Corruption des fonctionnaires, versement de pots-de-vin pour gagner des marchés publics, détournement de fonds, efficacité de la lutte anti-corruption... Evalué dans tous ces domaines, le Maroc n'a pu progresser que de 0,2 point sur une échelle de 10 et de 4 places au classement depuis l'année dernière. Pas assez pour que Transparency compte le pays parmi ceux où le niveau de corruption a sensiblement baissé dans son indice de perception de la corruption 2010, présenté ce mardi (lire rapport).
Au Maghreb, le Royaume se retrouve ainsi derrière la Tunisie (59e avec un score de 4,3) et devant l'Algérie (105e/2,9), la Mauritanie (143e/2,3) et la Libye (146e/2,2). Le Qatar, 19e avec 7,7 points sur 10, est le premier pays arabe au classement; le Botswana a fait le meilleur résultat au niveau de l'Afrique (33e/5,8).
Le classement est mené par le Danemark, la Nouvelle Zélande et Singapour (tous ont un score de 9,3), alors qu’en bas de tableau, il y a l’Irak (175e/1,5), l’Afghanistan et Myanmar (176e/1,4), puis la Somalie (178e/1,1).
L'IPC est l'élément phare de la lutte contre la corruption à laquelle TI s'adonne depuis 1993. L'index de perception de la corruption est élaboré depuis 1995. Comme l'indique son nom, plus qu'une mesure objective, il mesure comment le secteur privé perçoit la corruption dans le secteur public. La raison en est que la corruption – «l’abus à des fins privées d’un pouvoir reçu en délégation» – est une pratique dissimulée, difficile à chiffrer. Mais comme l'indique Transparency : «Au fil du temps, il s’est avéré que les perceptions permettent d’établir une estimation fiable de la corruption.»
Le Maroc et son plan anti-corruption
Le conseil du gouvernement a adopté finalement le 21 octobre au lieu du 14, le plan biennal (2010-2012) de lutte contre la corruption. Il a été dévoilé à la presse par Mohamed Saâd El Alami, ministre délégué chargé de la Modernisation des secteurs publics, le vendredi 22 octobre. A travers ce plan, l’Etat veut se donner les moyens d’endiguer la corruption. Mais pour Rachid Filali Meknassi, secrétaire général de TM, «les déclarations d’intention et l’adoption des lois qui n’ont pas de chance d’être appliquées ne peuvent convaincre personne». En d’autres termes, ce plan ne pourra pas faire grand-chose, car c’est du «déjà-vu».
«Une grande partie des mesures figuraient déjà dans le plan de 2005 et d'autres dans celui de 1998. Elles ont déjà été exécutées il y a dix ans», a-t-il précisé. De même, il a déploré l'absence de concertation des autorités avec les milieux d'affaires et les organisations de la société civile concernés. «Il n'y a pas eu de participation de la société civile, je ne fais pas allusion seulement à Transparency Maroc, aucune organisation de la société civile n'a été invitée ni dans la phase de conception, ni dans la phase de mise au point (...). A aucun moment on n'a été associé, on n'a même pas été invité à la conférence de presse où a été annoncé ce plan.».
Qui a donc élaboré ce plan ? Rachid Filali Meknassi a indiqué que c'est un «document unilatéral élaboré par six administrations constituées en comité interministériel». Le plan en question a proposé la mobilisation de la société civile pour l'exécution de la politique gouvernementale. Seules quelques propositions émanant de la société civile ou de certains ministères, ont été prises en compte. «Ce sont des éléments sur lesquels nous travaillons ; comme la loi sur la défense des témoins, la loi sur l’accès à l’information», a expliqué Rachid Filali Meknassi. Par contre, «la reforme de la justice, la levée de l’impunité, le suivi des constatations du rapport de la Cour des comptes, ne sont pas dans le plan de lutte contre la corruption».
TM, association reconnue d'utilité publique essaye tant bien que mal de lutter contre la propagation de la corruption. Comme l’a rappelé un représentant de Transparency Liban, présent à la conférence de presse, la lutte contre la corruption est un combat long et périlleux. Le phénomène de la corruption est presque aussi ancien que l’homme. La mise en place d’un plan ne suffira pas, les lois doivent être appliquées à la lettre.