Le 17 décembre 2010 et le 14 janvier 2011, deux dates à retenir dans l'histoire de la Tunisie. Le 17 décembre, Mohamed Bouazizi, jeune diplômé chômeur devenu vendeur ambulant à Sidi Bouzid, a tenté de s'immoler par le feu sous les fenêtres du gouverneur de la ville. Les forces de l'ordre avaient saisi ses marchandises, il était désespéré. Décédé le 4 janvier 2011, il aura déclenché un énorme mouvement protestataire. Parti du centre du pays, les manifestations ont atteint Tunis le 11 janvier. Le 12, un couvre-feu a été instauré dans la capitale, et l'armée a été déployée dans les rues.
Mercredi, le ministre de l'Intérieur a été limogé. Jeudi, Ben Ali s'est une troisième fois adressé aux Tunisiens – en dialecte. Il annonce que les réseaux sociaux ne seraient plus bloqués, et il promet de quitter le pouvoir en 2014.
Une promesse qu'il tiendra beaucoup plus tôt que prévu, car vendredi 14 janvier, les évènements s'accélèrent. Facebook retrouvé, plus de 10 000 internautes se donnent rendez-vous dans les rues de Tunis pour manifester de nouveau. Plusieurs milliers suivent l'appel, mais en début d'après-midi, la police intervient et disperse les manifestants.
Plus tard dans l'après-midi, Ben Ali tente de faire descendre la pression et annonce la dissolution de son gouvernement et des élections législatives anticipées. Le premier ministre Mohammed Ghannouchi est maintenu. La colère des manifestants ne diminue pas, et les accrochages avec les forces de l'ordre se multiplient.
Vers 17h, l'état d'urgence est instauré, avec couvre-feu dans toutes les régions. La négociation n'a pas marché, l'Etat durcit le ton: les forces de l'ordre reçoivent de nouveau l'ordre de tirer sur les personnes suspectées de désobéissance. Ceci sera le dernier coup de force du règne de Ben Ali. Un règne de 23 ans, dont la fin est annoncée en début de soirée. Sur la chaîne de télévision nationale, le Premier Ministre déclare qu'il assurera l'intérim de la présidence, Ben Ali étant «dans l'incapacité d'assurer ses fonctions». La vérité, c'est que le désormais ancien président tunisien a quitté le pays pour une destination encore inconnue. Certains médias internationaux l'annonçaient dans la soirée à Malte en France ou dans un pays du Golfe. Mais rien n'a été confirmé. L'Elysée de son côté, a fait savoir qu'elle ne souhaitait pas accueillir Ben Ali selon l'AFP.
Entre temps, les pays voisins craignent que les évènements de ce vendredi fassent tache d'huile. Jeudi, une manifestation de soutien au démocrates tunisiens a donné lieu à des accrochages violents à Rabat. Et vendredi soir, un appel a été lancé sur Facebook pour un nouveau sit-in, à 22 heures, devant l'ambassade de Tunisie à Rabat.