Attaque du Bardo: L'Italie ne va pas extrader le Marocain arrêté

Niet ! Répond la justice italienne à la Tunisie. Le président de la cour d’appel de Milan, Giovanni Canzio a rejeté aujourd’hui la demande d’extradition du jeune marocain de 22 ans Abdelmajid Touil vers la Tunisie où il est soupçonné d’avoir apporté un «soutien logistique» aux auteurs de l’attentat du Musée du Bardo à Tunis en mars dernier, indique le site du quotidien italien La Stampa.

Pour étayer son refus, le magistrat prend appui sur l’article 27 de la constitution italienne qui interdit le recours à la peine de mort. Il explique que le fait que Abdelmajid Touil risque la peine capitale en Tunis, «représente une raison empêchant son extradition ». Le juge ne laisse même pas d’issue pour la possibilité d’une extradition vers la Tunisie du jeune marocain. «La convention bilatérale d'extradition Italie-Tunisie ne prévoit aucun mécanisme de conversion de la peine de mort en une autre peine de réclusion. En outre, l'autorité tunisienne n'a fourni aucune assurance sur la non-exécution de la peine capitale» explique le magistrat italien dans un communiqué relayé par la presse locale. Mieux, le risque encouru par le Marocain sera mis à son profit. «Le refus de l'extradition est accompagné automatiquement de la libération du détenu» estime Giovanni Canzio. 

Immigré irrégulier pour l’Italie, complice d’attentat pour la Tunisie

Passé le camouflet pour la justice tunisienne, c’est plutôt sur l’innocence ou la culpabilité du marocain que l’on s’interroge. Arrêté le 20 mai dernier à Milan suite à un mandat d’arrêt international émis par la justice tunisienne, le jeune ressortissant  n’a cessé de clamer son innocence depuis que pèsent sur lui les accusations de complicité dans les attentats qui ont visé le musée du Bardo et causé la mort d’une vingtaine de touristes en mars dernier.

Plusieurs éléments plaident en sa faveur. Le jeune homme est arrivé irrégulièrement en Italie en février sur une de ces embarcations de fortune qui rejoignent désespérément les côtes siciliennes. Mieux, des fiches de présence et plusieurs témoignages attestent que le jeune était présent à des cours pour adultes au moment de l’attentat. L’enquête italienne avait établi que le jeune homme était arrivé le 3 février en Tunisie avant de rejoindre 3 jours plus tard la Libye d’où un passeur l’aurait transporté en compagnie des dizaines d'autres migrants irréguliers, dont son profil ne diffère pas, vers Porto Empedocle, dans le sud de la Sicile. Un arrêté d’expulsion avait même été émis à l’encontre du Marocain qui avait débarqué un mois avant l’attentat du Bardo.

Sur les éléments de preuves à charge contre le marocain, la justice tunisienne reste floue puisque dans le délai de 40 jours suivant l’arrestation d’Abdelmajid Touil, le ministère tunisien de l’Intérieur n’a pas fourni de preuves convaincantes pour la justice italienne. Pour l’Italie donc le jeune homme n’est qu’un migrant sans-papier qui a tenté de rejoindre sa famille [sa mère, aide-soignante et ses deux frères y résident en situation régulière, ndlr], même s’il peut y être toujours poursuivi en Italie. Pour la Tunisie qui n’a encore apporté aucune preuve de l’implication du jeune homme, Abdelmajid Touil a apporté «une aide logistique» aux auteurs présumés de l’attentat du 18 mars 2015.

A moins de prouver l’existence du don d’ubiquité, comment le jeune homme qui se trouvait en Italie a-t-il pu apporter une aide à des terroristes qui se trouvaient en Tunisie ? De cette question dépend peut être la levée définitive des charges contre le jeune homme.