 62 5000 euros. Ce programme consiste, toujours selon l’enquête, pour le jeune pilote à embarquer en tant que copilote à bord de vols réguliers de la RAM en provenance du Maroc et à destination de l’Europe. Pire encore, l’agent révèle que contrairement aux autres compagnies qui exigent une évaluation préalable poussée, pour la RAM «vous payez et vous commencer la formation !»
La révélation de l’agence lituanienne met au jour une pratique, qui, si elle est avérée compromet gravement la sécurité des 6 millions de passagers que la RAM transporte en moyenne chaque an. Cette révélation est d’autant plus dangereuse que l’enquête s’est attelée à mettre en rapport, des accidents aériens survenus par le passé et l’inexpérience des pilotes engagés en «pay to fly».
La RAM crie au faux témoignage et décide de porter plainte
Dans un communiqué parvenu à la rédaction, la compagnie nationale balaie d’un revers de main, les accusations soulevées dans l’enquête. La compagnie qualifie de «mensongers», les propos tenus par l’agent lituanien. La RAM va même jusqu’à affirmer n’avoir jamais collaboré avec l’agence lituanienne citée dans le reportage. «Aussi, et en regrettant que les réalisateurs du reportage se soient appuyés sur un faux témoignage pour avancer des conclusions erronées, la compagnie a saisi les autorités judiciaires compétentes eu regard du préjudice subi», annonce le communiqué. Et le communiqué insiste sur le processus de formation des pilotes que la RAM présente comme rigoureux et respectant les standards internationaux.
Sans toutefois préciser si la compagnie avait recours au «pay to fly», le communiqué indique que «la formation des pilotes étrangers par Royal Air Maroc n’a aucune vocation commerciale. Elle s’inscrit dans la dynamique de mettre à profit l’expertise et les infrastructures de premier plan de la compagnie au service d’une formation qualifiante».
Il faut soulever que les poursuites judiciaires annoncées par la compagnie ne concernent pas la chaîne de télévision qui a affirmé dans son enquête avoir contacté la RAM pour recueillir sa réaction. Des appels restés sans réponse selon la chaîne française. Aujourd’hui, si elle est avérée, c’est sur la légalité de la pratique du «fly to pay» au Maroc que la question se pose. Il faut espérer que la RAM apportera d’autres explications.