Etait-ce pour lui remonter les bretelles ? En tout cas rien n’a filtré de l’entretien si ce n’est que le bâtonnier de Paris a convoqué Me Hicham Naciri, l’émissaire du palais qui a enregistré les conversations avec son I-phone lors de ses entretiens avec le journaliste Eric Laurent comme le révèle un site français. Du côté du conseil de l’ordre des avocats de Paris on souffle que «Pierre-Olivier Sur [Bâtonnier de Paris, NDLR] a bien convoqué ce confrère, qui s'est rendu à cette convocation». Mais on ne sait pas si une procédure disciplinaire pèse sur l’avocat marocain inscrit au Barreau de Paris.
Pour rappel, lorsque le journaliste essayiste français, Eric Laurent, préparant alors un livre à charge contre la famille royale, contacte le 23 juillet dernier le secrétariat du Palais royal à Rabat pour exiger un rendez-vous, c’est l’avocat marocain, Me Hicham Naciri qui est envoyé en émissaire. Le 11 août dernier, l’avocat rencontre le journaliste au bar de l’Hôtel Royal Manceau. Ce dernier ne sait pas qu’Hicham Naciri enregistre la conversation au cours de laquelle le journaliste aurait réclamé 3 millions d’euros pour renoncer à la publication de son livre. Le Maroc a déposé plainte au niveau du parquet de Paris. Par la suite, ce premier enregistrement a semble-t-il été retravaillé ce que réfute l’avocat du roi, Me Eric Dupond-Moretti qui parle de «changement de format» pour mieux rendre celui-ci audible.
Le 21 août, l’avocat et le journaliste se revoient, sous surveillance policière et sous enregistrement de Hicham Naciri. Une information judiciaire est ouverte et placée sous la supervision de 3 juges d’instruction. C’est finalement le 27 août lors d’un dernier rendez-vous au restaurant de l’hôtel Raphaël dans le 16ème arrondissement de Paris, que les deux journalistes après avoir rédigé et signé un contrat de renonciation pour 2 millions d'euros et avoir empoché 40.000 euros d’avance chacun, sont arrêtés. Ils seront plus tard gardés-à-vue puis mis en examen pour tentative de chantage et extorsion de fonds sur la personne du roi Mohammed VI.
Le premier enregistrement aurait pu être retravaillé mais le second est exempt de tout reproche
Ce sont ces enregistrements des 21 et 27 août que les avocats des deux journalistes veulent écarter du dossier en introduisant une requête en annulation à la cour d’appel de Paris. Pour les avocats des deux journalistes, les écoutes constituent une «administration déloyale de la preuve» en ce qu’elles ont été réalisées par un avocat inscrit au barreau de Paris avec l’accord du parquet de Paris alors que la justice ne pouvait les ordonner pour des raisons de droit. «Ce stratagème (...) a permis aux enquêteurs de contourner et d'éluder les dispositions pourtant très strictes du code de procédure pénale en matière de sonorisations et ne constitue rien d'autre qu'un contournement illégal de la loi » ajoute pour sa part Me William Bourdon, l’avocat d’Eric Laurent. En tout cas, une chose est sûre c’est sur le premier enregistrement dont un laboratoire lyonnais a reconnu qu’il aurait pu être retravaillé, ainsi que sur le second exempt de tout reproche que l’instruction devrait se baser pour faire la lumière sur cette affaire rocambolesque.