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22h00, mercredi 18 février au Mégarama de Casablanca, les gens commencent à faire la queue pour prendre un ticket. Deux jeunes filles courent et sautent de joie lorsqu’elles aperçoivent l’affiche du film «50 nuances de Grey».
Etant donné que le Mégarama avait retiré les horaires de son site, nul n’était sûr qu’il allait réellement être diffusé. Un groupe de trois jeunes hommes guettent les filles en leur lançant «Vous allez voir quel film les filles ? On se retrouve à l’intérieur ?». Le film n’a pas commencé, qu’il fait déjà son effet.
L’interdiction de moins de 16 ans n’a pas empêché les plus jeunes de rester éveillés et attendre impatiemment la séance de 22h30. A la question «quel âge as-tu ?», une adolescente rit jaune et nous regarde de travers.
Dans la salle, moins d’une centaine de spectateurs. Moyenne d’âge, 21 ans. Le film démarre par une chanson de Nina Simone «I put a spell on you», à traduire par «je t’ai jeté un sort». Plus un bruit dans la salle. Les premiers rires se feront entendre lorsque les personnages principaux parleront d’homosexualité.
A chaque insinuation sexuelle, le public riait, de gêne ou d’autre chose, mais il riait de bon cœur. La tension était palpable au moment de la présentation de la chambre sadomasochiste de Grey. Une jeune fille de 22 ans déclare à qui veut l’entendre que «le film peut enfin commencer» (après 45 minutes).
Censure et commentaires
Les images de pratiques sadomasochistes n’ont pas été coupées. Certains n’en revenaient pas. Un homme de 28 ans, accompagné de sa petite amie, ne pensait pas que le Centre cinématographique marocain (CCM) laisserait passer des images d’orgasmes et de fouets.
Un jeune homme de 17 ans -qui en faisait moins- pense le contraire et s’attendait à beaucoup plus érotique. Son commentaire a été acclamé par ses quatre copains. Une fille de 20 ans a lu le livre en anglais et en français. Elle dit avoir aimé le film, mais il manquait plusieurs scènes «chaudes» décrites dans le livre. Une jeune femme de 27 ans ne qualifierait pas ce film d’érotique : «Ils se sont trop attardés sur le côté émotionnel. Au début c’était trop romantique pas érotique». Une jeune femme de 32 ans fait un commentaire qui fera rire plusieurs passants «Benkirane n’a pas dû voir le film !»
Entre coups de fouet, scènes de fessées et d’orgasmes, les Marocains ne retiendront pas de censure particulière de la part du CCM car même certaines parties intimes des personnages ont été diffusées. Ce qui les a le plus choqué, c’est que le film ait fait autant de bruit; alors qu’il n’atteint pas en réalité le niveau sulfureux du livre.
*Le lendemain de la publication de notre article le Mégarama a jouté sur son site la phrase suivante : «Des scènes susceptibles de heurter la sensibilité de certains publics ont été coupées du film».
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