«Ne vous attendez pas à ce que je salue le roi d’Arabie saoudite comme je salue les autres chefs d’Etat arabes». C’est la riposte du chef du gouvernement à la vague de critiques sur les réseaux sociaux contre son baise-épaule, à deux reprises, du monarque saoudien à l’aéroport Ibn Battouta de Tanger.
Dans des déclarations au quotidien Akhbar Al Yaoum, Abdelilah Benkirane a défendu son geste, affirmant que c’est la seule manière qu’il connait pour exprimer son respect au souverain wahhabite. «C’est un grand ami du Maroc et du roi Mohammed VI» qui «aime le Maroc» et qu’il «est un homme âgé. Il a l’âge de mon père», a rappelé le PJDiste dans sa plaidoirie. Et de préciser qu’il avait l’habitude de faire la même chose avec le roi Abdallah. Une affirmation qui ne résiste pas à l'épreuve des archives photos.
Les photos qui trahissent Benkirane
Depuis sa nomination à la tête de l’exécutif, le secrétaire général du PJD était souvent chargé de recevoir des chefs d’Etats en visite officielle ou privée au royaume. Ce qui lui avait, d’ailleurs, permis de souhaiter la bienvenue au défunt roi saoudien à l’occasion de ses multiples déplacements au Maroc pour poursuivre ses périodes de convalescence. Des photos sur internet sont nombreuses réfutant l'affirmation de Benkirane. Elles montrent en effet le chef du gouvernement saluant avec respect Abdallah Ben Abdelaziz Al Saoud mais seulement de la main et sans le moindre baise-épaule.
Au delà de cette tentative de noyer le poisson par Benkirane, il y a une lecture politique à faire de cet accueil chaleureux. En effet, la manière avec laquelle le PJDiste a embrassé les épaules de Salman n’est pas dénuée d’intérêts politiques. Abdelilah Benkirane compte bénéficier de la position modérée de l’actuel roi à l’égard des Frères musulmans pour renouer avec les Saoudiens. Sous Abdallah, les relations entre les islamistes de la Lampe et les Saoudiens s'étaient nettement détériorées, notamment après la destitution de l’ancien président égyptien Mohamed Morsi par Abdelfattah Al Sissi. Une opération que Ryad avait fortement soutenue alors que le PJD avait dénoncé.
Ces appels du pied aux wahhabites ne sont pas uniquement l’œuvre de Benkirane. La semaine dernière, le religieux Ahmed Raissouni, le n°2 de l’Union internationale des savants musulmans (sunnites, très proche des Frères musulmans), a publié un article très critique de la politique étrangère de l’Iran, qui selon ses dires, se rapproche du «grand satan» (une allusion aux Etats-Unis) et combattent le «grand frère» saoudien.