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Grand Angle

Djihadisme : Un Marocain en Belgique agent double ?

L'«évaporation» d'un Marocain de 42 ans à l'ouverture d'un procès où son témoignage était déterminant, alimente les suspicions de son double rôle. Indic un temps pour les Espagnols, Abdelkader El Farssaoui a ensuite travaillé pour les autorités belges. Seulement dans son dernier "poste", on lui prêterait des rôles allant au delà de la simple tache d'infiltration des réseaux radicaux. El Farssaoui serait un agent-double qui aurait longtemps mené en bateau les services espagnols avant de travailler à Bruxelles où il aurait joué un rôle d'accompagnateur pour les jeunes candidats au djihad.

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Audience lors du procès de la "filière Denis"/ Crédit Photo: RTBL
Temps de lecture: 3'

Mais où est donc passer Abdelkader El-Farsaoui? La réponse à cette question est déterminante au moment où vient de s'ouvrir à Bruxelles, le procès de membres de la «filière Denis», poursuivis pour «participation aux activités d'un groupe terroriste», rapporte Marianne

Parmi les personnes figurant sur le banc des accusés, deux jeunes bruxellois qui sont partis faire le djihad en Syrie, ont expliqué aux policiers qui les ont arrêtés à leur retour que leur convoyeur est bel et bien Abdelkader El-Farssaoui. Les deux jeunes ex-candidats au djihad risquent jusqu'à 5 ans de prison tandis que le convoyeur marocain de 42 ans a été convoqué de «manière exceptionnelle» comme simple témoin par le parquet fédéral. Des analyses téléphoniques ont également confirmé qu'El-Farssaoui qui chaperonnait et accompagnait les jeunes candidats au djihad jusqu'à l'aéroport était en même temps... un indic de la police belge après l'avoir été pour leurs homologues espagnols. 

El-Farssaoui, un personnage ambigu ayant un double-jeu

Pourtant dès 2009, Scott Atran et Marc Sage, deux spécialistes américain du djihadisme ont émis des doutes sur l'ambiguïté du personnage dans leur analyse de l'échec des services de renseignements espagnols lors des attentats de Madrid en mars 2004 qui ont fait 191 morts. Sous le pseudonyme de "Cartagena", Abdelkader El Farssaoui officiait à cette époque en tant qu'imam à la mosquée Takouma de Villaverde située dans la banlieue de Madrid. Mais Abdelkader El-Farssaoui avait aussi été recruté  en 2002 par l'Unité central  de l'information extérieure, les services de renseignements espagnols pour infiltrer les milieux radicaux. L'homme aurait été au même moment en liaison avec les services marocains. 

Selon le rapport des deux experts américains, Abdelkader El-Farssaoui qui monnayait ses informations, n'a pas fait que livrer les noms des deux cerveaux présumés des attentats de Madrid. D'après Scott Atran et Marc Sage, au vu de ses «sympathies djihadistes» et du caractère volontaire des rapports qu'il livrait à ses employeurs espagnols, Abdelkader El-Farssaoui se livrait à un double-jeu. Pire encore, il aurait mené en bateau les services espagnols. 

Convoyeur de jeunes mais pas inquiété

Par ailleurs, les autorités belges s’intéressent fortement au parcours d'Abdelkader El-Farssaoui entre 2011 et 2014. L'homme aurait été le convoyeur de plusieurs jeunes candidats au djihad qu'il aurait accompagné parfois jusqu'aux aéroports menant en Turquie. Il les aurait même suivi parfois à distance après leur arrivée dans les zones occupées par l'Etat islamique. En plus, selon le dossier d'instruction en cours dans le procès de la «filière Denis», le nom de ce Marocain figure dans beaucoup de contacts téléphoniques, de réunions et de démarches de facilitation pour le départ en Syrie. 

Pour preuve, lors du mariage d'un bras-droit d'un recruteur, Abdelkader El-Farssaoui, également surnommé Abou Jaber a fait partie des invités triés sur le volet. Pourtant, là où tous les convives ont été poursuivis pour avoir participer à cette réunion secrète, Abdelkader El-Farssaoui a, quant à lui, échappé aux poursuites. Même Mohamed Merah est venu le rencontrer en 2013 avant de commettre son acte pour «avoir des réponses en matière religieuse», selon ses dires. 

«Abou Jaber avait le don de bien expliquer les choses, [vu qu'] il avait déjà envoyé des gens. Mis à part Caner [l'intermédiaire posté en Turquie pour assurer la transition], c'est Abou Jaber qui a parlé directement et franchement des modalités pour se rendre en Syrie. Il connaissait toutes les modalités pratiques : comment cela se passe sur place, comment s'y rendre, comment faire [...] A chaque fois que j'avais un doute, je devais me retourner vers lui pour être réconforté dans mes pensées, car les autres pouvaient me détourner du bon chemin», révèle un jeune de la «filière Denis» dans son PV d'audition.

Evaporé, "Not Wanted"

Des éléments qui accréditent la thèse d'un rôle d'El-Farssaoui beaucoup plus impliqué que simple indic. «Avec autant d'éléments à charge, il est impensable qu'Abdelkader el-Farssaoui n'ait pas été inquiété», peste l'avocat des familles des jeunes candidats arrêtés. Selon les dires de l'ancien indic, il a été entendu 4 fois par les enquêteurs belges. Lors d'une perquisition à son domicile, il y a deux ans, on découvre une fausse carte de visite d'un journal sportif marocain, des cartes SIM. Rien de bien compromettant. 

L'homme s'est complètement évaporé et les enquêteurs belges ont perdu sa trace mais n'ont pas lancé de mandat de recherche international. Est-il protégé par une immunité? Etait-il un agent double ?  Des questions qui resteront sans réponse s'il n'est pas retrouvé.

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