La presse espagnole se déchaine contre le Maroc. Ce n’est pas nouveau mais il faut avouer que ces derniers jours ça en devient ridicule. Même la MAP se délecte de pouvoir enfin taper sur son homologue espagnol (EFE). Difficile de comprendre cet acharnement, ce parti pris, si on ne tient pas compte de l’opinion espagnole qui garde un mélange de peur et de rancœur atavique des «moros». Le Maroc est devenu un enjeu de politique intérieure au même titre que la situation économique, l’ETA, ou le mariage homosexuel.
Tarik Ibnou Zyad n'est pas mort !
Les médias sont ainsi à l’affut de tout ce qui pourrait permettre d’alimenter la haine du maure, ou pour taper sur le «faible et couard» gouvernement Zapatero. Le quotidien madrilène, La Voz Libre, a réussi à trouver l’occasion de faire d'une pierre deux coups. Vous imaginez bien qu’il n’allait pas laisser passer l’occasion. Ainsi dimanche matin, le site web du journal publiait un article (Persil, Zapatero aurait officialisé l’expansion du Maroc) présentant une photo de Zapatero alors opposant à Aznar et le roi Mohamed VI. Lors d’une inauguration, les deux posaient devant une plaque de marbre recouverte d’une carte du Maroc qui englobait évidemment le Sahara Occidental, Ceuta, Melilla, les Iles Canaries, et même l’Andalousie. (sic)
Bizaremment, la rédaction du journal n’a pas trouvé ça ridicule, non. Le journaliste a même enfoncé le clou, sûr de lui et de ses sources infaillibles. «Non ceci n’est pas un photo-montage» assène-t-il avec certitude dans le sous-titre, content d’avoir levé un lièvre, le Watergate espagnol. Imaginez le retentissement de cette bourde politique si les faits sont avérés ? Le chef de l’opposition espagnole qui pose avec le souverain marocain devant une carte qui amputerait l’Espagne de plus du tiers de son territoire, c’est énorme ! Tellement énorme, tellement grossier, qu’on a du mal à croire une once de ce scoop. Et pourtant le journaliste de la Voz Libre a sauté les deux pieds dedans.
D’ailleurs le premier commentaire d’un certain «naroh» n’a pas tardé à remettre en place le journal et son fake ridicule. Une rapide recherche vous permet de retrouver la photo d’origine qui n’a rien de scandaleuse puisque c’est bien une plaque de marbre pour les classiques inaugurations.
Paf ! Dans les dents. Qu’à cela ne tienne, le site web du journal prend un virage à 120° et reformule une grande partie de son article quelques heures après. Le titre ne change pas, toujours aussi accusateur, mais le sous-titre se veut plus humble : «C’est un montage photo largement diffusé sur internet». Il doit également édulcorer la fin dans une pirouette tout aussi ridicule. «C’est sans doute une exagération. Ou peut être pas ?». Quelle outrecuidance !
Vous ne trouverez pas d’erratum, aucune excuse auprès des lecteurs ni auprès de Zapatero ou du Maroc. Dans cette guerre médiatique on peut tout se permettre, d’autant plus que le ridicule – comme je l’indiquais en préambule – ne tue pas ! Pourtant, depuis ma petite fenêtre, j'observe les corbillards de la crédibilité et du professionnalisme passer, roulant au pas comme pour mieux appuyer ce moment solennel. Derrière, une longue foule de lecteurs impuissants, en larmes, enterre ses derniers espoirs d’avoir une information fiable et crédible.