EDITORIAL. Depuis neuf ans à la tête du portail Yabiladi.com, j’ai vu passer plusieurs ministres dédiés aux MRE, ainsi que de nombreuses communications politiques publiques à l’égard de la diaspora. Si pendant longtemps, les actions se limitaient à de la communication [souvent maladroite], force est de constater une amélioration sensible dans l’approche des spécificités de cette communauté. Des mesures vont dans le bon sens et nous avons eu l’occasion de le souligner sur Yabiladi.com.
Parmi celles-ci citons la gratuité des passeports biométriques pour les mineurs, l’enseignement de la langue amazighe, ou encore l’abattement pour les retraités MRE des droits de douanes pour l’import de leurs véhicules d’occasion. Or cette dernière mesure, présentée par le Ministre M. Ameur, comme un succès indéniable (plus de 26 000 retraités en ont profité) a été vidée de toute sa substance depuis le 1er janvier 2011. Le ministère du Transport et de l’Equipement a promulgué une nouvelle loi interdisant l’homologation de tout véhicule de plus de 5 ans d’âge. Nous sommes rapidement montés au créneau pour vérifier que les retraités (au moins) bénéficieraient d’une dérogation. Aucun ministère n’a pu nous apporter des éclaircissements. Nous avons obtenu un début de réponse (malheureusement décevant) du côté du Centre d’homologation. Mais celui-ci a finalement exclu toute dérogation pour les retraités en mettant en avant l’argument environnemental qui ne tient pas la route (Cf. page 10).
Une mesure censée être un geste hautement symbolique à destination de nos retraités a été, semble-t-il, sabordée pour ménager les intérêts des concessionnaires automobiles au Maroc. Des calculs court-termistes oubliant que cette mesure avait une portée intergénérationnelle, permettant de maintenir les liens entre le Maroc et les jeunes MRE.
A propos toujours des retraités MRE, la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) en France a bénéficié d’une mystérieuse aide des services de la police des frontières marocaine (Cf. page 08). Cette dernière aurait ainsi transmis le détail des entrées et sorties des chibanis afin de prouver qu’ils passaient la majeure partie de l’année au Maroc.
De simples citoyens Marocains qui subissent le même traitement qu’un criminel recherché par Interpol, cela laisse sans voix. D’ailleurs le ministre M. Ameur n’a pas répondu à ma question sur ce sujet lors de l’émission télévisée Biladi. Comment peut-on criminaliser de vieux travailleurs saisonniers qui toute leur vie ont jonglé entre le Maroc et la France, 6 mois ici, 6 mois là-bas ?
Ces deux coups portés à nos aînés ont ému de nombreux jeunes MRE. Comment un pays qui n’arrive pas à mener à son terme la seule petite mesure en faveur des retraités, qui les abandonne aux mains du zèle administratif de la CAF, peut-il mener une politique en faveur des nouvelles générations ? La gratuité des passeports biométriques suffira-t-elle à conquérir le cœur de cette nouvelle jeunesse marocaine à l’étranger ? On peut raisonnablement en douter.
Il est évident que le gouvernement marocain ignore comment gérer les nouvelles générations de MRE. Nous sommes surpris de constater que c’est avec le même désarroi que des politiques sont menées à l’égard de nos chibanis. Un pas en avant, deux pas en arrière…
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